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«Plaider, c'est bander ; convaincre, c'est jouir» : les phrases cultes de Robert Badinter

Avec son métier d’avocat, il a accordé beaucoup d’importance à la plaidoirie. [JOEL SAGET / AFP]

Dans la nuit de jeudi à vendredi, Robert Badinter, ancien garde des Sceaux, est décédé à l’âge de 95 ans. Combattant de la peine de mort en 1981, il avait marqué les Français par son talent d’éloquence.

Un homme de parole. Robert Badinter, l’ancien ministre de la Justice de François Mitterrand (1981-1986), est décédé dans la nuit de jeudi à vendredi à l’âge de 95 ans. Si l’ancien président du Conseil constitutionnel était connu pour avoir porté l’abolition de la peine de mort en France, avec la loi du 9 octobre 1981, il a aussi marqué l’Hexagone par ses phrases cultes. Avec son métier d’avocat, notamment comme collaborateur d’Henry Torrès, il a accordé beaucoup d’importance à la plaidoirie.

Une phrase viendra marquer cette passion pour la plaidoirie. Dans son livre L’Exécution, paru en 1973 et qui relate le procès de Claude Buffet et Roger Bontems, l’ancien garde des Sceaux avait écrit : «Plaider, c’est bander. Convaincre, c’est jouir». En septembre 2020, sur LCI, Robert Badinter explique avoir mis cette phrase dans la bouche de son maître Henry Torrès.

Mais il avait reconnu que cette affirmation était vraie «dans la mesure où il y a quelque chose de sensuel dans la conviction qu’on essaie de faire partager à autrui». Dans ce procès, Robert Badinter, alors avocat de Roger Bontems, avait apporté une preuve matérielle disculpant son client du meurtre dont il était jugé. Cependant, si le jury avait finalement reconnu que Claude Buffet était bien l’assassin, aucune circonstance atténuante n’a été accordée aux deux accusés, qui ont été finalement condamnés à la peine de mort. Un procès qui mènera donc l’ancien ministre de la Justice à se battre contre la peine de mort.

En septembre 1981, un mois avant sa loi contre la peine capitale, Robert Badinter s’était exprimé sur cette condamnation dans le Journal Officiel de la République Française. «Utiliser contre les terroristes la peine de mort, c’est, pour une démocratie, faire siennes les valeurs de ces derniers», avait-il affirmé.

Il est temps que la France reconnaisse tout ce qu'elle doit à ses homosexuels.

Et ce talent d'éloquence, Robert Badinter l'a mis au service de ses différents combats. L’ancien ministre de la Justice ne s’est pas simplement attaqué à la peine de mort dans sa carrière de politique. En 1982, avec la députée Gisèle Halimi, il avait porté la loi qui abolit les discriminations homophobes dans le droit français. A l’Assemblée nationale, Robert Badinter avait pris la défense des personnes homosexuelles. «Il est temps que la France reconnaisse tout ce qu’elle doit à ses homosexuels», avait-il lancé.

Taisez-vous ou quittez à l'instant ce lieu de recueillement !

Robert Badinter savait aussi exprimer sa colère. Le 16 juillet 1992, en pleine cérémonie du 50e anniversaire de la rafle du Vél’ d’Hiv, François Mitterrand se fait huer par des membres de la communauté juive. «Pris de fureur», l’ancien président du Conseil constitutionnel improvise alors un discours marquant. «Vous m’avez fait honte ! Il y a des moments où il est dit dans la Parole : ‘les morts vous écoutent’. Je ne demande que le silence que les morts appellent. Taisez-vous ou quittez à l’instant ce lieu de recueillement ! Vous déshonorez la cause que vous croyez servir», avait-il fustigé.

Après l'annonce de sa mort, Emmanuel Macron décrit Robert Badinter comme «un homme qui ne cessa jamais de plaider pour les Lumières» et voit en lui une «figure du siècle».

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