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Carole Bouquet, actrice intemporelle

Portrait de Carole Bouquet réalisé en 1995 par le Studio Harcourt[CC/Studio Harcourt]

Depuis ses débuts en 1977, Carole Bouquet est devenue une actrice accomplie et a joué dans près de cinquante films. Souvent située dans l’inconscient collectif comme « femme fatale » pour ses rôles dans les films de Luis Buñuel et Bertrand Blier, Carole Bouquet a fait de sa carrière cinématographie une épopée inclassable. Portrait d’une actrice intemporelle.

 

Archive – Article publié le mercredi 12 décembre 2007

 

Alors à peine âgée de 20 ans, Carole Bouquet débute en 1977 sous la direction de Luis Buñuel, dans Cet obscur objet du désir où elle interprète Conchita I, l’incarnation élégante et froide du désir qui tourmente le vieil homme joué par l’acteur fétiche de Buñuel, Fernando Rey (doublé pour les besoins du film par Michel Piccoli, un autre habitué de l’œuvre bunuélienne). Fasciné par son physique autoritaire et par ses vingt ans, Luis Buñuel fond devant cette jeune actrice entrée au Conservatoire supérieur d’art dramatique de Paris l’année précédente et au nom illustre – bien qu’elle ne soit pas parente du célèbre acteur Michel Bouquet. « Un pur cauchemar », selon la jeune première, car le casting a été très rapide. Personne pour la rassurer, et l’impression d’avoir été recrutée uniquement pour son charme. Ses peurs seront largement dépassées, car le film est devenu un classique et la nomination aux césars est le gage de la qualité de son interprétation. Ses premiers pas devant la caméra seront déterminants.

 

Vidéo : Carole Bouquet dans Cet Obscur objet du désir (Luis Buñuel, 1977) – en français sous-titré anglais

 

 

Loin du foyer des sœurs dominicaines où elle a été envoyée avec sa sœur aînée lorsqu’elles étaient adolescentes, c’est en effet sous la direction des plus grands réalisateurs que Carole Bouquet s’accomplira réellement, de Bertrand Blier (Buffet froid et Trop belle pour toi) à André Téchiné (Impardonnables) en passant par Francis Ford Coppola (New York Stories, film à sketches coréalisé avec Woody Allen et Martin Scorsese), Werner Schroeter (Le Jour des Idiots et Poussières d’amour) ou encore Claude Berri (Lucie Aubrac).

La vraie révélation se fera deux ans plus tard sur le tournage de Buffet froid (Bertrand Blier, 1979). Carole Bouquet y signe une interprétation glaciale. L’image d’une femme réservée et renfermée, au regard grave, lui restera collée à la peau pendant plusieurs années. Dix ans plus tard, en 1989, elle retrouve Bertrand Blier dans Trop belle pour toi. Carole Bouquet recevra le césar de la meilleure actrice. Tout comme Sophie Marceau qui elle-même commença très tôt sa carrière, Carole Bouquet a mis dix ans pour se sentir à l’aise sur un plateau de cinéma. « J’ai commencé à avoir vraiment du plaisir sur ce tournage », raconte t-elle. « C’est à ce moment-là que j’ai réussi à me regarder et apprécier les compliments que l’on me faisait ».

 

Vidéo : Bande-annonce de Trop belle pour toi (Bernard Blier, 1989) – en français sous-titré anglais

 

 

Du sérieux au frivole

Elle a été une James Bond Girl dans Rien que pour vos yeux (John Glen, 1981), au côté de Roger Moore. Elle y campe le rôle de la sulfureuse Melina Havelock qui la révèle au grand public français et américain, annonçant déjà les prémices d’une carrière internationale, même si elle se souvient que « le tournage n’en finissait pas et qu’à la fin c’était ennuyeux ! ».

 

Vidéo : Carole Bouquet dans Rien que pour vos yeux (John Glen, 1981) – en anglais

 

 

Depuis, les choses ont bien changé. Le visage de la Madone au regard froid s’est éclairci et l’actrice n’a cessé d’enchaîner les tournages. Au-delà des rôles de femmes sophistiquées souvent trahies, quittées ou assassinées, Carole Bouquet nous a donne au fil de sa carrière l’image d’une femme drôle et capable d’incarner des personnages plus étonnants les uns que les autres. Dans Travaux, on sait quand ça commence (Brigitte Roüan, 2005), elle incarne une avocate délurée qui souhaite redonner un coup de frais à son appartement et à sa vie par la même occasion. Et avec les péripéties auxquelles on pouvait s’attendre, on découvre une actrice très amusante, capable de se lâcher.

 

Vidéo : Bande-annonce de Travaux, on sait quand ça commence (Brigite Roüan, 2005)

 

 

Depuis le début de sa carrière, la comédienne alterne les rôles au cinéma et au théâtre. Elle s’est même essayée au téléfilm, en interprétant en 1998 madame de Rênal dans l’adaptation télévisée du roman de Stendhal, Le Rouge et le noir (Jean-Daniel Verhaegle, 1998). Elle se souvient : « Le personnage de madame de Rênal a comblé mon désir de romanesque ». Pour son deuxième rôle en costume d’époque, l’actrice raconte comment un habit a pu donner une dimension beaucoup plus importante à son personnage: « Le corset fait toute la différence, il est un vrai carcan physique et mental. Coincée à l’intérieur, on ressent bien l’exclusion des femmes de cette époque. J’ai compris qu’il s’agissait d’un instrument de coercition, une contrainte qui bridait la liberté de mouvement et condamnait les femmes à de simples tâches ». L’actrice prolongera sa collaboration avec le réalisateur de ce film dans deux adaptations, une de Bérénice de Racine (À propos de Bérénice, 2000) ainsi que dans une nouvelle version de Madame de … de Louise de Vilmorin (Madame de …, 2001), déjà mis en scène par Max Ophüls en 1953 avec Danielle Darrieux, Charles Boyer et Vittorio de Sica. Carole Bouquet fera également une apparition remarquée dans le dernier épisode de la série culte avec Sarah Jessica Parker, Sex and the City.

 

Vidéo : Carole Bouquet dans Sex and the City (« An American Girl in Paris », Timothy Van Patten, 2004) – en anglais

 

 

Jouer à contre-emploi

Carole Bouquet a toujours su jouer sur les deux tableaux, passant d’un genre à un autre avec finesse. Elle reste une amoureuse des bonnes choses et si elle était un climat, une saison ou un fruit, elle serait sans hésitation le Sud, et plus particulièrement la Sicile en été pour son raisin. Elle y a installé sa résidence depuis plusieurs années et s’adonne à l’une de ses grandes passions : le vin. Elle se dit vigneronne et non viticultrice «car le mot est plus terrien». Son nectar s’appelle «sangue d’oro» ou sang d’or, comme les couleurs du drapeau de l’île. Parlant de ses terres, Carole Bouquet se sent « à sa place pour de vrai ». Fabriquer quelque chose avec les ressources du pays, c’est sa manière à elle d’être une Italienne. Il lui aura fallu dix ans pour réunir les dix hectares de terres abandonnées en terrasses. Une fois remis en état, l’endroit est devenu son «Eden», son coin de paradis : l’évocation des parfums qu’il dégage la transporte littéralement.

 

Vidéo : L’actrice-vigneronne française Carole Bouquet vient présenter son vin au Cercle du Lac en 2012

 

 

Femme entière et amatrice des choses simples, Carole aime être seule, elle ajoute même que c’est avec le temps que c’est venu: « En vieillissant, je supporte mieux la solitude car au final, je me sens de moins en moins seule ». Même si on lui prête un tempérament de solitaire, la vie de Carole Bouquet a été faite de rencontres extraordinaires. D’abord celle avec son premier mari, le père de son fils, Jean-Pierre Rassam. « J’étais persuadée que cet homme m’aimait pour ce que j’étais, que tout lui plaisait », et d’ajouter « que cette rencontre a changé [sa] vie ». Leur histoire se termine comme dans un mauvais film. Jean-Pierre Rassam meurt d’une crise cardiaque et laisse Carole Bouquet élever seule leur fils de trois ans. Plus tard, en 1997, c’est l’idylle qu’elle vit avec Gérard Depardieu qui sera mise sur le devant de la scène. Avant d’être un couple à la ville pendant sept ans, les deux acteurs ont été partenaires à l’écran. En 1979 dans Buffet froid, puis en 1984 avec le film de Philippe Labro, Rive droite, rive gauche, sans oublier plusieurs autres longs métrages comme Trop belle pour toi de Bertrand Blier ou Un pont entre deux rives de Gérard Depardieu et Frédéric Auburtin en 1998.

 

Vidéo : Bande-annonce de Grosse Fatigue (Michel Blanc, 1994) où Carole Bouquet joue le rôle de … Carole Bouquet

 

 

Une femme engagée

La carrière de Carole Bouquet ne se résume pas à la cinquantaine de longs métrages à son actif. À l’instar d’Emmanuelle Béart, de Kristin Scott Thomas ou de Juliette Binoche, elle est également une femme engagée et passionnée. Si c’était une cause, ce serait celle de La Voix de l’enfant dont elle est le porte-parole. Cette association créée en 1981 a pour but « l’écoute et la défense de tout enfants en détresse quel qu’il soit, où qu’il soit ». Elle n’est pas une marraine mais réellement une femme qui s’investit dans cette aventure qui dure depuis plus de vingt ans. Sur le terrain et en totale collaboration avec l’association, elle mène une action importante pour aider les enfants et faire respecter leurs droits.

Femme simple et bonne vivante, Carole Bouquet a aussi été l’égérie d’une grande marque de parfum. Bien avant que l’acteur américain Brad Pitt ne s’illustre lui aussi dans ce rôle, l’actrice a été pendant plus de dix ans le symbole de la maison Chanel pour sa célèbre fragrance, le N° 5. Pourtant la mode ne l’intéresse pas même si « la haute couture, pour sa rareté et l’exigence de son travail, mérite que l’on y jette un coup d’œil ! ». Et d’ajouter que « c’est comme de la sorcellerie, car n’importe quelle femme habillée dans une robe faite pour elle est extraordinaire ».

 

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