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Centrafrique : Bangui aux mains des rebelles, Bozizé en fuite

Des rebelles de la coalition Séléka dans un village près de Damara, le 22 mars 2013 [Sia Kambou / AFP/Archives]

Les rebelles centrafricains de la coalition Séléka ont pris dimanche le contrôle de Bangui, au terme d'une offensive éclair lancée pour renverser le président au pouvoir depuis dix ans, François Bozizé, qui a fui la capitale.

La France - ex-puissance coloniale - a confirmé que le dirigeant centrafricain était parti, sans indiquer sa destination. "Alors que se confirme le départ de Bangui du président Bozizé, j'appelle toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue", a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius.

"Les rebelles contrôlent la ville même s'il y a encore quelques tirs à gauche et à droite", a assuré une source au sein de la Force multinationale d'Afrique centrale (Fomac), confirmant une information donnée par un haut responsable militaire centrafricain.

Quelque 350 soldats français ont été envoyés en renfort à Bangui depuis Libreville au cours du week-end pour assurer la protection des ressortissants français et étrangers présents en Centrafrique, a-t-on appris de source proche du dossier. Un premier contingent de 200 hommes est arrivé dès samedi, rejoint dimanche par une compagnie de 150 hommes, portant les effectifs militaires français en République Centrafricaine à près de 600 hommes.

En milieu de matinée, un des chefs militaires des insurgés, le colonel Djouma Narkoyo, avait annoncé: "Nous avons pris le palais présidentiel. Bozizé n'y était pas. Maintenant, nous allons nous rendre à la radio (nationale) pour que le président du Séléka (Michel Djotodia) prenne la parole". "Nous savions que Bozizé n'était pas là", a-t-il glissé.

Arrivé au pouvoir par les armes en 2003, le président Bozizé - un ancien proche de l'empereur Jean-Bedel Bokassa - avait été élu président en 2005 et réélu en 2011 au terme d'un scrutin très critiqué par l'opposition. Il n'est plus apparu en public depuis une brève visite, jeudi, à son allié sud-africain Jacob Zuma, à Pretoria.

Une source bien informée a affirmé à l'AFP que le président, âgé de 66 ans, avait "quitté le territoire national en hélicoptère".

Le président centrafricain François Bozizé au palais présidentiel, à Bangui, le 8 janvier 2013 [Sia Kambou / AFP/Archives]
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Le président centrafricain François Bozizé au palais présidentiel, à Bangui, le 8 janvier 2013
 

La Centrafrique, dont le sous-sol regorge de richesses comme l'or, l'uranium, le pétrole et les célèbres diamants, est enclavée entre le Tchad, le Soudan, la République démocratique du Congo (RDC), le Congo et le Cameroun.

Il suffit de traverser le fleuve Oubangui pour rejoindre la ville de Zongo en RDC. Mais, à Kinshasa, le porte-parole du gouvernement, Lambert Mendé, a assuré à l'AFP: "Le président Bozizé n'a pas demandé à venir en RDC, il n'y est pas arrivé, il n'est pas signalé".

Et à Brazzaville, le ministre des Affaires étrangères congolais Basile Ikouebe a affirmé: "ni moi ni le président de la République (Sassou Nguesso) n'avons été informés de son arrivée sur le sol congolais".

 

Dispositif militaire français renforcé

A Bangui, les rebelles sont "en train de (se) déployer dans l'ensemble de la capitale pour lancer les opérations de sécurisation et éviter les pillages", a affirmé un des porte-paroles du Séléka, Eric Massi depuis Paris.

Cependant, de nombreux pillages de magasins, restaurants, maisons et voitures ont été rapportés à travers toute la ville. "Il y a beaucoup de pillages avec des gens armés. Ils cassent les portes, pillent et après la population vient, se sert aussi", a affirmé par téléphone un habitant dans le centre.

Paris a annoncé avoir "renforcé" son dispositif pour assurer la sécurité des Français sur place auxquels M. Fabius a demandé de "rester chez eux".

Des renforts de troupes françaises arrivés de Libreville (Gabon) et quelque 250 soldats français stationnés en Centrafrique "sécurisent" l'aéroport de Bangui et protègent les ressortissants, selon une source diplomatique française.

Cette source a cependant affirmé que les quelque 1.200 Français en Centrafrique n'étaient "ni menacés, ni ciblés, ni visés, la France n'étant pas jugée partie prenante dans cette affaire, favorisant tel ou tel camp".

La rébellion avait lancé une première offensive le 10 décembre dans le nord du pays et enchaîné victoire sur victoire face aux forces gouvernementales désorganisées, avant de stopper sa progression sous la pression internationale à 75 km au nord de Bangui.

Le président français François Hollande avait à l'époque refusé son soutien au régime Bozizé.

Des accords de paix signés à Libreville le 11 janvier avaient ensuite débouché sur la formation d'un gouvernement d'union nationale composé de représentants du camp Bozizé, de l'opposition et de la rébellion.

Mais arguant du non respect des accords, les rebelles ont déclenché à nouveau les hostilités vendredi et déclaré vouloir mettre en place un gouvernement de transition s'ils prenaient Bangui.

 

Débandande

"Nos éléments ont lancé l'offensive (dimanche) en début de matinée passant le +bouchon+ du PK10 (point kilométrique 10, à une dizaine de kilomètres du centre et du palais présidentiel) près de la base sud-africaine pour aller vers le centre-ville", a expliqué Eric Massi.

Des rebelles du Séléka  dans un village près de Damara, le 10 janvier 2013 [Sia Kambou / AFP/Archives]
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Des rebelles du Séléka dans un village près de Damara, le 10 janvier 2013
 

Les échanges de tirs ont été très intenses vers 08H00 (07H00 GMT) puis sporadiques, a constaté l'AFP dans le centre de Bangui.

"On a entendu des tirs partout dans le centre ville, et c'était la débandade. Tout le monde s'est mis à courir dans tous les sens", a relaté une femme partie à la messe à la cathédrale, proche du palais présidentiel. "On vient d'abattre quelqu'un. Je ne sais pas si c'était un militaire ou un civil, mais il essayait de fuir sur sa moto quand il a été tué", a-t-elle ajouté.

Guy-Simplice Kodégué, porte-parole d'une plate-forme rassemblant des partis d'opposition et des associations de la société civile à Paris, a estimé dimanche: "le plus dur commence". "Nous avons un grand travail de reconstruction nationale à faire. Nous ne voulons pas de chasse aux sorcières. On a besoin de tout le monde".

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