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Les ZSP suscitent le débat avant les municipales

Des habitants de Saint-Ouen dénoncent le 17 décembre 2013 les trafics de drogue dans leur ville classée zones de sécurité prioritaire (ZSP) [Joel Saget / AFP/Archives] Des habitants de Saint-Ouen dénoncent le 17 décembre 2013 les trafics de drogue dans leur ville classée zones de sécurité prioritaire (ZSP) [Joel Saget / AFP/Archives]

Les cités de Saint-Ouen minées par la drogue, une commune rurale marquée par des bagarres entre bandes et le centre-ville de Perpignan: ces zones de sécurité prioritaire (ZSP), mesure phare de François Hollande contre la délinquance, suscitent toujours le débat avant les municipales.

"J'ai les foies que ma femme ne prenne une balle perdue." Pour rentrer chez lui, Benn Pepito doit slalomer entre les trafiquants qui ont installé leur "point de deal" au bas de son immeuble de Saint-Ouen, haut lieu de la vente de cannabis en Seine-Saint-Denis, au nord de Paris.

Mi-décembre, cet agent de sécurité quadragénaire a manifesté avec quelque 300 habitants déçus de ne pas avoir vu leur quotidien s'améliorer 18 mois après la création d'une des premières ZSP de France, dispositif censé concentrer les moyens de l'Etat contre la délinquance.

Malgré les opérations de police -- plus de 230 kg de résine de cannabis et d'herbe saisis, 185.000 euros en liquide confisqués --, le trafic n'a pas disparu. Tous les jours, "quand les policiers partent, les jeunes s'emplissent les poches", se plaint Daniel, depuis cinq ans dans cette banlieue populaire.

La préfecture se félicite d'avoir pu "déstabiliser certains réseaux". Mais des dealers ont investi de nouveaux immeubles et "une guerre entre bandes" armées a éclaté pour s'emparer des points de vente vacants, constate la maire Jacqueline Rouillon.

La maire de Saint-Ouen Jacqueline Rouillon le 17 décembre 2013 lors d'une manifestation de protestation contre les trafics de drogue dans sa ville classée zones de sécurité prioritaire (ZSP) [Joel Saget / AFP/Archives]
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La maire de Saint-Ouen Jacqueline Rouillon le 17 décembre 2013 lors d'une manifestation de protestation contre les trafics de drogue dans sa ville classée zones de sécurité prioritaire (ZSP)
 

Cette élue du Front de gauche, qui encourage manifestations et rassemblements dans les halls pour que les habitants se "réapproprient" leurs quartiers face aux dealers, a réclamé au ministre de l'Intérieur Manuel Valls plus de moyens et obtenu l'extension de la ZSP.

"Il y a eu une ghettoïsation et une dégradation du logement social" qui a nourri le trafic, et contre lesquelles la ZSP ne suffit pas, déplore son concurrent socialiste Karim Bouamrane.

A Perpignan (Pyrénées-Orientales), c'est dans le coeur historique de la ville que la ZSP est installée. Trois quartiers pittoresques, entrelacs de ruelles qui jouxtent le centre commerçant. En 2005, des affrontements communautaires y avaient éclaté.

 

Toujours des étincelles

 

On continue d'y enregistrer une "délinquance de la misère": petits trafics de drogue, cambriolages et agressions pour se payer sa barrette de cannabis ou son gramme de cocaïne, explique une source policière. Parce qu'elle a été mise en place à effectifs constants, la ZSP de Perpignan a aussi ponctionné de nombreux policiers au détriment de quartiers périphériques, regrettent deux responsables policiers syndiqués.

"Tous les moyens sont +priorisés+ sur le centre-ville alors que le bassin de la délinquance se situe de plus en plus à la périphérie", note Christophe Guédon, secrétaire régional UNSA-Police pour le Languedoc-Roussillon.

Climat bien plus serein à Fosses, au milieu des champs du Val-d'Oise. Dans cette commune de 9.500 habitants et à Louvres, non loin de là, la ZSP a été créée pour épauler les gendarmes après des affrontements entre bandes, venues souvent de villes voisines. De mars à octobre, la délinquance, qui reste ténue, a baissé de 9%, selon la préfecture.

Au coeur du quartier populaire du Plateau, une dernière tour HLM grisâtre est en train de tomber, grignotée par un engin de chantier. "On n'a pas plus de problèmes qu'ailleurs, juste quelques cambriolages", raconte le boucher Hassan El-Battar, président de l'association des commerçants.

Pascal Aubignat, qui a vu grandir des dizaines de jeunes en 22 ans à la tête du club de foot, relativise aussi. "Il y a une vingtaine d'années, oui, il y avait pas mal de bagarres, finir un match c'était difficile." Aujourd'hui, dit-il, "tout va mieux même s'il y a toujours des étincelles. Si un gars de Fosses sort avec une fille de Goussainville, ça peut partir..."

Selon lui, la ZSP "n'a rien changé": "Le problème, c'est que les jeunes ne sont pas aidés, ça manque de pognon pour les encadrer."

Alors que le maire Front de gauche, Pierre Barros, défend ce dispositif qui permet de faire "mieux travailler les services de l'Etat ensemble" et de "ramener du pognon" dans une ville qui rénove plusieurs quartiers HLM, son adversaire UMP Frédéric Deschamps ne veut plus entendre parler de la ZSP. "C'est pas glorieux, ça catalogue Fosses comme une commune délinquante", regrette-t-il.

 

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