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Loi immigration : quelles sont les mesures que le Conseil constitutionnel pourrait censurer ce jeudi ?

Le président de la République Emmanuel Macron a transmis au Conseil constitutionnel la loi immigration adoptée mardi à l'Assemblée nationale. [Jacques DEMARTHON / AFP]

Après l'adoption de la loi controversée sur l'immigration le 19 décembre dernier, le Conseil constitutionnel pourrait retoquer certains articles. Les sages annonceront leur décision ce jeudi.

Le projet de loi immigration n'a pas terminé son cheminement juridique. Adopté le 19 décembre 2023 à l'Assemblée nationale, le texte controversé a été transmis au Conseil constitutionnel afin qu'il statue «sur la conformité de cette loi», selon les mots du porte-parole du gouvernement, Olivier Véran. Le conseil des Sages doit donc se prononcer ce jeudi 25 janvier.

Présidée par Laurent Fabius, l'institution a disposé d'un mois pour trancher de la constitutionnalité du projet de loi qui a conduit à la démission du ministre de la Santé, Aurélien Rousseau. Alors que le président de la République, Emmanuel Macron, a reconnu sur France 5 que certaines dispositions du texte «ne le faisaient pas sauter au plafond», quels articles les Sages pourraient-ils retoquer ?

Les quotas chiffrés, l'accès différencié aux APL, le droit du sol...

L'établissement de quotas migratoires à l'issue d'un débat annuel à l'Assemblée nationale, est un premier sujet de frictions. «Déterminer des quotas chiffrés serait contraire à l'article 34 de la Constitution», a déclaré dans les colonnes du Parisien, Florian Boudié, rapporteur Renaissance de la loi au Parlement.

Cette même Constitution garantit l'égalité de tous les citoyens devant la loi. Or l'accès différencié aux APL - 5 ans de résidence en France pour les étrangers sans emploi, 3 mois pour les autres - est considéré par les opposants au texte à de la «préférence nationale». Le durcissement des conditions de regroupement familial ou la restriction du droit du sol pourraient aussi être retoqués.

«Le Conseil constitutionnel peut considérer que ce sont des cavaliers législatifs, c'est-à-dire des mesures sans lien avec l'objet du texte», a jugé dans Libération le député socialiste Arthur Delaporte.

Certains articles contraires au droit européen ?

Un autre écueil existe, face à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ou celle de la Cour de justice de l'Union européenne. «On pense au regroupement familial auquel le Conseil a accordé une protection constitutionnelle, au droit au recours pour les étrangers en sitution irrégulière et à la pénalisation de celle-ci, à l'examen de leur demande d'asile, à la déchéance de nationalité au sujet de laquelle François Hollande avait proposé une révision de la Constitution», détaille dans le Figaro, Dominique Chagnollaud, professeur d'université et juriste.

Pour le président du Cercle des Constitutionnalistes, le passage devant les Sages laissera forcément des traces : «C'est la première fois sous la Ve République qu'un Premier ministre affirme défendre un projet de loi partiellement inconstitutionnel alors que, depuis le gouvernement Rocard, tous ses prédécesseurs ont invité leurs ministres à veiller, dans la mesure du possible, à ce qu'un texte présenté par lui ne le soit pas».

L'exécutif en connaissance de cause ?

Les doutes publics d'Elisabeth Borne exprimés le 20 décembre sur France Inter concernant l'obligation de la maîtrise de la langue française pour le regroupement familial ou la «caution retour» pour les étudiants étrangers, démontrent une volonté de l'exécutif de faire retoquer certains articles du projet de loi.

«Tout semble indiquer qu’Emmanuel Macron a donné pour consigne de tout faire pour que la loi immigration ne soit pas appliquée. Si c’est le cas, ce serait un abus d’autorité inacceptable. Nous passerions alors d’une crise politique à un grave problème démocratique», a pesté mercredi le président des Républicains au Sénat, Bruno Retailleau, sur X (ex-Twitter).

«C'est inhabituel et malsain. (...) parce que la question politique est renvoyée au Conseil constitutionnel dans cet espèce de renversement des rôles», a jugé sur RTL, Bertrand Mathieu, professeur de droit constitutionnel à Paris 1 Panthéon-Sorbonne. La pression est donc importante pour le Conseil constitutionnel, qui pourra choisir de se rapprocher du projet de loi initial du gouvernement, ou accepter des ruptures d'égalité entre Français et étrangers, si elles sont conformes à l'intérêt général.

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