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Hollande et Cazeneuve, entre duel et alliance pour la présidentielle

François Hollande et Bernard Cazeneuve au sortir de l'Elysée, le 26 avril 2017. [© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP]

L'ancien chef de l'Etat François Hollande et son ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve se retrouveront main dans la main, samedi, à Brive, pour un échange avec les militants socialistes. A l'aube de la présidentielle de 2022, certains au Parti socialiste les imaginent déjà potentiels rivaux. Ou futurs alliés, pour un véritable «renouveau».

A l'initiative de la fédération locale de Corrèze, ils prendront la parole devant les adhérents pour un moment de «convivialité», dans le prolongement de la Foire du Livre qui se tiendra du 8 au 10 novembre. Un événement pas si anecdotique, car à l'heure où le PS, au plus bas dans les sondages et inaudible dans les débats, se cherche un leader en vue de la prochaine course à l'Elysée, c'est en feuilletant les ouvrages respectifs des deux responsables politiques que leurs ambitions, feutrées, se dessinent.

Cazeneuve et le «message» à faire passer à la gauche

Depuis son retour en politique à l'occasion des européennes de mai, Bernard Cazeneuve prend régulièrement la parole dans ses propres rangs, comme en septembre à Avignon, face à des parlementaires, ou dans l'Hérault, devant ses partisans. Dernière saillie en date: dans «A l'épreuve de la violence» (Stock), sorti début octobre, l'ex-«premier flic de France» raconte son expérience à place Beauvau de 2014 à 2016. Il confie notamment avoir éprouvé «la froide sensation du néant» le soir des attentats du 13 novembre 2015.

Si Cazeneuve a d'ores et déjà assuré au Figaro, début octobre, n'avoir «aucune ambition pour 2022», un sénateur PS, cité par Le Parisien, y croit toujours: «Cazeneuve dit bien que c'est à titre personnel qu'il n'a aucune ambition. Pour lui, la priorité c'est la construction d'une ligne politique. Et après nous verrons. Rien n'est donc fermé.»

Ce ne serait pas la première fois qu'un responsable politique tente, à force de propositions, de se placer au-dessus de la mêlée et sur la ligne de départ d'un scrutin phare, sans jamais le dire ouvertement. Comme Cazeneuve aime à le répéter: «On est candidat parce qu'on porte un message», parce qu'on veut «voir la gauche gagner». Et ce message, c'est bel et bien lui qui le porte aujourd'hui.

Hollande pour «redonner un souffle à la Ve République»

Quinze jours après la parution du livre de Cazeneuve, comme pour court-circuiter son ancien ministre, c'est François Hollande qui a sorti un ouvrage surprise, «Répondre à la crise démocratique» (Fayard), dans lequel il propose de refonder les institutions du pays. Là encore, la ficelle n'est pas bien fine. Après son traditionnel livre-bilan («Les Leçons du Pouvoir», Stock) et de multiples sorties médiatiques pour donner son avis sur l'actualité ou tacler son successeur, l'ancien locataire de l'Elysée appelle à «redonner un nouveau souffle», non pas à la gauche seulement, mais «à la Ve République», avec l'enjeu écologique en clé de voûte. Une manière de se placer au-delà des clivages partisans pour mieux revenir au devant de la scène politique.

Au menu, un certain nombre de propositions que seule une réforme constitutionnelle permettrait: mandat présidentiel de 6 ans renouvelable une fois, possibilité de suppression de la fonction de Premier ministre, abolition du 49-3, fin du droit de dissolution, suppression des ordonnances... En bref, un régime présidentialiste à l'américaine avec un exécutif fort et un pouvoir législatif réduit – ce qui lui avait sûrement manqué lors de son quinquennat. Quoi qu'il en soit, cela ressemble à une première ébauche de programme présidentiel. «Je pense qu'il voudra peser dans la prochaine présidentielle, mais sous quelle forme ? Je n'en sais rien», avance même le ténor Jean-Christophe Cambadélis.

Des anciens au service du renouveau ?

Bien qu'anciens collègues, Hollande et Cazeneuve semblent se livrer, depuis quelques semaines, une bataille par média interposé. Ainsi, quand le premier veut réformer les institutions de la Ve République, le second, «très attaché» à elles, les qualifie d'«adaptées». Ou lorsque Cazeneuve explique ne pas faire de la politique «pour [lui]-même», comme un léger tacle à l'intention de l'ancien président.

Les enquêtes d'opinion, qui prédisent déjà un nouveau duel entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, mettent pourtant en doute la réalité d'une quelconque remontada du PS. Selon un récent sondage Ifop-Fiducial, seule une petite poignée de Français estiment que François Hollande (15%) et Bernard Cazeneuve (10%) pourraient «faire mieux» que l'actuel président de la République. De quoi doucher les ambitions élyséennes de chacun.

Mais 2022 reste encore loin pour établir des pronostics crédibles, et un sursaut des socialistes n'est pas impossible. Mais Hollande et Cazeneuve, tous deux déjà passés par la case pouvoir avant d'en être écartés, peuvent-ils vraiment convaincre et apparaître comme les candidats du renouveau ? Rien n'est moins sûr.

Dès lors, un autre scénario est envisageable: une alliance entre Cazeneuve et Hollande, des «anciens», pour faire élire un autre poulain du PS. Par exemple, une outsider comme Christiane Taubira, largement plébiscitée dans son propre camp et maintes fois courtisée par les autres formations de gauche. Fin septembre, invitée sur France Inter, l'ancienne Garde des Sceaux a d'ailleurs admis pouvoir envisager être un recours pour 2022, tout en insistant sur la dimension collective d'une telle démarche. Des mots dignes d'une future candidate de parti, en somme.

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