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Le Guide Michelin, la bible des gastronomes

Le chef autrichien Dieter Koschina est à la tete du restaurant de l'hôtel Vila Joya, deux étoiles au Guide Michelin[CC/Porto Bay Events - Porto Bay Hotels]

Chaque année, au moment de la sortie du guide Michelin, une grande effervescence apparaît dans les cuisines des chefs français et étrangers. Guide parmi les guides, il est le manuel qui fait et défait la cote des maîtres queux d’exception en France et dans plus de vingt pays.

 

Archives – Article publié le 9 janvier 2008

 

Tant par son histoire que par sa réputation actuelle d’«arbitre» de la gastronomie française, le guide rouge s’est forgé une image aujourd’hui indélébile. En France d’abord, puis à l’étranger, dans les 22 pays qui l’éditent actuellement.  A l’origine pourtant, André et Edouard Michelin n’imaginaient pas que leur «petit livret», qui était offert aux «automobilistes» jusqu’en 1920, allait devenir un siècle plus tard un best-seller, au même titre qu’une œuvre de littérature .Avec plus de 380 000 exemplaires vendus en moyenne chaque année, le guide Michelin et ses 5000 références font office de référence de la gastronomie française depuis plus de cent ans.

Pour beaucoup, le guide Michelin est l’un des ouvrages les plus populaires de l’Hexagone. Aujourd’hui plus que centenaire, le Guide rouge s’adapte aux évolutions de la gastronomie française. Lorsque le premier guide sort des presses en août 1900, André et Edouard Michelin ont pour seule ambition de donner aux automobilistes un petit manuel de renseignements (l’emploi et la réparation de pneumatiques, le prix de l’essence, une liste de mécaniciens…).

Au début du XXe siècle, la France ne compte que 3000 véhicules en circulation, mais les frères Michelin voient large et éditent le guide à 35000 exemplaires. La première édition contient déjà les bonnes adresses des tables et des hôtels français. Cinq ans plus tard, le guide est complété : aux adresses de mécaniciens, de stations d’essence, de tables et d’hôtels s’ajoutent les noms des médecins et des pharmaciens de chaque ville.

 

Les symboles

 

Pour simplifier la lecture du guide, les auteurs vont transcrire leurs appréciations par des symboles. Cette grille de lecture évolue avec le temps. Entre 1900 et 1918, les symboles indiquent les dépôts d’essence, les mécaniciens et les stocks de pneus Michelin.  Entre 1919 et 1944, de nouveaux symboles représentent les hôtels qui possèdent l’électricité, l’eau chaude, l’eau froide ou les deux.  Entre 1945 et 1988, le guide précise par des pictogrammes si l’hôtel est calme, s’il a ou non l’eau courante et s’il est équipé de postes de télévision.  Enfin, depuis 1989, des symboles indiquent si l’hôtel dispose d’une salle de remise en forme, de l’air conditionné et d’une piscine.

Au fil des années, le guide Michelin se perfectionne et offre à ses lecteurs un nombre croissant d’informations touristiques. Dans le chapitre des distances apparaît une petite étoile qui attire l’attention sur les curiosités à visiter et les monuments jugés intéressants. De ce concept, les auteurs du guide vont faire leur spécialité. A ses débuts, le Michelin sélectionne environ 1 300 hôtels et quasiment le même nombre de tables. Parmi les hôtels choisis, 116 se distinguent encore dans l’édition 2000.

En 1920, le manuel n’est plus offert mais vendu pour la somme de sept francs. L’histoire raconte que les frères Michelin ont découvert dans un garage un établi bancal consolidé par des guides à même le sol… Voyant cela, ils ont décidé de le vendre.

De 1923 à 1925, les légendes des restaurants sont accompagnées d’étoiles, mais elles n’ont pas encore de valeur gastronomique. Elles marquent simplement les catégories de confort et de prix. En 1926, la petite étoile noire est associée au symbole des hôtels avec la définition suivante : «Ce signe indique les hôtels possédant une table renommée.» L’étoile de bonne table est née.

L’apparition des inspecteurs date à peu près de cette époque. Le guide n’est plus écrit grâce aux lettres de recommandations des voyageurs ou des associations d’amateurs de bonne chère, mais bel et bien par des professionnels de la gastronomie.

 

Vidéo : Dans L’Aile ou la Cuisse, Louis de Funès incarne Charles Duchemin, directeur d’un guide gastronomique mondialement connu et s’inspirant du guide Michelin

 

Scéne de l'aile ou la cuisse par Nelsondu55

 

Les inspecteurs

Ce sont les bras armés de l’ouvrage. Leurs visites sont anonymes, le règlement des notes est systématique et on leur prête une impartialité totale. Aujourd’hui, ils sont quatre-vingt-cinq inspecteurs à travailler pour toutes les éditions du guide Michelin. Dix d’entre eux sont affectés aux quatre éditions pour les Etats-Unis, soixante-dix pour l’Europe et les cinq dernières recrues se consacrent à l’édition de Tokyo.

Mais n’est pas inspecteur du Michelin qui veut. Il faut justifier au minimum de dix ans d’expérience dans la restauration ou dans l’hôtellerie pour entrer dans le cercle très fermé des critiques gastronomiques. D’autant que chaque inspecteur effectue entre 400 et 500 repas par an (pour un guide villes) et entre 200 et 300 pour un guide pays.

A la fin de chaque «essai de table», les agents testeurs notent chaque élément du restaurant. Les fameuses étoiles représentent l’assiette et uniquement l’assiette, alors que les autres signes déterminent la qualité du décor, du service, du rapport qualité prix et du confort. Le processus d’attribution des étoiles est collégial, même si c’est le rédacteur en chef du guide qui prend la décision finale.

 

Présentation du guide Michelin Espagne et Portugal en 2011 [CC/Irekia]

 

Les évolutions du guide

Les premières tables trois étoiles sont apparues en France en 1931. A ce niveau d’excellence, le plus ancien chef en activité aujourd’hui est Paul Bocuse, à Collonges-au-Mont-d’Or. A partir des années 1960, les habitudes changent, la voiture se démocratise et l’on découvre les week-ends pour déjeuner ou dîner à l’extérieur. Pour Pascal Rémy, ancien inspecteur du guide Michelin (L’inspecteur se met à table, éd. Equateurs, 2004), «la mission première de tout guide gastronomique reste avant tout de découvrir de nouveaux talents et de mettre le lecteur sur la piste d’adresses inconnues».

 

Les polémiques

Le décès de Bernard Loiseau, propriétaire de la Côte-d’Or à Saulieu, en Bourgogne, les rétrogradations du «Cinq» et du «Taillevent» à Paris, le refus des étoiles au nouveau maître du Buerehiesel en Alsace… sont autant d’épisodes qui laissent croire que les guides gastronomiques sèment la terreur.

La gastronomie française n’est pas seulement une affaire de papilles, elle est aussi, parfois, une histoire d’argent et de notoriété. Pour un restaurant, la présence dans un guide est inespérée, les articles dans la presse sont souvent souhaités et recherchés. Mais par sa volonté de régler les additions, le guide Michelin a toujours voulu se détacher des polémiques. On lui a aussi souvent reproché son conservatisme et son attachement à une cuisine traditionnelle qui ignore les évolutions du monde de la gastronomie. Le Michelin a répondu à ces critiques en lançant le guide Tokyo en 2008.

 

L’ouverture vers l’Asie

Avec 247 étoiles en 2012, Tokyo est la ville la plus étoilée au monde. C’est un record absolu (Paris ne possède que 77 restaurants étoilés). La sélection des inspecteurs comprend 65 % de restaurants de cuisine japonaise et 35 % de cuisine française et d’autres pays. Plus de 90000 exemplaires du guide Tokyo ont été vendus le premier jour de sa sortie.

Depuis plus de cent ans, le guide Michelin a su se forger une image redoutable partout dans le monde. Du premier manuel en 1900 à la dernière édition en date, il s’est construit une réputation de leader et a su acquérir la confiance de ses lecteurs, parfois au prix de certaines critiques. Lorsqu’on sait qu’un exemplaire original du guide de 1900 se vend pour les collectionneurs à 7000 euros pièce… mieux vaut le conserver !

 

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