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Soudan du Sud : les rebelles nient avoir massacré des civils à Bentiu

Des Sud-Soudanais à bord d'un canot avant de traverser la rivière Gany à Bentiu le 23 mars 2014 [Ivan Lieman / AFP/Archives] Des Sud-Soudanais à bord d'un canot avant de traverser la rivière Gany à Bentiu le 23 mars 2014 [Ivan Lieman / AFP/Archives]

Les rebelles sud-soudanais menés par l'ancien vice-président Riek Machar ont nié mardi avoir massacré des centaines de civils dans la localité septentrionale de Bentiu, et accusé l'armée gouvernementale et ses alliés qu'ils combattent depuis mi-décembre au Soudan du Sud.

L'ONU avait accusé lundi les troupes rebelles d'avoir massacré, sur des critères ethniques, des centaines de civils lorsqu'elles ont repris Bentiu à l'armée gouvernementale. Selon la Mission de l'ONU au Soudan du Sud (Minuss), les massacres ont commencé le 15 avril, date à laquelle la rébellion affirmait avoir repris le contrôle de la localité.

C'est l'un des plus importants massacres de civils rapportés depuis le début des combats, qui ont éclaté le 15 décembre à Juba au sein de l'armée sud-soudanaise entre troupes fidèles au président sud-soudanais Salva Kiir et celles loyales à M. Machar. Ils se sont ensuite étendus au reste du pays et se sont accompagnés de nombreuses atrocités contre les civils, essentiellement sur des critères ethniques.

Il y a "des empilements de corps alignés le long des rues, là où ils ont été exécutés, devant et dans des lieux de cultes - l'église et la mosquée - d'autres éparpillés sur la route, la majorité vêtus d'habits civils", a expliqué lundi à l'AFP Tony Lanzer, responsable des opérations humanitaires de l'ONU au Soudan du Sud, de retour de Bentiu, capitale de l'Etat pétrolifère d'Unité.

Les victimes "ont été délibérément prises pour cibles", a-t-il ajouté, évoquant "une vision des plus terribles".

Le chef des rebelles au Soudan du Sud, Riek Machar (au centre), le 14 avril 2014 à Nasir [Zacharias Abubeker / AFP/Archives]
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Le chef des rebelles au Soudan du Sud, Riek Machar (au centre), le 14 avril 2014 à Nasir

Quand les troupes de Riek Machar "ont pris Bentiu (...) elles ont fouillé un certain nombre d'endroits où des centaines de civils sud-soudanais et étrangers avaient trouvé refuge et ont tué des centaines de ces civils après avoir établi leur appartenance ethnique ou leur nationalité", a de son côté expliqué la Minuss.

A la lutte au sein du régime entre MM. Kiir et Machar, se greffent de vieux antagonismes entre peuple dinka et nuer dont sont respectivement issus les deux hommes, inimités plongeant pour partie leurs racines dans la guerre civile entre la rébellion sudiste et Khartoum (1983-2005), ayant débouché sur l'indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.

 

- Civils tués à l'hôpital -

 

Plus d'un million de Sud-Soudanais terrifiés ont été chassées de chez eux depuis le début des combats qui se poursuivent malgré un cessez-le-feu signé le 23 janvier à Addis Abeba.

Dans une mosquée de Bentiu, où des centaines de personnes avaient trouvé refuge, "plus de 200 civils semblent avoir été tués et plus de 400 blessés", selon la Minuss qui affirme que les forces pro-Machar ont "séparé des individus de certaines nationalités ou groupes ethniques et les ont mis en sécurité, tandis que les autres ont été tués".

Carte localisant Bentiu, où un massacre des forces pro-Machar a fait de plus de 200 victimes [ / AFP]
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Carte localisant Bentiu, où un massacre des forces pro-Machar a fait de plus de 200 victimes

"A l'hôpital de Bentiu, des hommes, femmes et enfants nuer ont été tués parce qu'ils se cachaient et refusaient de rejoindre d'autres Nuer célébrer l'entrée" des rebelles dans la localité.

"Des individus d'autres communautés sud-soudanaises, ainsi que des Darfouris (habitants du Darfour, dans l'ouest du Soudan) ont été spécifiquement visés et tués à l'hôpital", a poursuivi la Minuss.

Le camp Machar accuse régulièrement des rebelles du Darfour - qui y combattent les troupes de Khartoum - de prêter la main aux forces pro-Kiir.

Les troupes antigouvernementales ont également tué certains des civils réfugiés dans l'église catholique et dans une enceinte abandonnée du Programme alimentaire mondial (PAM) après leur avoir demandé leur origine ethnique ou leur nationalité, selon l'ONU.

La Minuss a aussi dénoncé les appels à la haine diffusés sur Radio Bentiu par les nouveaux maîtres de la localité: "Certains chefs (de la rébellion) ont diffusé des messages appelant à l'unité et la fin du tribalisme, mais d'autres ont diffusé des appels à la haine", appelant notamment à chasser certaines communautés de Bentiu ou à violer leurs femmes.

L'Armée de libération populaire sud-soudanaise (SPLA) patrouille dans les rues après la prise de Bentiu, le 12 jenvier 2014 [Simon Maina / AFP/Archives]
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L'Armée de libération populaire sud-soudanaise (SPLA) patrouille dans les rues après la prise de Bentiu, le 12 jenvier 2014

Le nombre de Sud-Soudanais réfugiés dans la base de l'ONU à Bentiu a pratiquement triplé depuis la prise de la localité, passant de 8 à 22.000 personnes, a indiqué lundi Tony Lanzer. Les réfugiés n'y disposent désormais que "d'un litre d'eau par personne (par jour) et ce n'est pas suffisant dans la chaleur du Soudan du Sud", a-t-il expliqué.

Au total, la Minuss héberge désormais quelque 80.000 personnes sur ses huit bases du pays. Plus de 30.000 hommes, femmes et enfants continuent de s'entasser dans des conditions catastrophiques sur les deux bases de Juba, où l'on ne signale pas de combats, craignant d'être visées pour leur appartenance ethnique.

Le 18 avril, environ 350 hommes, armés et en civil, ont attaqué l'enceinte de l'ONU à Bor, à 200 km au nord de Juba, où près de 5.000 civils, essentiellement nuer, ont trouvé refuge, tuant une cinquantaine d'entre eux.

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