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50 ans de la Révolution des œillets au Portugal : quel est cet événement qui a mis fin à l’une des plus grandes dictatures d’Europe de l’Ouest ?

Ce jeudi 25 avril marque les 50 ans de la Révolution des oeillets, survenue le 25 avril 1974 au Portugal. [PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP]

Il y a cinquante ans jour pour jour, le 25 avril 1974, le Portugal retrouvait sa liberté après avoir été pendant près de quarante-deux ans sous la coupe d’un régime totalitaire. Une date clé, marquée par la Révolution des œillets, un coup d’Etat mené notamment par le Mouvement des Forces Armées.

Un événement historique. Il y a cinquante ans, le 25 avril 1974, la Révolution des œillets mettait fin à l’«État Nouveau», une dictature instaurée par António de Oliveira Salazar en 1933. Mais comment s’est déroulé ce coup d’Etat ?

En 1974, le Portugal se trouvait dans un contexte politique tendu. Le pays subissait déjà depuis plus de quarante ans le régime totalitaire d’António de Oliveira Salazar. Le Portugal était également au cœur de plusieurs guerres coloniales, l’Angola, le Mozambique, le Cap-Vert, Sao-Tomé-et-Principe et la Guinée-Bissau exigeant leur indépendance.

Le début de la fin d'une histoire écrite en 1933, lorsqu'António de Oliveira Salazar, alors Premier ministre sous la «Dictature nationale» instaure l’«Estado Novo», ou État Nouveau, un régime dictatorial et corporatiste, qui sera l'un des plus longs régimes autoritaires au 20e siècle en Europe.

Les guerres coloniales au coeur de la grogne

De nature conservatrice, et attachée au catholicisme portugais, cette dictature souhaitait également préserver son empire colonial. Une volonté qui sera finalement au cœur de la Révolution des œillets.

Lassés des guerres menées depuis 1961 dans ses colonies africaines et des pertes humaines provoquées par ces dernières, de nombreux militaires songeaient à un coup d’Etat pour renverser le régime, alors dirigé par Marcelo Caetano - António de Oliveira Salazar étant dans l’incapacité de gouverner à la suite d’un accident en 1968 – et instaurer une démocratie.

Une initiative soutenue discrètement par la population portugaise, en manque de certaines libertés, touchée par une des pauvretés les plus fortes d’Europe et en désaccord avec le conservatisme moral de ce gouvernement.

Une première tentative de coup d’état en mars 1974

Ainsi, cette contestation est, dans un premier temps, venue du haut commandement. En effet, António de Spínola, alors gouverneur et commandant des Forces armées en Guinée, a été le premier à avoir tenté de convaincre Marcelo Caetano de trouver une solution viable afin de clore les guerres coloniales, en 1972. Sans résultats, Marcelo Caetano préférant une défaite plutôt qu’une quelconque négociation.

Au même moment, plusieurs officiers subalternes vont commencer à tourner le dos au régime. Ces derniers fondent alors le Mouvement des Forces Armées (MFA). Plusieurs réunions vont ainsi en découler et la piste du coup d’Etat y sera notamment évoquée mais sans grande conviction pour le moment.

Le MFA souhaite d’abord trouver une solution légaliste et met en place le «programme des trois D» : démocratisation, décolonisation et développement économique.

À partir de 1973, António de Spínola rencontre à plusieurs reprises le MFA et c’est ainsi que l’idée d’un putsch se met finalement petit à petit en place. Le 16 mars 1974, alors que Spínola quitte son poste, plusieurs officiers décident de passer à l’action. Une première tentative qui échouera, plus de 200 militaires sont arrêtés.

Une révolution presque sans effusion de sang

Plus d’un mois plus tard, le 25 avril 1974, le MFA est prêt à agir à son tour, notamment grâce à l'impulsion et l'organisation d'Otelo de Carvalho, un militaire.

À 00h20, un premier appel est diffusé à la radio portugaise par le biais de la chanson «Grândola, Vila Morena» de Zeca Afonso, alors interdite par le gouvernement. Cette diffusion lance ainsi le départ des militaires du MFA vers les différents points stratégiques du pays.

Tout au long de la nuit et de la journée, plusieurs autres appels seront diffusés et divers communiqués seront lus à l’antenne afin de tenir informée la population portugaise.

Les Portugais sont d’ailleurs appelés à rester confinés chez eux. Mais plusieurs citoyens prendront finalement part aux défilés des militaires dans les rues, notamment au marché aux fleurs de Lisbonne.

C’est ici que les militaires vont croiser la route de Celeste Caeiro, une fleuriste qui leur distribue plusieurs oeillets. Certains d’entre eux mettent alors ces fleurs dans le canon de leur fusil, ce qui donnera son nom à cette révolution.

En quelques heures seulement, le gouvernement s’effondre. Lisbonne et Porto sont aux mains du MFA. Marcelo Caetano accepte de se rendre, à condition de remettre lui-même le pouvoir à António de Spínola.

Le 25 avril 1974 s’est déroulé sans effusion de sang, ou presque. En effet, seule la PIDE, une police politique, a opposé une résistance armée. En tirant dans la foule, elle tue quatre personnes, uniques victimes de cette journée historique.

L’après révolution

Une fois le pouvoir remis à la Junte du Salut National (JSN), composée donc d’António de Spínola et de plusieurs autres commandants ayant participé à la Révolution des oeillets, ces derniers se présentent à la population et annoncent l’organisation d’élections libres, sur la base du «programme des trois D».

Néanmoins, avec le temps, plusieurs désaccords vont naître entre ces protagonistes, entrainant le Portugal dans une période très instable d’une durée de deux ans, popularisée sous le nom de Processus révolutionnaire en cours (PREC).

La situation sera finalement normalisée lors de l'adoption de l'actuelle constitution portugaise, le 2 avril 1976. L'élection de Ramalho Eanes à la tête du gouvernement sera également un élément important de la stabilisation du Portugal.

Quant aux colonies, elles obtiennent tour à tour leur indépendance, à la suite d'un vote organisé le 10 juillet 1974, reconnaissant leur droit à l'autodétermination. Ainsi, le 10 décembre 1974, la Guinée-Bissau déclare son indépendance, elle sera suivie par le Mozambique (25 juin 1975), le Cap-Vert (5 juillet 1975), Sao Tomé-et-Principe (12 juillet 1975) et enfin l'Angola (11 novembre 1975).

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