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Grenoble: des centaines de demandeurs d'asile entre squats et camps de fortune

Une femme qui demande l'asile et son enfant ont trouvé refuge dans un camp de fortune le 18 juillet 2014 à Grenoble [Jean-Pierre Clatot / AFP] Une femme qui demande l'asile et son enfant ont trouvé refuge dans un camp de fortune le 18 juillet 2014 à Grenoble [Jean-Pierre Clatot / AFP]

Squats, campements de fortune, femmes et enfants vivant depuis des mois à la rue: à Grenoble, le dispositif d'hébergement des demandeurs d'asile est à bout de souffle, alors qu'une réforme est présentée mercredi par le gouvernement.

En périphérie de la cité alpine, une demi-douzaine de grandes tentes Marabout ont été plantées à même l'asphalte, sur une aire destinée aux gens du voyage. Depuis le mois d'octobre, une trentaine de personnes y vivent, dont environ 20 demandeurs d'asile, principalement originaires d'ex-Yougoslavie.

Des matelas posés sur des palettes font office de chambre à coucher, des plaques électriques sur des tréteaux tiennent lieu de cuisine. A l'intérieur, la chaleur est insupportable dès les premiers rayons du soleil.

"C'est pas normal dormir comme ça, comme un chien!", lance l'imposant Shazhiman, 49 ans, avec un fort accent macédonien, qui alterne les cigarettes et les bouffées de ventoline, à l'abri de son parasol.

Monté par le centre communal d'action sociale (CCAS), le camp devait durer 15 jours, mais le temps a passé et il est toujours là, faute de solution alternative.

Quelque 70 autres demandeurs d'asile, dont de nombreux enfants, sont venus s'installer aux abords du camp, dans des cabanes de bois et de petites tentes plantées sur une bande de pelouse longeant un boulevard.

Un jeune garçon se promène dans un camp de fortune pour demandeurs d'asile, le 18 juillet 2014 à Grenoble [Jean-Pierre Clatot / AFP]
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Un jeune garçon se promène dans un camp de fortune pour demandeurs d'asile, le 18 juillet 2014 à Grenoble

A quelques centaines de mètres de là, une vingtaine de réfugiés d'Afrique de l'Est (Erythrée, Soudan, Somalie) ont investi une cité universitaire désaffectée pour cause de légionellose. Installés depuis 2012, ils semblent cohabiter sans souci majeur avec les autres étudiants.

"On essaie de rester propres et discrets et on ne demande de l'aide à personne", explique Adams, 28 ans, lunettes de soleil et chemise mode, qui a fui le Darfour en 2010.

Selon Olivier Thirard-Collet, de l'association Accueil demandeurs d'asile (ADA), environ un millier de demandeurs d'asile vivent sur l'agglomération grenobloise sans solution pérenne d'hébergement. "En trois ans, la situation de non-hébergement s'est banalisée, ça ne gène plus personne", affirme-t-il en mettant cette situation sur le compte de "la régionalisation" des demandes d'asile en 2010, qui a concentré les problèmes dans quelques métropoles.

- "Dispositifs saturés" -

Alain Bila, directeur de La Relève, qui gère une partie du dispositif d'hébergement pour la préfecture, évoque lui un chiffre compris entre 250 et 300 demandeurs d'asile à la rue. "Les dispositifs sont saturés", affirme-t-il.

"Beaucoup de déboutés ne quittent pas les hébergements d'urgence", abonde Pascale Préveirault, secrétaire générale adjoint de la préfecture. "Si ces personnes ont épuisé l'ensemble des procédures, elles ont vocation à quitter le territoire mais on ne peut pas facilement les éloigner car ce sont des familles", ajoute-t-elle.

Des hommes dans un camp de fortune pour demandeurs d'asile, le 18 juillet 2014 à Grenoble [Jean-Pierre Clatot / AFP]
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Des hommes dans un camp de fortune pour demandeurs d'asile, le 18 juillet 2014 à Grenoble

La préfecture consacre 9 millions d'euros par an pour 1.347 places d'hébergement et affirme ne plus avoir "ni place ni crédit".

Pas même pour Aïssata, une Guinéenne de 25 ans, qui vit à la rue avec ses trois enfants, de 11 mois, 2 ans et 4 ans, depuis son arrivée à Grenoble le 6 mai dernier.

La jeune femme et ses trois enfants, mines souriantes et tenues impeccables, dorment sur des couvertures, à la gare ou dans l'entrée d'un parking souterrain. "C'est très difficile. Tous les jours, j'ai peur qu'on vienne faire du mal à mes filles", raconte Aïssata, les yeux mouillés. Elle a justement fui son pays pour épargner une excision à ses filles.

Le 19 juin, le tribunal administratif a enjoint la préfecture de lui trouver un logement dans un délai de 24 heures, sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard. Un mois plus tard, Aïssata et ses enfants dormaient toujours dehors.

Contactée par l'AFP, la préfecture précisait que le paiement de l'astreinte ne se faisait pas "sur la même ligne budgétaire" que l'hébergement d'urgence. Finalement, un logement a été promis à Aïssata pour début août.

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