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Kristin Scott Thomas, une anglaise à Paris

Kristin Scott Thomas en 2012[Capture d'écran Youtube]

C’est la plus française des actrices britanniques. Sa double culture s’illustre autant dans sa filmographie que dans ses compositions, souvent empreintes d’une élégance altière et d’une distance très aristocratique.

 

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Elle est anglaise, mais parle français couramment. Elle est née à Redruth, en Cornouailles, mais vit à Paris. Film après film, elle accède à un statut de star, reconnue notamment par le public français. Dans son livre Petite fabrique des rêves et des réalités, Philippe Claudel écrit à son sujet : « Je me suis toujours étonné du fait que le cinéma français, à mon sens, la sous-employait en lui offrant des rôles secondaires ou un peu archétypaux, tout en lui reconnaissant un très grand talent. J’étais heureux de lui donner, avec le personnage de Juliette, l’occasion de prouver qui elle était vraiment : une grande actrice ». Juliette, c’est le prénom du personnage incarné par Kristin Scott Thomas dans Il y a longtemps que je t’aime, réalisé par l’écrivain lorrain et récompensé par deux Césars dont celui du meilleur premier film en 2009.

 

Une double culture

Si la native de Redruth, en Cornouailles, dispose d’un passeport anglais, elle se considère elle-même comme une citoyenne française. C’est de ce côté de la Manche, où elle s’est installée à 19 ans, qu’elle a rencontré son mari (dont elle a divorcé en 2004) et qu’elle a élevé ses trois enfants. On peut voir dans cet attachement à son pays d’adoption une volonté de laisser derrière elle une enfance dans le Yorkshire et le Dorset marquée par le malheur et le chagrin. La petite Kristin n’a pas encore 5 ans lorsque son père, pilote dans la Royal Navy, meurt dans un accident d’avion. Le malheur semble s’acharner sur la famille puisque sept ans plus tard, c’est au tour du beau-père, lui aussi militaire, de disparaître dans des conditions identiques. En dépit de la douleur de ce double deuil, sa mère doit subvenir seule à l’éducation de ses quatre enfants. Aussi, c’est une jeune fille sensible et solitaire, élevée dans la rigueur des traditions militaires et le dénuement matériel, qui aborde l’adolescence. Une vie à des années-lumière des rôles qu’elle connaîtra dans sa future carrière. « Je suis sûre que si j’avais grandi avec mes deux parents, si j’avais grandi dans un environnement confortable, si j’avais grandi avec une sensation de sécurité plutôt que de danger, je ne serais pas celle que je suis », confiait-elle en 2008 à un journal néo-zélandais.

 

Vidéo : Kristin Scott Thomas dans Quatre Mariages et un enterrement

 

 

Exil libérateur

On pourrait imaginer qu’une jeunesse autant marquée par le manque l’aurait incitée à embrasser une carrière plus pragmatique, à se tourner vers un milieu professionnel dans lequel les rentrées d’argent sont moins aléatoires. C’est pourtant la comédie – à laquelle sa mère s’était également formée avant son mariage – que choisit Kristin Scott Thomas. Toutefois, elle s’oriente d’abord vers l’enseignement, et suit une formation pour devenir professeur d’art dramatique à la Central School of Speech and Drama de Londres. Mais rapidement, la future actrice s’aperçoit qu’elle veut jouer, et non pas se contenter d’enseigner. « Je savais qu’à Londres cela ne se produirait pas, parce que je n’avais pas le courage, et que l’on me disait que je n’avais pas de talent », confesse-t-elle. Elle décide alors de partir pour la France, et s’installe à Paris à 19 ans, en tant que jeune fille au pair. Quelques années plus tard, devenue parfaitement bilingue, elle rejoint l’Ecole nationale supérieure des arts et techniques du théâtre. En 1986, elle décroche son diplôme et son premier rôle au cinéma : c’est le chanteur Prince qui le lui offre, dans le premier long métrage qu’il réalise, Under the Cherry Moon.

L’année suivante, elle donne la réplique à Catherine Deneuve et Richard Bohringer dans Agent trouble de Jean-Pierre Mocky. Puis elle retourne en Angleterre pour tourner sous la direction de Charles Sturridge dans Une poignée de cendres, qui lui vaudra l’Evening Standard Award du meilleur espoir féminin. Elle enchaîne les seconds rôles notamment dans Force majeure de Pierre Jolivet et dans le sulfureux Lunes de fiel, de Roman Polanski (1992). Avant le tournage du Patient anglais qui la rendra célèbre, elle avait enchaîné deux rôles diamétralement opposés. En 1994, son interprétation de la meilleure amie secrètement amoureuse de Hugh Grant dans Quatre mariages et un enterrement lui permet enfin de se faire remarquer du grand public. Ses longues robes noires, son ton désabusé, sa voix également marquent les mémoires. Avec cette comédie, elle devient célèbre. Deux ans plus tard, son charme rétro fait fureur dans l’excellent Richard III, réalisé par Richard Loncraine, qui transpose dans les années 1930 l’ambitieux personnage de Shakespeare.

 

Vidéo : Kristin Scott Thomas dans Le Patient Anglais

 

 

La consécration

Sa notoriété désormais établie, Kristin Scott Thomas peut se montrer plus exigeante et prétendre à des rôles plus consistants. En 1997, Le patient anglais, dans lequel elle vit une magnifique histoire d’amour adultère avec Ralph Fiennes, la propulse au rang de star. Le romantisme, Kristin Scott Thomas l’incarne dans Le patient anglais (Anthony Minghella, 1997). Ce film constitue sans doute le point culminant de sa carrière cinématographique. Elle y campe le personnage de Katharine Clifton. C’est sa rencontre avec cette femme, dans le désert libyen, dont le fameux patient anglais, le comte Lazlo de Almásy (Ralph Fiennes), se souvient sur son lit de mort. L’adaptation du roman de Michael Ondaatje, L’homme flambé, est bardée de récompenses, dont l’oscar du meilleur film. Kristin Scott Thomas est nominée pour l’oscar de la meilleure actrice, qui est finalement remis à Frances McDormand pour son rôle dans Fargo, le film de Joel et Ethan Coen.

 

Vidéo : Kristin Scott Thomas dans L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux

 

 

Depuis Mission : impossible (1996) de Brian de Palma à la Doublure (2006) de Francis Veber, en passant par L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux (1998), Kristin Scott Thomas participe ensuite à des films aux qualités artistiques diverses. Elle poursuit sur sa brillante lancée dans le mélodrame avec L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, où elle succombe au charme de Robert Redford. Elle a ensuite pour partenaires masculins Harrison Ford dans L’ombre d’un soupçon, de Sydney Pollack, ou Sean Penn dans Il suffit d’une nuit, de Philippe Haas.

Installée en France, elle continue à mener sa carrière entre l’Hexagone, l’Angleterre et les Etats-Unis. Ces dernières années, elle a ainsi collaboré aussi bien avec Jean-Paul Salomé (Arsène Lupin), Francis Veber (La doublure) ou Guillaume Canet (Ne le dis à personne), Robert Altman (Gosford Park) ou Niall Johnson (Secrets de famille), que Paul Schrader (The Walker).

 

Vidéo : Kristin Scott Thomas dans Only God Forgives

 

 

Ses choix de carrière, outre Il y a longtemps que je t’aime, le premier film réalisé par l’écrivain Philippe Claudel sont pour le moins hétéroclites. Dans Deux sœurs pour un roi, elle renoue avec le film d’époque, mais elle joue aussi dans Seuls Two, signé par le duo comique Eric et Ramzy, dans l’adaptation de la bande dessinée Largo Winch et pour la première fois un rôle de méchant dans Only God Forgives de Nicolas Winding Refn.

Ce sont essentiellement des films anglo-saxons qui ont permis à Kristin Scott Thomas d’accéder à la reconnaissance. Mais elle a réussi à devenir une actrice française à part entière, sans renier cette pointe d’accent britannique qui lui donne tant de charme.

 

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