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Leonarda, l'affaire qui affaiblit Hollande à gauche

Leonarda Dibrani et sa famille, à Mitrovica le 20 octobre 2013 [Armend Nimani / AFP] Leonarda Dibrani et sa famille, à Mitrovica le 20 octobre 2013 [Armend Nimani / AFP]

L'affaire Leonarda a réveillé le procès en manque d'autorité fait au chef de l'Etat, dont les décisions et la recherche systématique de la synthèse ont été critiquées tout au long du weekend, jusqu'au sommet du Parti socialiste.

Loin de s'éteindre, comme l'espérait François Hollande, la polémique n'a cessé d'enfler, relançant au passage le débat sur la montée du Front national, à cinq mois des municipales et sept mois des européennes. Pire, elle est désormais centrée sur la personne du Président et non plus seulement sur le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls.

Pour Jérôme Fourquet (Ifop), "à vouloir ne mécontenter personne, on en a fâché beaucoup et surtout, on donne l'image d'un président qui hésite, qui a la main qui tremble au moment de trancher".

La critique la plus pénible pour le chef de l'Etat est venue samedi de sa propre majorité, quand le Premier secrétaire du PS, Harlem Désir, a estimé que les frères et soeurs de la collégienne kosovare Leonarda devaient, comme elle, être autorisés à poursuivre leurs études en France.

Le président a confirmé l'expulsion de toute la famille, mais autorisé Leonarda, âgée 15 ans, à revenir en France "seule".

Dimanche, le député socialiste Malek Boutih a vivement reproché au président Hollande de "décider de tout et pour tout", ne voyant dans sa position sur cette affaire "ni un sens politique, ni un sens juridique".

"C'est la première fois qu'on demande à une enfant mineure de choisir entre sa scolarité et ses parents", s'est-il indigné. "On a parlé de +jugement à la Salomon+, mais (M. Hollande) n'est pas un roi. Ce n'est pas à lui, tout seul, de trouver le bon équilibre des réponses à donner", a-t-il dit. "Il y a le feu à la démocratie".

Capture vidéo de François Hollande à l'Elysée, le 19 octobre 2013 [ / Pool/AFP]
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Capture vidéo de François Hollande à l'Elysée, le 19 octobre 2013
 

Le député socialiste Jean-Christophe Cambadélis avait pourtant juste auparavant exhorté les socialistes à "se calmer" et à "respecter la doctrine fixée par le président de la République". "Cette classe politique est transformée en volière, où tout le monde caquète dans tous les sens", avait-il lancé.

"Quand (les critiques) viennent de notre propre camp, je le déplore, car cela nous affaiblit collectivement", a déclaré le ministre de l'Intérieur Manuel Valls dans les colonnes du Journal du Dimanche. "Le geste du Président est un geste de générosité pour Leonarda, mais la famille ne reviendra pas", a-t-il dit.

"Faute inexcusable"

Si elle fait défaut au PS, l'unité est au contraire clairement retrouvée dimanche à l'UMP... pour tirer à boulets rouges sur le locataire de l'Elysée. "Tout cela fait monter le Front national et je ne laisserai pas faire", a lancé Jean-François Copé. "Il n'est pas question de laisser l'extrême droite profiter de l'impéritie du président de la République".

Le président Hollande a "bafoué" les lois de la République et commis une "faute inexcusable", agissant "en chef de parti et pas en chef d'Etat", a renchéri l'ancien ministre UMP Bruno Le Maire.

Pour l'ancienne garde des Sceaux (UMP) Rachida Dati, François Hollande a même "violé la Constitution" en exemptant Leonarda d'une décision de justice imposant l'expulsion à toute la famille.

Manifestation de lycéens à Paris, le 18 octobre 2013, contre les expulsions de leurs camarades sans-papiers [Kenzo Tribouillard / AFP]
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Manifestation de lycéens à Paris, le 18 octobre 2013, contre les expulsions de leurs camarades sans-papiers
 

A l'Elysée, on jugeait dès samedi cette avalanche de critiques "extravagante", invoquant une décision "discrétionnaire" du président, relevant d'un "choix humanitaire".

"Le problème de Hollande, c'est sa pratique du pouvoir qui ne correspond pas à la logique d'un chef de l'Etat qui, sous la Ve République, doit trancher", estime cependant Gérard Grunberg, politologue au Centre d'études européennes de Science Po.

Il faut craindre "qu'à l'hyper présidence (de Nicolas Sarkozy) succède l'hypo-présidence" de François Hollande, souligne-t-il.

"Dans de nombreux domaines - les institutions, l'Europe ou l'immigration -, le PS est, au pire, idéologiquement hostile à toutes les politiques menées par le Président de la République, au mieux, il le laisse faire sans le soutenir", souligne M. Grunberg.

Outre "une relative perte de contact avec l'opinion publique", le politologue y voit un "paradoxe, quand une grande partie des socialistes essaient de détruire politiquement le seul ministre socialiste populaire", à savoir Manuel Valls.

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