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Mobilisation pour préserver le budget de la défense

Des soldats de l'armée française patrouillent au Mali. Des soldats de l'armée française patrouillent au Mali.[AFP]

A l'heure des derniers arbitrages, politiques et militaires se mobilisent pour préserver le budget de la défense des coupes drastiques envisagées par Bercy pour réduire les dépenses de l'Etat, qui ruineraient selon eux l'outil militaire de la France.

Un nouveau Conseil de défense, réunissant les ministres concernés autour du chef de l'Etat, doit se tenir "courant avril" sur le sujet, selon une source proche du dossier. Le président François Hollande tranchera ensuite entre les différentes hypothèses, avant la remise attendue "fin avril" du Livre blanc qui fixera les nouvelles priorités stratégiques de la France.

L'exercice consiste donc à mettre les ambitions de la France, pour sa propre défense et sur la scène internationale, en conformité avec ses capacités budgétaires.

D'un côté, le scénario de Bercy envisage, selon des sources concordantes, de ramener l'effort de défense de 1,56% du PIB en 2013 à 1,18% en 2025. Loin du seuil de 2% en dessous duquel un pays ne peut, selon les normes de l'Otan, assurer convenablement sa défense.

Le budget passerait dans cette hypothèse de 31,5 milliards d'euros en 2013 à environ 28 milliards par an. Des dizaines de milliers d'emplois seraient à nouveau supprimés, des programmes d'équipements annulés, et la France ne serait plus en mesure de conduire seule une opération comme celle du Mali.

L'autre scénario, défendu par Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, envisage le maintien d'un effort budgétaire significatif tout en participant à la maîtrise des finances publiques. Dans cette hypothèse, la défense limiterait la casse, réduirait ou repousserait des programmes (Rafale, Tigre, avion de transport A400M...), en attendant un hypothétique rebond de la croissance.

Les arbitrages peuvent, comme c'est régulièrement le cas, aboutir à un compromis, autour de 30 milliards d'euros de crédits annuels, quitte à prendre des demi-mesures.

"L'équation est délicate entre la nécessité d'assurer la souveraineté de notre pays par la maîtrise de la dette - car quand un pays est à la merci de ses créanciers il perd sa souveraineté - et la nécessité de garder une capacité sécuritaire significative", a résumé jeudi Jean-Yves Le Drian devant le Sénat : "La souveraineté passe aussi par un effort de défense important. C'est le sujet qui est sur la table".

L'inquiétude est forte dans les armées, soumises depuis 2008 à d'importantes restructurations. "Je crois que les militaires n'ont pas conscience de ce qui va leur tomber dessus", confie sans illusion un officier supérieur, qui souligne l'absence de marges de manoeuvre du gouvernement. D'autres gradés dénoncent dans la presse les "conséquences catastrophiques" d'une nouvelle baisse des crédits.

Dans son bras de fer avec Bercy, le ministre de la Défense est soutenu à droite comme à gauche. C'est même quasiment l'union sacrée pour refuser "le déclassement de la France".

Après les sénateurs des deux bords, des députés socialistes et UMP ont mis en garde contre "des décisions irréversibles" pour la défense nationale. "Le scénario de Bercy vise à tuer le ministère de la Défense", s'alarme la présidente PS de la Commission de la Défense, Patricia Adam, dans une interview au Monde de mardi.

Et les industriels de défense ont sonné le tocsin pour préserver une industrie qui emploie directement ou indirectement 165.000 personnes. Bercy s'agace d'ailleurs de cet activisme perçu comme du lobbying.

La Loi de programmation militaire (LPM) issue du Livre blanc fixera à l'automne les dépenses de défense de la France jusqu'aux années 2020.

Des parlementaires avancent deux solutions pour limiter les dégâts. L'une consisterait à sortir les dépenses militaires du calcul des déficits publics au niveau européen, les fameux 3% du PIB exigés pour les pays de l'UE, la France participant en première ligne à la sécurité collective. D'autres suggèrent de vendre les participations de l'Etat dans les groupes industriels de défense pour dégager des recettes exceptionnelles.

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