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Municipales : des jeunes se lancent

Geoffrey Carvalhinho le 27 novembre 2013 à Pantin [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives] Geoffrey Carvalhinho le 27 novembre 2013 à Pantin [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]

"Je n'y vais pas pour un tour de chauffe". A 23 ans, Geoffrey Carvalhinho, candidat UMP à la mairie de Pantin, mise impeccable, s'est lancé dans la campagne municipale, avec derrière lui déjà huit ans d'expérience et la foi du charbonnier.

Si les moins de trente ans sont rarement en haut de l'affiche, parmi eux certains ont attrapé "le virus".

Au milieu du marasme et du discrédit visant la classe politique française -- un récent sondage CSA établissait à 75% les Français ayant une image négative des partis -- certains jeunes, souvent engagés et actifs depuis leur adolescence, y croient.

"Il y a un climat délétère, je le vois quand je fais du porte-à-porte", reconnaît Florent Lecoultre, 24 ans, candidat socialiste à la mairie de Nouzonville dans les Ardennes (6.500 habitants), dans une zone qu'il décrit comme "désindustrialisée". Du coup, explique cet ancien président du syndicat lycéen UNL, engagé depuis ses 16 ans, "je ne fais que des promesses que je peux tenir".

A Nanterre (Hauts-de-Seine), Camille Bedin, candidate UMP dans ce fief communiste, dresse le même constat. "Nous jeunes candidats, on subit la dérive de la politique depuis trente ans, le plus dur c'est de se faire taxer de +vous êtes tous pareils!+ alors qu'on n'a pas commencé", explique à l'AFP cette secrétaire générale adjointe de l'UMP.

Malgré des parents plutôt à gauche, elle s'est engagée en 2004 lorsque Nicolas Sarkozy a pris les rennes de l'UMP. Aussi passionnée qu'elle soit, cette "jeune maman qui travaille" n'a pas envie "de dépendre de la politique" et d'en être salariée. Elle plaide pour l'arrivée "de nouvelles têtes".

La sociologue Anne Muxel, auteur de "Avoir 20 ans en politique", explique que le pourcentage de jeunes encartés est le même depuis les années 70. Il est très faible, oscillant entre 1 et 2% . "Il ne faut pas reconstruire trop le passé et les vertus d'un activisme plus important notamment dans les années 60 et 70", explique-t-elle.

"Ce qui a changé, c'est l'attractivité des partis (et des syndicats) qui a terriblement chuté" ces trente dernières années, ajoute-t-elle. Il y aussi, selon elle, "l'idée que la démocratie directe est plus efficace" avec des actions ponctuelles "largement médiatisées".

Pour Geoffrey Carvalhinho, "il faut redonner son blason d'or à la politique". Ce jeune homme à l'air sérieux raconte comment il a eu le déclic en 2005. Adolescent à La Courneuve, un ami de son petit frère a été tué d'une balle perdue. Il a alors vu débarquer le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, "venu avec des solutions".

Envie de "jouer en équipe première"

Lui à qui ses copains disaient: "T'es fils d'ouvrier, t'habites la Seine-Saint-Denis, tu n'arriveras pas à faire de la politique" est maintenant tête de liste à Pantin. Il a mouillé la chemise, aidé pour chaque campagne, toujours en Seine-Saint-Denis. "Il faut rester sur place, regardez Jean-Christophe Lagarde (maire UDI), il s'est investi à Drancy pendant 15 ans et il a gagné", lance ce conseiller bancaire.

Justement, pas toujours facile de s'implanter. "Les jeunes sont mobiles, ils ont du mal à avoir une implantation locale", explique Antoine Carette, 26 ans, président des jeunes démocrates. Il a lui-même pas mal bougé au cours de ses études d'ingénieur qu'il vient d'achever.

Et puis, "à 24 ans, généralement on considère que vous devez attendre votre tour, en politique on est jeune à 40 ans!" , plaisante Florent Lecoultre. Avec son expérience de syndicaliste lycéen, il estime avoir "un peu de bouteille". Il a fait "son lot de petites combinaisons" pour arriver "là où il en est" mais "rien d'immoral". Pour lui la jeunesse est loin d'être handicap. "En campagne, les gens qui me disent +vous êtes trop jeunes+ c'est qu'ils ne veulent pas voter pour moi pour une autre raison", dit-il.

Aurélien Sebton, conseiller municipal à Talence, 28 ans, tout juste élu président des jeunes UDI après avoir été au MoDem, se dit "réaliste" sur la dureté du monde politique. Il fait partie de la génération du 21 avril 2002. Engagé après la qualification de Jean-Marie Le Pen au deuxième tour de la présidentielle, il ne cache pas son envie de "jouer en équipe première".

De son côté, le Front National, qui cherche à s'implanter au niveau local à l'occasion des municipales, fait la part belle aux jeunes: près de 14% de candidats de moins de 30 ans.

A 23 ans, Pierre Ducarne, constitue actuellement une liste du Rassemblement Bleu Marine (RBM), à Nancy. "Une terre de mission", dit-il à l'AFP. Après Sarkozy, et République Solidaire de Dominique de Villepin , il a fait le choix de RBM.

Lui aussi est tombé dedans quand il était petit: "Je regardais Public Sénat et les débats parlementaires en boucle", raconte-t-il. Et quand on lui parle d'un éventuel opportunisme des jeunes se tournant vers le FN, il répond, piqué: "C'est la chose la plus énervante à entendre". Parce que s'afficher FN peut rapporter "aussi des ennuis".

"Le Front National joue la carte du rajeunissement, on a beaucoup de retard là-dessus, de façon extrêmement démagogique, il attire des jeunes", explique Mme Muxel.

Tous ces jeunes louent en tout cas "le terrain", comme éloigné des vicissitudes de la politique nationale, loin du microcosme. Comme Laurianne Deniaud, ancienne présidente des MJS (jeunes socialistes), qui a fricoté avec la politique parisienne. Elle a grandi à Saint-Nazaire, a fait des colos Léo Lagrange, et se présente aux municipales "pour faire du terrain" après un passage au cabinet ministériel de François Lamy.

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