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Pierrat : "Romney a opéré un étonnant recentrage stratégique"

Au coude à coude dans les sondages nationaux, les deux candidats peuvent l’emporter.[MICHAEL REYNOLDS / POOL /AFP ]

Après des mois de campagne électorale à un rythme effréné, les candidats à la Maison Blanche se retrouvent ce mardi face au verdict des urnes.

Le démocrate Barack Obama et le républicain Mitt Romney, au coude-à-coude dans les sondages nationaux, espèrent chacun emporter la mise, malgré deux stratégies bien différentes. L’avis de Ghyslaine  Pierrat, « spin doctor », docteur en communication politique et économique et auteur de l’ouvrage : "La communication n’est pas en jeu "(L’Harmattan-paris 5)

 

Quel est l’enjeu de cette élection présidentielle ?

La mondialisation s’est accélérée. Elle a rétréci les distances, a accru l’ouverture des marchés et créé une interdépendance des économies, source d’effets systémiques importants. Comme un jeu de domino. La politique est peut-être le dernier rempart à la financiarisation folle de l'économie.

Or, les institutions financières n’ont pas à gérer le monde. On l'a vu en 2008, avec Lehman Brothers. Ce qui est en jeu aujourd’hui, ce n’est pas seulement le leadership américain, mais l’élection est également très importante pour l’Europe, la France naturellement et pour l’Asie entre autres.

Elle doit générer confiance et espérance. Nous sommes dans une configuration politico-économique totalement nouvelle et liée. Une économie impérialiste n'existe plus.

 

Qui a fait la meilleure campagne sur le plan de la communication?

Barack Obama n’a pas si mal communiqué mais il n’a pas suffisamment travaillé, alors que Mitt Romney a fait une centaine de sessions d’entrainements avant le premier débat [du 3 octobre dernier], lors duquel il a créé la surprise.

Romney a réussi à gommer son ancienne activité professionnelle (au sein du fonds d’investissements Bain Capital) où les délocalisations et les licenciements, les restructurations étaient son quotidien. Il a aussi réussi à atténuer son côté va-t-en guerre, face à une opinion publique rétive à la guerre, après les expériences en Irak et en Afghanistan.

Romney a également  opéré un étonnant recentrage stratégique. Finalement Obama essaye de réparer en réformes, les conséquences des actions passées des fonds comme celui de Romney, Bain Capital ! C est un paradoxe.

 

Quelle a été l’erreur de Barack Obama?

Obama est un homme de légende. Son image est forte dans l'imaginaire collectif américain et international car il est l’homme qui a vécu ses quatre années d’expériences : une expérience de guerre, de terrorisme, de crise et de bataille incessante au Congrès avec des républicains qui n’ont pas arrêté de faire obstruction.

Or, son bilan est honorable. Mais le président a perdu cette bataille de la communication car trop de «com» tue la «com». Il n’a pas exprimé sa propre dimension, il a perdu sa liberté de parole et en confiance en son propre instinct. Cela a pesé sur son comportement et sa psychologie du moment, plus la fatigue légitime. 

Dans une campagne, il faut qu’à un moment, le candidat se donne totalement. Il faut qu’un homme rencontre un peuple, et vice-versa. Ses «spin doctors» l’ont tellement mis en garde contre des gaffes éventuelles, qu’il ne s’est pas suffisamment « lâché ». Voltaire aurait dit : "Le mieux est l'ennemi du bien..."

 

Cette campagne a-t-elle été plus virulente que les précédentes ?

Cette élection est d'abord une guerre de communication, une guerre d’image où l’argent domine et les investissements publicitaires astronomiques ! Mais de là à dire que la bataille était plus violente, je ne le pense pas.

Si l’on regarde l’histoire, on se rend compte  que les campagnes américaines n’ont jamais été un long fleuve tranquille. Citons juste en 1844, par exemple, le candidat Henry Clay était traité d’«ivrogne  opportuniste ». Son adversaire, James K. Polk, de « lâche » et de « marionnette ».

Gardons la tête froide par rapport au contemporain.

 

En quoi les derniers jours de campagne ont-ils été importants?

Ces derniers jours sont un marathon inouï, on dort quand on peut, on surfe sur les décalages horaires,  on visite cinq Etats en 48 heures. C’est épuisant pour les candidats et les conseillers.

A quelques jours, quelques heures du scrutin, chacun a un objectif : redonner aux gens le goût d’aller voter, et combattre l’abstention. J'espère  qu'elle ne sera pas trop importante, puisqu’aux Etats-Unis, où on peut aller voter avant. Avec ces facilités de vote formidables, personne ne peut se dérober à ce devoir citoyen. L’histoire nous oblige tous...

L'Amérique a besoin d'un Président opérationnel en temps réel et synchronisé à l'époque contemporaine. En France où le lien est ancien et solide, nous attendons tous le résultat de l'élection américaine 2012. 

 

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