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Philippines: rendre leur nom aux cadavres, la mission des légistes

Des bénévoles de la Croix Rouge brûlent des débris après le passage du typhon Haiyan à Tacloban le 20 novembre 2013 [Odd Andersen / AFP] Des bénévoles de la Croix Rouge brûlent des débris après le passage du typhon Haiyan à Tacloban le 20 novembre 2013 [Odd Andersen / AFP]

Une nuée de mouches s'échappe de la housse mortuaire ouverte par Cecilia Lim, médecin légiste philippine chargée de l'identification des victimes avant leur inhumation dans des fosses communes.

"Certaines de ces dépouilles n'ont déjà plus de visage. Nous essayons de faire aussi vite que possible avant de tout perdre", explique le médecin alors qu'un camion décharge 80 corps supplémentaires près d'une fosse commune.

Une odeur fétide émane du terrain où 700 cadavres ramassés à Tacloban (centre-est) ont été enfouis à la hâte. Certains ont séjourné près de dix jours dans les rues de la ville portuaire, abandonnés à l'humidité et la chaleur tropicales, après le passage le 8 novembre du typhon Haiyan et le déferlement de vagues meurtrières sur des îles du centre de l'archipel philippin.

L'objectif des médecins légistes est de recueillir toute information susceptible de rendre un jour leur nom aux dépouilles anonymes, puis de les exhumer afin de leur offrir une sépulture individuelle.

Maisons détruites, débris et gravats s'accumulent à Tacloban le 20 novembre 2013, ville ravagée par le typhon Haiyan [Odd Andersen / AFP]
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Maisons détruites, débris et gravats s'accumulent à Tacloban le 20 novembre 2013, ville ravagée par le typhon Haiyan

Une fois retirés les vêtements détrempés du cadavre, Cecilia Lim consigne dans un petit carnet le sexe et l'aspect général en relevant toute marque distinctive.

Les bagues sont prélevées, les poches vidées, leur contenu enregistré et photographié. Un cliché des dents est pris.

Penchée sur le corps gonflé d'un homme, le médecin examine une paire de lunettes trouvées dans la poche de sa chemise, cherche un nom de marque sur les branches, puis les replie et les photographie.

"Nous prenons note des vêtements qu'ils portent, ainsi que de tout bijou, tatouage ou cicatrices" que des proches pourront reconnaître, explique-t-elle.

Idéalement, Cecilia Lim aurait souhaité dresser un annuaire ADN pour comparer l'empreinte génétique des dépouilles avec celles de personnes recherchant des proches disparus.

Mais la procédure est onéreuse car l'état de décomposition d'un grand nombre de corps est tel qu'il faudrait prélever l'ADN dans l'os.

Des corps entassés

Cesar Pretencio a identifié le corps de sa mère. "Il était dans la chapelle mais maintenant il a disparu. Nous voulons savoir où elle est pour lui offrir un enterrement digne de ce nom".

Le typhon a fait plus de 5.500 morts et disparus, selon le dernier bilan provisoire des autorités philippines, dépassées par l'ampleur de la catastrophe.

Cecilia Lim est l'une des médecins légistes, en nombre très insuffisant, à s'être rendus dans la région sinistrée pour apporter son concours.

Un homme transporte un bidon d'eau potable à Tacloban le 20 novembre 2013 [Odd Andersen / AFP]
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Un homme transporte un bidon d'eau potable à Tacloban le 20 novembre 2013

Les corps sont apportés dans cette morgue de campagne par les pompiers qui sillonnent la ville anéantie.

"Hier nous en avons ramassé 92", dit à l'AFP Gallie Encabo, dépêché à Tacloban depuis l'île de Mindanao (sud), elle aussi fréquemment meurtrie par des typhons.

"Quand les médecins ont noté toutes les marques sur les corps aux fins d'identification, nous les mettons en terre", explique-t-il alors qu'une pelleteuse jaune creuse une nouvelle tranchée.

Cecilia Lim explique que son travail consiste aussi à remettre un peu d'ordre dans le protocole funéraire.

A Tacloban, "beaucoup de corps ont juste été entassés les uns sur les autres. Ca veut dire qu'il faudrait retourner une grande partie de la fosse pour en retrouver un", se désole-t-elle.

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