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La Grèce inquiète de la résilience de l'extrémisme local

Lucas Papademos, l'ex-Premier ministre grec, a été blessé dans un attentat à la lettre piégée.[ELEFTHERIOS ELIS / AFP]

La police grecque s'alarmait vendredi de la résilience de l'extrémisme local, au lendemain de l'attentat à la lettre piégée qui a légèrement blessé l'ex-Premier ministre et banquier Lucas Papademos, dans le fil d'actions anarchistes visant les créanciers du pays.

Les services anti-terroristes saisis de l'enquête tentaient dans l'immédiat de comprendre comment la lettre a échappé aux contrôles de sécurité prévus pour la correspondance des décideurs politiques et économiques, a indiqué une source policière à l'AFP.

La police n'a pas encore précisé si l'envoi contenait un explosif ou de la poudre à pétards. Ce dernier matériel avait été utilisé en mars pour des envois piégés contre le ministère allemand des Finances et le bureau du FMI à Paris, où une employée avait été légèrement blessé. 

Le groupe anarchiste grec Conspiration des Cellules de feu avait revendiqué l'action de Berlin, et les enquêteurs lui ont imputé celle de Paris. 

Huit autres lettres piégées - adressées notamment au commissaire européen aux Affaires économiques Pierre Moscovici et au chef de file de l'Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem - avaient été interceptées dans la foulée dans un bureau postal athénien. 

L'attaque contre M. Papademos «ressemble» à ces actions, même si la police n'exclut aucune piste, a souligné la même source policière. Elle a jugé que l'attentat était avant tout «symbolique». L'impact a été amplifié par «l'espace confiné» où s'est produit la déflagration, alors que M. Papademos et ses deux gardes du corps, également légèrement blessés, circulaient en voiture à Athènes, jeudi soir.

«Radicalisation» de crise

M. Papademos, 69 ans, a dirigé le gouvernement de coalition formé en Grèce entre 2011 et 2012, au pic de la résistance des Grecs à la cure d'austérité imposée par l'UE et le FMI. Il avait auparavant piloté le passage grec à l'euro à la tête de Banque de Grèce de 1994 à 2002.

Également ex-vice président de la Banque centrale européenne, il restait hospitalisé vendredi à «titre préventif», selon la police. Victime de brulures à la tête et au torse, il a été opéré dans la nuit pour une blessure à la cuisse, a précisé l'hôpital. 

Dans l'attente d'une revendication, la police redoutait d'autres envois piégés, et a renforcé les contrôles sur la correspondance. 

Que la nébuleuse extrémiste locale «continue à agir» en dépit de nombreuses arrestations ces dernières années, et qu'elle «réussisse fasse preuve d'expertise et d'expérience est un problème», a reconnu la même source policière. 

«Les conditions socio-économiques du pays favorisent le recrutement» extrémiste et la «radicalisation» des contestataires, a-t-elle déploré. 

L'attentat intervient après l'adoption par le pays de nouvelles mesures d'austérité d'un montant de 4,9 milliards d'euros prorogeant jusqu'en 2021 la purge qui a frappé de plein fouet la société grecque depuis le déclenchement de la crise de la dette en 2010. 

La paix sociale est rompue

Le virage pragmatiste du Premier ministre de gauche, Alexis Tsipras, élu au départ pour en finir avec la rigueur, le maintien d'un chômage record, la paupérisation de larges pans de la population ont rompu ces derniers mois la fragile paix sociale. 

Dans sa revendication de l'action contre le ministre allemand des Finances, le groupe Conspiration avait affirmé agir dans le cadre d'un plan «Nemesis» (justice en grec) visant «le système de pouvoir». Le groupe, dont une dizaine de membres ont été condamnés et purgent de lourdes peines de prison, figure sur la liste des organisations terroristes établie par Washington. 

Des liens avec d'autres groupes politiques

Il avait déjà signé une série d'envois piégés à des ambassades en Grèce et à des dirigeants européens en 2010. Se prévalant de collaborer avec les anarchistes italiens de la FAI (Fédération Anarchique Informelle), la Conspiration s'était mise en sommeil en 2011, avant d'annoncer «son retour» en 2014. 

Selon la police, le nom de M. Papademos figurait aussi sur une liste de personnalités retrouvées en janvier au domicile d'une extrémiste arrêtée après quatre ans de cavale

Paula Roupa dirigeait avec son compagnon Nikos Maziotis – emprisonné - le groupe Lutte révolutionnaire (EA). Il a revendiqué avec une rhétorique d'extrême-gauche plusieurs attentats non meurtriers entre 2003 et 2014, le dernier en date à la voiture piégée contre le siège de la banque de Grèce.

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