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«Massacre de Shakahola» : le pasteur d'une secte inculpé pour le meurtre de 429 fidèles

Les accusés doivent comparaître ce jeudi 25 janvier pour être potentiellement poursuivis pour des crimes sur des enfants. [AFP]

Le pasteur Paul Nthenge Mackenzie, déjà poursuivi pour «terrorisme» au Kenya, a été inculpé ce mardi 23 janvier pour «homicide involontaire» à la suite du décès de 429 fidèles de sa secte évangélique, à qui il prêchait le jeûne jusqu'à la mort.

Une tragédie majeure dans l'histoire du Kenya. Le pasteur Paul Nthenge Mackenzie, déjà poursuivi pour «terrorisme», a été inculpé pour «homicide involontaire», ce mardi 23 janvier, après la découverte des corps de 429 adeptes de sa secte au Kenya, dans le cadre de l’affaire baptisée «le massacre de la forêt de Shakahola».

Chauffeur de taxi avant de se proclamer pasteur, Paul Nthenge Mackenzie a fondé l'Église Internationale de Bonne Nouvelle (Good News International Church) dans les années 90, après avoir prétendument reçu l'appel de Dieu. Son mouvement évangéliste chrétien a rapidement attiré 3.000 fidèles à travers le pays. Des centaines de personnes ont quitté leurs foyers pour s'installer avec leur famille dans la forêt de Shakahola, sur un terrain occupé par l'église dans une zone isolée. Quelques mois après le début de la pandémie de Covid-19, il a radicalisé ses théories sur l'apocalypse en assurant que la fin du monde était imminente et que son sanctuaire en serait préservé.

Un jeûne fatal 

En mars 2023, Paul Nthenge Mackenzie a été arrêté et inculpé après le décès de deux enfants retrouvés sur sa propriété, mais il a été remis en liberté sous caution. Les autorités ont finalement découvert le charnier deux mois plus tard, à la suite de signalements. À mesure des fouilles, la forêt de Shakahola s’est transformée en fosse commune. Le nombre de cadavres trouvés n'a cessé d'augmenter chaque semaine, aboutissant à un total de 429 corps, étalés sur plusieurs années.

Les autopsies ont révélé que la majorité des victimes sont mortes de faim, probablement après avoir suivi ses prêches, qui prônaient le jeûne jusqu'à la mort afin de «rencontrer Jésus» avant la prétendue fin du monde prévue pour août 2023. Quelques personnes, y compris des enfants, ont été étranglées, battues ou étouffées.

La secte face à la justice

Placé en détention depuis le 14 avril 2023, le tribunal de Mombasa a inculpé le pasteur pour «facilitation de la commission d'un acte terroriste», «possession d'un article en lien avec une infraction à la loi sur la prévention du terrorisme», «participation à une activité criminelle organisée» et «radicalisation» le 18 janvier dernier.

La veille, le bureau du procureur de la ville de Malindi a demandé un report de 15 jours afin d’effectuer des expertises psychiatriques sur Paul Nthenge Mackenzie et 30 coaccusés, avant de se pencher sur les accusations d'«assassinat». Parmi eux, 16 personnes sont accusées d'avoir appartenu à un groupe «d'hommes de main», chargé par le pasteur de s'assurer qu'aucun adepte ne rompt le jeûne ou ne s'échappe. L'audience est fixée au 6 février.

Le gourou et 94 personnes, dont son épouse, ont plaidé «non coupable» après avoir entendu les 238 chefs d’«homicide involontaire» retenus contre eux, ce mardi 23 janvier, lors de leur comparution devant un tribunal de la ville de Mombasa, neuf mois après la découverte des premiers corps dans la forêt de Shakahola. Les accusés doivent comparaître ce jeudi 25 janvier pour être potentiellement poursuivis pour des crimes sur des enfants, notamment «soumission d'un enfant à la torture», «cruauté envers un enfant» et «violation du droit à l'éducation d'un enfant».

Un scandale d’État

La divulgation de ce scandale a provoqué de vives critiques envers les autorités kényanes. Un rapport publié en octobre par une commission sénatoriale a souligné les «défaillances» de la justice et de la police pour ne pas avoir empêché les méfaits du pasteur, malgré son arrestation en 2017 pour quatre chefs d'accusation liés à la radicalisation de sa paroisse, puis à nouveau en 2019, alors que ses prêches devenaient de plus en plus radicaux.

Plusieurs tentatives de réglementation concernant les organisations religieuses dans le pays se sont heurtées à une vive opposition, au nom notamment de la liberté de cultes. Selon l’AFP, le gouvernement a annoncé son intention de faire de la forêt de Shakahola un «lieu de mémoire afin que les Kényans et le monde n’oublient pas ce qui s’est passé».

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