Les autorités locales de Guingamp, en Bretagne, envisagent de faire venir des médecins cubains pour pallier le manque d'effectifs. Cuba est engagé dans un programme de coopération médicale depuis des dizaines d'années.
Le système de santé français est à la peine, et la solution pourrait bien se trouver... à Cuba. Depuis les années 1960, le pays porte un programme de coopération médicale international qui l'a amené à envoyer des milliers de médecins à l'étranger. Une poignée d'entre eux pourraient bientôt prendre leur poste à l'hôpital de Guingamp (Côtes-d'Armor), en Bretagne.
Vendredi 16 février, des élus de l'agglomération Guingamp-Paimpol, des syndicats, des représentants des médecins et de la direction de l'hôpital de la ville ont rencontré l'ambassadeur de Cuba en France, Otto Vaillant, pour discuter de ce projet.
Ce territoire est marqué par des difficultés d'accès aux soins, puisque la maternité de Guinguamp est notamment menacée de fermeture depuis des années. Après une forte mobilisation de la population elle a obtenu un sursis en 2018 à la demande d'Emmanuel Macron mais, depuis avril 2023, les accouchements y sont suspendus en raison du nombre insuffisant de soignants.
D'autres hôpitaux proches souffrent également d'un manque de personnel. A Lannion (Côtes-d'Armor) et à Carhaix (Finistère), l'accès aux urgences est régulé la nuit, faute de médecins urgentistes. Les Côtes-d'Armor sont le département le moins bien loti de Bretagne en terme de densité de médecins.
En comparaison, avec 82 médecins pour 10.000 habitants selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Cuba est le champion du monde dans ce domaine. Au point que, durant la pandémie de Covid-19, le pays s'est permis d'envoyer quelque 4.000 professionnels de santé en renfort dans une quarantaine de pays. Certains sont notamment intervenus en France, en Guyane et Martinique, d'autres en Italie et en Andorre.
Plus largement, Cuba cultive une véritable tradition de coopération médicale. En 2023, d'après les autorités cubaines, 22.632 professionnels de santé étaient répartis dans 57 pays. Une région italienne, la Calabre, a par exemple signé un accord en 2022 pour le déploiement de 500 médecins cubains sur son territoire.
Une tentative avortée en Charente Limousine
Ce programme, lancé dans les années 1960, est vu comme une arme diplomatique et constitue une source très importante de devises pour Cuba, parfois la première. Cette coopération médicale a rapporté 6,3 milliards de dollars en 2018 et 3,9 milliards en 2020, selon des chiffres officiels.
En France, une tentative a déjà eu lieu en Charente Limousine en 2021. L'objectif était de faire venir 15 médecins cubains pour lutter contre les déserts médicaux, mais le projet avait été retoqué par l'Agence régionale de Santé.
Vendredi, Otto Vaillant a fait savoir qu'en dehors de Guingamp d'autres élus, en Bretagne mais aussi ailleurs en France, l'on également sollicité. Il a expliqué qu'un «accord gouvernemental» par décret était nécessaire pour pouvoir faire venir des médecins cubains dans l'Hexagone.
Pour l'heure cette perspective soulève encore quelques questions, notamment celles de la barrière de la langue et du coût du projet, sachant qu'une grande partie du salaire versé par le pays hôte est prélevé par les autorités cubaines. Certaines ONG, telle que Human Rights Watch, dénoncent d'ailleurs les conditions dans lesquelles ces soignants sont envoyés à l'étranger, soumis selon elles à des «règles draconiennes [...] qui violent leurs droits fondamentaux».