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Henri IV, le roi qui aimait la France

Mal aimé de son temps, Henri IV a marqué à jamais l'Histoire de France[CC/Jastrow]

Il a succombé aux coups de couteau de Ravaillac, rue de la Ferronnerie, à Paris, il y a plus de quatre cents ans. Les rues de la capitale résonnent encore des cris du peuple : «Le roi est mort !» Aujourd’hui encore, le souvenir d’un monarque amoureux de la vie et de son royaume continue d’être perpétué en France.

 

Ce fut certainement l’un des plus vivants de nos monarques : Henri IV, un destin qui a presque entièrement échappé à l’histoire, kidnappée par la légende que forgent les peuples autour des figures qui ont su les séduire.

Si les historiens contemporains tentent d’atténuer peu à peu le caractère doré de cette légende, il demeure certain que celui qui tomba le 14 mai 1610, il y a plus de quatre cents ans, sous le couteau de Ravaillac, ne doit pas qu’à cette mort brutale et tragique la vivacité de son souvenir.

Cette popularité toujours intacte, il la doit surtout à son existence elle-même. En tant que souverain de Navarre puis roi de France, Henri IV a planté dans le cœur des Français des graines dont les fleurs ne fanent pas.

 

 

Trois guerres de religion

Henri de Navarre possède d’emblée l’attrait de l’exotisme: il vient de la frontière sud du royaume, et l’on colporte toutes sortes de rumeurs sur les manières dont son grand-père maternel, souverain des lieux, salua sa naissance: il lui aurait frotté les lèvres avec de l’ail et lui aurait offert quelques gouttes de jurançon pour juger de sa future vigueur. Un test positif, selon l’historiographie officielle.

Mais, s’il hérite de la Navarre par sa mère, Jeanne d’Albret, Henri est surtout le fils du premier prince de sang, Antoine de Bourbon, par qui il descend de Louis IX. Un grand chef de guerre, qui hésitera longtemps entre huguenots et papistes, avant de choisir ce dernier camp, en réaction au rigorisme calviniste de sa femme. Il n’empêche que le petit Henri subira l’éducation maternelle à Pau et dans le Béarn, avant d’être envoyé à la cour de Paris où, entre ses cousins princiers, il sera constamment surveillé pour ne point s’écarter de la religion prétendument réformée.

Sous les règnes de Charles IX et d’Henri III, il assistera à trois guerres de Religion successives, d’abord en tant que spectateur, puis comme l’un des chefs du parti protestant, un peu malgré lui. Devenu par son mariage malheureux avec Marguerite de Valois – la reine Margot – le beau-frère des derniers Valois, il changera pas moins de six fois d’obédience, fustigé comme traître, laps et relaps des deux côtés.

Mais entre deux batailles et quelques intrigues, le jeune Henri mène grand train : sa cour, où Montaigne daignera passer, est la plus hardie et en - jouée du royaume.

Nul doute que le prince eût désiré de continuer à vivre ainsi, entre guerre, chasse, belles femmes et bons vins. Mais, enfin, son tour arrive : c’est lui que la loi salique désigne comme le successeur au trône de France après la mort d’Henri III qui marque l’extinction définitive de la branche des Valois. La place est redoutable, mais enviable.

Pour cela, il lui faut sacrifier une dernière fois au changement de confession, et le prétendant pensa sans doute très fort, à défaut de le prononcer vraiment, que Paris valait bien une messe. Paris, qu’il dut assiéger, comme toutes les places du Nord, pour l’arracher une bonne fois pour toutes à la Ligue catholique. Paris dont il fera son terrain de jeu idéal, sa capitale, pour réformer une nation pantelante après presque cinquante ans de guerre civile.

Les Ligueurs, derrière la puissante famille de Guise, ne sont pas prêts à lâcher quoi que ce soit aux protestants. Les Condé, chefs du parti protestant, se prennent à détester ce nouveau roi qui les a abandonnés. Cependant, le ciel saura sourire à Henri IV : la mort d’Henri de Condé, suivie de l’assassinat du duc de Guise, lui ouvrent enfin les portes d’une véritable royauté. Dix années de guerre seront encore nécessaires pour imposer l’édit de Nantes qui, concédant des places de sûreté aux protestants, mettra fin aux plus sanglantes guerres civiles que la France ait jamais connues.

Mais le roi Henri gêne beaucoup d’ambitions, et ce, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur du royaume : peut-être est-ce dans ce contexte qu’opérera Ravaillac, cet illuminé ultra-catholique ? Fut-il téléguidé par l’Espagne, ou bien par l’archiduc d’Autriche ? La question reste encore en suspens.

 

 

On l’appelait le Vert-Galant …

Surestime-t-on la verdeur d’Henri IV ? C’est possible. Si l’on a bien sûr du mal à évaluer la qualité de ses ardeurs intimes, et s’il faut en rabattre sur la réputation de priapisme que la légende lui a forgée, on doit cependant constater que le commerce avec le sexe n’a jamais effrayé le monarque, mais, au contraire, l’a stimulé tout au long de sa vie, comme plus tard son petit-fils Louis XIV.

N’éprouvant que peu d’intérêt pour ses épouses légitimes, Henri de Navarre rendit leur vie navrante de solitude. Il préférait courir derrière ses maîtresses, auxquelles il était plutôt fidèle, d’ailleurs. C’est ce que confirment ses Lettres d’amour, publiées chez deux éditeurs, Tallandier et France-Empire.

Il y eut la célèbre Gabrielle d’Estrées, dont le monde entier connaît la rondeur du sein à défaut de retenir le nom. Femme rouée qu’il pleura à sa mort, mais remplaça tout de même lestement par Henriette d’Entragues, que supplanta ensuite la très jeune Charlotte de Montmorency, princesse de Condé.

 

Gabrielle d’Estrées fut l'une des maîtresses d'Henri IV [CC/GOC53]

 

La légende du bon roi Henri

Avant d’être aimé du peuple, Henri IV fut l’un des rois les plus détestés, notamment par les catholiques qui brûlaient son effigie et avaient associé son nom au diable et à l’Antéchrist.

C’est son assassinat par Ravaillac qui transforma le roi en martyr. Il faut attendre le XVIIIe siècle pour voir se développée la légende du bon roi Henri, dégustant des « poules au pot » le dimanche chez les paysans. Cette image d’Épinal fut entretenue par toute une littérature, dont La Henriade, un poème épique écrit par Voltaire en 1728.

 

Paris « ville neuve »

Si sa statue trône au milieu du Pont-Neuf, à Paris, ce n’est pas un hasard : Henri IV illustre la transition entre Renaissance et époque moderne. Il voulut en conséquence faire de Paris une ville neuve et lui donna la place Dauphine et la place des Vosges. Paris ne le lui rendra pas, puisque c’est dans ses rues qu’il mourra, assassiné par François Ravaillac, un catholique fanatique, le 14 mai 1610.

Henri IV aura pourtant marqué la France comme nul autre. Ce roi qui aimait la France comme une maîtresse conquise de haute lutte la couvrit de bijoux, comme la manufacture des Gobelins, la Grande Galerie du Louvre, ou le Pont-Neuf. Il aima la France, l’agrandit, et, surtout, lui conféra la paix civile pour presque deux cents ans.

 

Chronologie :

13 décembre 1553 : Henri de Bourbon, qui deviendra Henri de Navarre, puis Henri IV, naît à Pau.

2 août 1589 : Henri III meurt, Henri de Navarre est proclamé roi de France.

14 mars 1590 : Tentant de prendre Paris, il bat les Ligueurs et les Espagnols à la bataille d’Ivry où il aura ce célèbre mot : «Ralliez-vous à mon panache blanc!»

27 février 1594 : Henri IV est enfin sacré roi de France en la cathédrale de Chartres, et non à Reims, toujours aux mains des Ligueurs.

30 avril 1598 : Il signe l’édit de Nantes qui reconnaît la liberté de culte aux protestants.

14 mai 1610 Il meurt sous les coups de couteau de Ravaillac, dans son carrosse, rue de la Ferronnerie, à Paris.

 

(ARCHIVE)

 

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