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Projet de loi immigration rejeté : que se passerait-il en cas de dissolution de l'Assemblée nationale ?

L’article 12 de la Constitution autorise le président de la République, et lui seul, à procéder à une dissolution de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire à convoquer de nouvelles élections législatives. [©Sarah MEYSSONNIER/REUTERS]

La motion de rejet du projet de loi sur l'immigration a été adoptée par les députés ce lundi 11 décembre. Face à cet «échec politique», le président du Rassemblement national, Jordan Bardella a appelé à «la dissolution de l'Assemblée nationale». Voici ce que cela impliquerait.

Un camouflet pour le gouvernement. Ce lundi, les députés ont adopté, à 270 voix contre 265, une motion de rejet sur le projet de loi immigration porté par Gérald Darmanin. Alors qu’Emmanuel Macron a refusé la démission du ministre de l'Intérieur, plusieurs voix se font désormais entendre pour exhorter à la dissolution de l’Assemblée nationale. Une disposition constitutionnelle très risquée pour le président, qui ne dispose que d’une majorité relative. 

Qui peut la mettre en œuvre ? 

L’article 12 de la Constitution autorise le président de la République, et lui seul, à procéder à une dissolution de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire à convoquer de nouvelles élections législatives. Un pouvoir qu’il ne détient pas à l’égard du Sénat, dont les membres sont élus au suffrage universel indirect. Pour dissoudre, le Président doit d’abord consulter la Première ministre et les présidents des deux chambres (aujourd’hui, Yaël Braun-Pivet pour l’Assemblée et Gérard Larcher pour le Sénat). En revanche, rien ne l’oblige à tenir compte de leur avis : la décision finale est entre les mains du président.

Quel timing ? 

Le timing est, là encore, à la discrétion du chef de l’État qui procède généralement à une dissolution quand il est contrarié politiquement, ce qui pourrait être le cas actuellement avec le refus de ce projet emblématique pour le gouvernement. Après la dissolution, les élections législatives doivent être organisées dans un délai de 20 à 40 jours. Rien n’empêche les députés de la précédente législature de se représenter. Il n’existe pas non plus de nombre de mandats maximum. Un député peut l’être aussi longtemps que les électeurs le décideront.

Quels risques ? 

Avoir recours à un tel procédé représente cependant un risque pour l’exécutif. Avec un peu plus de 250 députés acquis à sa cause, Emmanuel Macron ne dispose en effet que d’une majorité relative. Ainsi, convoquer les Français pour voter une seconde fois pour leurs députés risquerait de renforcer l'opposition, voire de créer une cohabitation, un scénario qui s’est déjà produit dans l’histoire de la Ve République lorsque Jacques Chirac a prononcé la dissolution de l’Assemblée en 1997 et s’est retrouvé avec une majorité de gauche, en totale opposition avec son parti.

Quels précédents ? 

À l’image de celle de 1997, plusieurs autres dissolutions ont été prononcées dans l’histoire de la Ve République. La première intervient en 1962 alors que Charles de Gaulle veut introduire constitutionnellement la désignation du Président de la République par le suffrage universel direct. L’opposition fait front, et dépose une motion de censure, adoptée à 280 voix sur 480 députés.

Charles de Gaulle est défié et son Premier ministre, Georges Pompidou, présente la démission de son gouvernement, comme le précise l'article 50 de la Constitution. Une demande refusée par le général de Gaulle, qui dissout l’Assemblée nationale quelques jours plus tard, en réponse à cette défiance. Les élections législatives sont ensuite remportées par les gaullistes, ce qui renforce un peu plus Charles de Gaulle, qui verra son référendum être adopté le 28 octobre 1962. 

En mai 1968, la contestation sociale bat son plein. Après plusieurs épisodes qui témoignent de la déstabilisation de l’exécutif, le Premier ministre Georges Pompidou demande une dissolution de l’Assemblée nationale. Charles de Gaulle l’annonce le 30 mai 1968, et appelle les Français à se rendre aux urnes à la fin du mois de juin. Les députés gaullistes sont élus à la majorité absolue au sein de l’hémicycle. 

En avril 1981, fraîchement élu président de la République, le socialiste François Mitterrand ne dispose pas d’une majorité de députés. Il provoque alors la dissolution de l’Assemblée nationale le 22 mai, un mois après son élection, et obtient enfin une majorité lors du second vote. Sept ans plus tard, dans une course tenace à la présidentielle remportée par le président sortant face à Jacques Chirac, François Mitterand va récidiver le 13 mai 1988, dissoudre l’Assemblée et obtenir, une nouvelle fois, une majorité absolue. 

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