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"En fin de vie, la qualité de vie prime sur la durée"

[ARCHIVES AFP]

A la veille de la remise du rapport Sicard sur la fin de vie à François Hollande, Jean Léonetti fait le bilan sur la loi qui porte son nom et qui a été votée en 2005. S'il la juge certes perfectible, le député R-UMP des Alpes Maritimes pointe surtout un défaut d'application.

 

La loi de 2005 n'est-elle pas dépassée ?

Cette loi votée à l’unanimité il y a sept ans n’est pas parfaite, la preuve est que nous l’avons modifiée en 2008 après une réévaluation demandée par François Fillon. Mais je note qu’elle a inspirée des pays étrangers : les directives anglo-saxonnes sont de même type, les socialistes espagnols ont fait une loi équivalente et la loi a été presque copiée en Argentine.

Personne ne conteste qu’elle apporte des éléments positifs. Quant à la question de son évolution, je vois effectivement certaines améliorations possibles.

 

Mais l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) la juge carrément «insuffisante»…

Je constate que l’Observatoire national de la fin de vie vient de remettre son rapport dans lequel il répète surtout que cette loi est mal appliquée. Malheureusement. Je vois encore des gens en colère car ils ont vu des proches mourir en souffrant alors que la loi interdit l’acharnement thérapeutique. Le texte dit bien qu’en fin de vie, la qualité de vie prime sur la durée.

 

Quelles améliorations vous semblent possibles ?

Il y a tout d’abord l’information globale. On entend beaucoup de gens dire qu’il faut une loi sur l’euthanasie mais quand on leur demande ce qu’il doit y avoir dedans, ils parlent de l’interdiction de l’acharnement thérapeutique. Ils disent «on ne peut pas faire souffrir les gens même si ça doit raccourcir la vie». Ce sont à peu près les termes de la loi actuelle, ce qui montre le manque d’information.

 

Et dans la loi elle-même ?

La sédation terminale -le fait d’endormir un malade en fin de vie, à sa demande- me parait être une demande légitime. Quelqu’un qui souffre physiquement ou mentalement a le droit de demander à s’endormir avant de mourir. Ce n’est pas un acte d’euthanasie. Les médecins devraient pratiquer déjà ces sédations quand la souffrance est insupportable.

Si les malades le réclame et que ça devient une demande opposable dans des circonstances précises, cela apportera le confort et la sérénité indispensables à la fin de vie.

 

Les malades sont-ils suffisamment associés ?

Ils ont la possibilité, quand ils sont encore lucides de rédiger des directives anticipées pour le moment où ils ne le seront plus. Mais ces directives sont trop peu utilisées et pas assez contraignantes pour le médecin. Ce dernier ne doit pouvoir s’en écarter qu’avec une argumentation collégiale.

Par ailleurs, ces indications sont conservées par la personne. Je souhaite que les directives anticipées soient inscrites sur la carte vitale pour que l’on puisse plus facilement s’y référer quand se pose la question de prolonger la vie ou d’arrêter la survie.

 

François Hollande est partisan « d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie ». Qu’en pensez-vous ?

Il a raison et c’est d’ailleurs ce que dit la loi française. Je constate que pendant la campagne, il n’a jamais utilisé le mot euthanasie et depuis son élection François Hollande a bien demandé une réflexion mais sans faire part de l’idée qu’on pourrait donner la mort à quelqu’un en fin de vie.

 

Qu’attendez-vous du rapport Sicard ?

Je ne veux pas présager de ce qu’il dira. Ce que je peux dire c’est que c’est un homme honnête et sérieux. Mais je regrette que sa mission ait été trop courte et avec peu de moyens. J’aurai préféré une mission plus longue, comme nous avons fait sur les lois bioéthiques avec des états-généraux de la fin de vie, des panels citoyens…

 

Les radicaux de gauche ont déposé une proposition de loi pour un «droit de mourir médicalement assisté». La voterez-vous ?

Ce n’est qu’une énième copie des lois belge et hollandaise. L’observatoire de la fin de vie met en lumière, dans une analyse comparative, les dérives dans les pays qui ont légalisé l’euthanasie. En Belgique, on donne trois fois plus la mort à des gens qui ne l’ont pas demandée qu’en France.

Je ne veux pas d’une loi baclée par des gens qui ont très peu réfléchi à la question. Sur ce sujet, les seuls dont je suis sûr qu’ils sont dans l’erreur, ce sont ceux qui affirment des choses avec certitude. Tous ceux qui ont travaillé le sujet savent qu’il est difficile. Tous sont traversés par des doutes, y compris moi-même.

 

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