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Pourquoi les minorités sont-elles davantage touchées par le Covid-19 aux Etats-Unis et au Royaume-Uni ?

Un marché à Londres. Les minorités ethniques exercent souvent des métiers de service non adaptables au télétravail. [DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP].

Au Royaume-Uni comme aux Etats-Unis, les minorités sont davantage frappées par la pandémie de coronavirus comparativement au reste de la population. Mais si ces deux pays possèdent des caractéristiques communes pouvant expliquer cette inégalité, des différences propres à chacun subsistent également.

Les chiffres sont sans appel. Aux Etats-Unis, pays où les statistiques ethniques sont légion, les données qui remontent chaque jour des Etats font établir un classement contrasté, implacable et glacial.

Dans la première puissance mondiale, les Noirs sont ainsi «trois à quatre fois» plus touchés par le coronavirus que les autres citoyens, a reconnu lui-même Donald Trump, le président américain.

Précarité, absence d'assurance maladie...

Alors qu'ils représentent seulement 14 % de la population de l'Illinois, les Afro-Américains comptabilisent 42 % des décès liés à la maladie Covid-19.

Un écart totalement démesuré qui se retrouve plus au sud, en Louisiane. Dans cet Etat, où un tiers des habitants sont noirs, 70 % des personnes décédées le sont également.

Le docteur Anthony Fauci, chargé de conseiller la Maison Blanche dans la crise, attribue cette disparité d'abord à une plus grande précarité qui fragilise davantage leur santé.

«Ce n’est pas [que les Noirs] sont plus contaminés, c’est que quand ils le sont, leurs conditions sanitaires sous-jacentes (diabète, hypertension, obésité, asthme) les amènent plus régulièrement vers les soins intensifs et, au final, ils présentent une mortalité supérieure», a-t-il résumé.

Dans un pays où aucune couverture sociale universelle n’existe, les Afro-Américains présentent en effet plus de comorbidités, mais la pauvreté fait aussi qu'une grande partie d'entre eux est plus exposée au virus.

Exercant souvent des métiers peu adaptables au télétravail, les Noirs sont en effet contraints d’aller travailler. Plus pauvres, ils habitent aussi dans des logements plus modestes, ce qui peut contribuer à contaminer leurs proches.

Le docteur Fauci le dit lui-même, cette épidémie remet la lumière sur de profondes disparités qui existaient déjà bien avant elles. Et à titre d'exemple, à Chicago, la population noire présentait une espérance de vie plus courte de 8,8 ans que celle des Blancs déjà avant l’apparition du Covid-19.

Le résultat de discriminations ancrées

Mais cette situation tragique ne s'arrête pas seulement aux Noirs et concerne aussi d'autres minorités, comme les Latinos ou les Amérindiens qui ont des profils et des histoires similaires.

«Il est essentiel que nous comprenions que ces disparités sont le résultat d’une histoire de politiques et de pratiques raciales discriminatoires qui ont mis les populations minoritaires en danger sur les plans sanitaire et économique bien avant l’apparition du Covid-19», explique ainsi Hedwig Lee, professeur de sociologie à la Washington University de Saint-Louis (Missouri), citée par le quotidien suisse Le Temps.

De l'autre côté de l'Atlantique, au Royaume-Uni, les communautés noires, asiatiques essentiellement indiennes ou pakistanaises ou encore des Philippins forment le tiers des patients les plus atteints par le coronavirus à l’hôpital, selon une étude du Centre de recherche et d’audit national sur les soins intensifs (ICNARC).

Outre une plus grande précarité, davantage présente là aussi, s'ajoutent des facteurs d'ordre génétiques et sociaux culturels.

Les personnes venant «d’Asie du Sud-Est vivent généralement dans des endroits plus défavorisés et sont plus sujettes au diabète et aux maladies cardiovasculaires», explique ainsi le docteur Kamlesh Khunti, qui a dirigé l’étude de l’ICNARC. 

Des soignants en première ligne

Dernier aspect, et non des moindres, au Royaume-Uni, 12 % des soignants, une profession particulièrement exposée aux risques de contaminations, sont des immigrés, selon l’Office national des statistiques. À Londres, une des zones les plus touchées par l’épidémie, cette proportion atteint même 23 %. Au total, ils forment un bataillon de 153.000 blouses blanches dans un pays qui en compte 1,2 millions.

Comme l'indique Le Monde, les chiffres sont encore plus impressionnants concernant les médecins : 37 % d’entre eux ont décroché leur diplôme hors du Royaume-Uni. Et selon les dernières statistiques du National Health Service, 40 % de ses médecins (britanniques ou non) sont d’origine ethnique «non blanche » (principalement asiatique).

Grand défenseur du Brexit, le Premier ministre, Boris Johnson, récemment hospitalisé pour avoir lui-même contracté le SARS-CoV-2, ou nouveau coronavirus, a illustré dans ses remerciements aux équipes soignantes la contribution précieuse de ces travailleurs étrangers, en remerciant deux infirmiers, Jenny de Nouvelle-Zélande, et Luis, un Portugais.

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