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Tuerie de Chevaline : le mystère plane toujours dix ans après

Les enquêteurs, en 2014 à Chevaline, deux ans après le quadruple meurtre. [JEAN-PIERRE CLATOT / AFP]

Le 5 septembre 2012, quatre personnes, dont trois de la même famille, ont été retrouvées mortes près de Chevaline (Haute-Savoie). Un quadruple homicide non élucidé et aux pistes nombreuses.

Les faits

Le 5 septembre 2012, un cycliste tombe sur un Britannique d'origine irakienne de 50 ans, Saad al-Hilli, son épouse de 47 ans et sa belle-mère de 74 ans morts dans leur voiture, avec plusieurs balles dans la tête, sur une route de campagne près de Chevaline, en Haute-Savoie.

Les deux fillettes du couple survivent. L’une a été grièvement blessée tandis que la seconde, recroquevillée sous les jambes de sa mère, n’avait pas été touchée. Probable victime collatérale, selon les enquêteurs, un cycliste de la région, Sylvain Mollier (45 ans), a également été abattu.

Où en est l’enquête ?

Pour tenter de faire la lumière sur cette affaire, plusieurs pistes ont été étudiées, des suspects placés en garde à vue, des centaines de témoins entendus, des milliers de pièces étudiées, mais le dossier de 90 tomes contient plus de questions que de réponses.

La piste fratricide  

Le frère aîné de Saad, Zaïd al-Hilli, est soupçonné de «complot en vue de commettre un meurtre». Il a été interpellé par deux fois, en 2013 et 2014 en Angleterre, avant d’être relâché par manque de preuves. Il n'a jamais cessé de clamer son innocence.

Les enquêteurs relatent un conflit «violent» sur l'héritage paternel, portant sur trois à cinq millions d'euros en biens et en immeubles. Le père des deux frères, décédé en 2011 en Espagne, avait laissé deux projets de testaments contradictoires. L'un déshéritait complètement Saad, l'autre établissait un partage équitable.

Le passé d'Iqbal, l'épouse de Saad, a été aussi passé au crible et les enquêteurs ont découvert «des choses surprenantes». Notamment un premier mariage aux Etats-Unis avec un chirurgien-dentiste américain de treize ans son aîné. Cet homme, James T., est mort à Natchez (Mississippi) le 5 septembre 2012, le jour de la tuerie de Chevaline. Cause officielle de son décès : une crise cardiaque.

L'espionnage industriel

Saad al-Hilli, un ingénieur considéré comme «brillant», travaillait pour une entreprise anglaise spécialisée dans les satellites civils (météo, surveillance des cultures...). Comme cette société collaborait avec de nombreux Etats étrangers, s'est posée la question de l'espionnage industriel ou du transfert de technologies.

Les investigations ont montré que le quinquagénaire avait «en sa possession beaucoup plus de données que son seul emploi ne le justifiait», toutefois «sans grande valeur marchande».

Les racines irakiennes

Le père al-Hilli, un industriel qui avait fui le régime de Saddam Hussein dans les années 1970, possédait notamment une maison et un terrain dans un quartier huppé de Bagdad (Irak). En 2004, les deux frères avaient entrepris ensemble des démarches pour récupérer ce patrimoine. Les enquêteurs ont cherché à savoir si ceux qui, en Irak, avaient mis la main sur ces biens, n'auraient pas eu intérêt à faire disparaitre les frères al-Hilli. Sans grand résultat.

Un Irakien de 35 ans au lourd casier judiciaire a été placé en garde à vue en 2014 après avoir été signalé par un de ses codétenus pour de présumées confidences sur l'exécution d'un «contrat visant à abattre des Irakiens». Il a finalement été innocenté.

Les pistes locales

Les soupçons se sont un temps portés sur un ancien policier municipal et un ancien légionnaire, tous deux passionnés d'armes anciennes. Les auditions et les perquisitions menées en 2014 n'ont pas permis d'établir un lien avec les meurtres mais ont révélé l'existence d'un trafic d'armes local.

L'hypothèse d'un tueur isolé, agissant de son propre chef, ou d'un tireur fou qui se serait posté sur la route forestière a aussi été émise, sans être corroborée à ce stade.

Un motard évasif

Considéré comme un suspect majeur, recherché pendant des mois, un mystérieux motard aperçu par des témoins au moment de la tuerie a finalement été retrouvé en 2014 grâce l'analyse des 4.000 numéros de portables relevés sur l'antenne relais la plus proche.

Cet entrepreneur de la région lyonnaise, «honorablement connu» selon les enquêteurs et sans casier judiciaire, a toujours affirmé n'avoir rien vu et se souvenir de rien. Selon la presse locale, la dernière garde à vue opérée en janvier 2022 le concernait. Mais les soupçons ont été levés.

Vers le pôle «Cold case» ?

Le dossier pourrait atterrir au nouveau pôle «cold cases» de Nanterre, avait annoncé fin juillet le parquet d'Annecy, celui-ci bénéficiant davantage de «moyens humains dédiés».

Le parquet d'Annecy avait requis le dessaisissement du juge local, en vue de sa transmission au nouveau pôle judiciaire consacré «aux crimes en série et non élucidés».

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