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Renaud Lavillenie : «Je n’ai pas fait du sport pour me pavaner sur les Champs-Élysées après un sacre»

Renaud Lavillenie compte poursuivre sa carrière encore une ou deux saisons. [Icon Sport]

A l’occasion de la sortie de sa biographie, Renaud Lavillenie s’est confié à CNEWS sur les moments clés de sa carrière, mais aussi sur son avenir, avec les JO de Paris 2024 en ligne de mire.

Le début de la fin ? À l’occasion de la sortie de son livre «Je ne regrette (presque) rien» (Solar éditions), le perchiste français Renaud Lavillenie s’est livré sur sa carrière, son terme qui se rapproche inexorablement, et sur l'image qu'il a pu renvoyer tout au long de ces années.

Le titre de votre livre est «Je ne regrette (presque) rien». A quoi correspond le «presque» du coup ?

Il faut lire pour savoir… Non mais justement, le titre a été un vrai sujet dans la construction du livre. On a beaucoup réfléchi. Au final, c'est pour montrer un petit peu et pour appuyer le fait que je suis là aussi pour dévoiler certaines choses qui n'ont pas été dites, ou qui n'ont peut-être pas été autant mises en avant que ça aurait pu l'être par le passé. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas une personne qui regrette facilement certaines choses. Mais voilà, on est tous conscients que dans une vie, on a toujours des petits moments. On se dit : «Ah, peut-être que».

Est-ce un livre qui veut aussi dire que votre carrière est derrière vous ?

Alors je ne serai peut-être pas aussi direct. Parce que je considère que de toute façon ma carrière n’est pas encore finie, même si elle est très avancée. Mais même si j'ai encore une saison ou deux, c'est toujours ça qu’il reste à écrire. L’objectif du livre est surtout de pouvoir faire comprendre un peu qui je suis, qui j'étais. Pourquoi j'ai eu tel ou tel comportement, pourquoi j'ai pris telle ou telle décision. Ce qui est important, c'est de montrer que chaque personne est différente. Ce n’est pas parce qu'on est un sportif que du coup, on ressemble à tous les autres sportifs. On a chacun nos histoires. Ce que je veux faire ressortir de ce livre, c’est que je n’ai pas choisi la perche par appât du gain. Déjà, j’aurais choisi un autre sport si c’était le cas. Mais j’ai pratiqué et surtout je continue de pratiquer mon sport parce que j'en suis passionné, parce que j'aime ça, parce qu’il fait partie de ma vie.

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Est-ce qu’il y a des moments où tu penses ne pas avoir été assez compris ?

Forcément, quand tu es sportif de très haut niveau et que tu as tout gagné, on ne comprend pas pourquoi tu continues. Mais comme je disais, j'ai commencé à pratiquer ce sport par plaisir, pas passion, parce que j'aimais la discipline et à l'époque, même quand je sautais 2 mètres quand j'étais benjamin ou poussin, je prenais du plaisir. J'ai pris un énorme plaisir, évidemment, quand j'ai sauté 6 mètres et plus. Et ce n’est pas parce que maintenant je vais sauter un peu moins haut que je vais moins prendre de plaisir. Dans le monde du sport, il y en a beaucoup qui, dès qu'ils ne prennent plus de plaisir, arrêtent parce qu'ils ont une notion du plaisir qui est extrêmement liée à la performance, et non pas à la pratique. Et moi c'est clairement l'inverse.

Avant vous, il y avait notamment Jean Galfione, mais vous avez tout de même mis la perche au centre de tout en France. Est-ce que vous pensez ne pas avoir été reconnu à votre juste valeur ?

C'est un sujet qui est très particulier parce que c'est extrêmement subjectif et que, si j'avais mesuré 10 cm de plus, si j'avais eu 15 kilos de muscles en plus, si j'avais eu des cheveux un peu plus blond… En gros, en fonction de certains critères ou parce que si j'avais parlé de telle ou telle manière, j'aurais été mieux placé ou moins bien placé et plus reconnu. On ne peut pas comparer les athlètes des lancers et sauts à ceux qui courent. Ce qu'a fait Usain Bolt en gagnant 3 médailles d'or aux Jeux olympiques, ce n’est pas possible pour nous. Après, je n’ai pas eu à me plaindre, et puis de toute façon je n’ai pas été non plus en recherche de notoriété, c'est à dire que je n'ai pas fait du sport pour me pavaner sur les Champs-Élysées dans un bus. Et ce n'est pas mon truc, ce genre d'événement, je pouvais limite les fuir. Tout ça pour dire que parfois, on met en valeur des athlètes qui ont gagné beaucoup moins de choses, voire qui n’ont jamais rien gagné. Et ça peut lever certaines interrogations mais je pense qu'après il faut accepter cela.

J'ai rendu accessible ce qui était inaccessible

Vous êtes tout de même un modèle pour de nombreux jeunes qui se sont lancés dans la perche en France ou dans le monde…

Oui, alors ça ce n’est pas quantifiable sur le papier. Mais oui, évidemment, il y a des impacts et de toute façon le plus bel exemple que l'on peut avoir, il n’est pas Français mais Suédois (Armand Duplantis, ndlr). Toute son histoire montre que oui, j'ai eu un impact considérable sur la discipline.

Revenons sur ce moment incroyable, lorsque le 15 février 2014 vous battez le record de Sergueï Bubka (datant de 1993), chez lui à Donetsk (Ukraine)…

C’est clairement quelque chose d'exceptionnel. Je dirais que c’était digne d’un film. Jamais je n’aurais cru que ça puisse se passer comme ça. Je me retrouve à être dans le meeting organisé par Bubka, dans sa ville, là où il s'entraîne, là où il a établit le dernier record du monde. Et moi, «petit Français», j'y vais, je le détrône chez lui. C’est incroyable. Et je pense que si j’avais battu le record n'importe où dans le monde, ça n’aurait pas eu la même saveur.

Et même si vous ne possédez plus le record, vous resterez quoiqu’il arrive celui qui a battu Sergueï Bubka…

C’est vrai… J'ai eu la chance de battre celui que tout le monde pensait imbattable. À l'inverse, ce n'a pas été le cas quand Duplantis m’a battu parce que du coup, moi j'ai rendu accessible ce qui n'était plus accessible.

Votre carrière n’est pas encore finie. Les JO de Paris seront votre dernier objectif ?

D’abord, il va falloir que je me qualifie pour les Jeux olympiques parce que je ne le suis pas encore. Il faut que je revienne de mon opération. Mais après les Jeux, j’aimerais pouvoir continuer une ou deux saisons.

Si vous aviez devant vous le petit Renaud Lavillenie, que lui diriez-vous ?

Continue. Evidemment, il y a toujours des petits trucs qu'on peut améliorer mais dans la globalité, j'aurais tort de me dire qu'il faut que je change tout. Trente ans après avoir découvert la perche, j'ai toujours la même passion, j'ai toujours la même envie, j'ai toujours le même plaisir.

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