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L'édito de Guillaume Bigot : le carnaval, transgressif par nature

L'éditorialiste Guillaume Bigot revient ce mardi sur la polémique autour du carnaval de Marseille.

L’un des participants du carnaval de Marseille a déclaré : «Il y a comme une catharsis, tout le monde se retrouve. C’est un jour exutoire où tout est permis».

Il faut savoir que le carnaval est transgressif par nature. C’est une très vieille pratique qui sert à relâcher la pression sociale. Or, cela fait des mois que les jeunes qui ne risquent rien sont confinés à un âge où l’on a spécialement besoin d’interactions sociales.

Par ailleurs, ce carnaval interdit avait une coloration politique. L’extrême gauche, l’ambiance punk à chiens et la dénonciation de la coronafolie y étaient représentés. Il n’est pas possible de réunir autant de personnes dans une ville aussi surveillée que Marseille sans alerter la police. Mais l’intervention n’a été déclenchée qu’au dernier moment et une dizaine de personnes seulement ont été verbalisées. En dépit des déclarations martiales de Gérald Darmanin, l’Etat a donc choisi de laissez-faire.

La hantise du gouvernement est qu’une dispersion tourne mal, mette le feu aux poudres et que les violentes émeutes ayant éclaté aux Pays-Bas se reproduisent chez nous. Dans le contexte de l’insurrection chronique de certains quartiers, le gouvernement redoute, plus que tout, cette explosion générale de colère. Nos concitoyens sont au seuil de l’acceptabilité avait jugé le président en janvier dernier. La France va plonger dans le chaos prédisait également Marlène Schiappa il y a quelques semaines.

Cette peur de l’émeute a permis à 6.500 personnes de danser sans masque en plein Marseille. Tant mieux pour elles et tant pis pour les contaminés. Sauf que le même jour, à Dieppe, une vendeuse de souvenirs a passé 5 heures en garde à vue pour avoir ouvert sa boutique. Le contraste entre la retenue des forces de l’ordre d’un côté et de l’autre, leur application à vérifier que les jouets sont bien bâchés dans les supermarchés est choquant. La volonté de calmer le jeu vis à vis des gens qui piétinent les règles et celle de faire du zèle sur les citoyens honnêtes devient exaspérante.

Des craintes que la colère des Français explose ? Oui mais pas pour les mêmes raisons que le gouvernement ou plutôt à cause du gouvernement.

Les autorités semblent nous faire payer leur impuissance. Faible avec les forts et forts avec les faibles. Comme l’avait souligné Tocqueville, la passion dominante des Français est l’égalité. Nous sommes très attachés à ce que la loi soit la même pour tous. Et exaspérés par des règles appliquées à la tête du client. On a tous gardés à l’esprit la tolérance à l’égard de la manifestation en faveur d’Adama Traoré. Personne n’a oublié le dîner à l’Elyée qui a failli virer au cluster. On se souvient de François Bayrou dans l’aéroport ou de Bruno Le Maire dans le train sans masque. Encore récemment de Michel Sardou décoré sans respect des gestes barrières.

Le gouvernement a peur que la cocotte-minute explose. Mais sans s’en rendre compte, nos dirigeants font monter la pression. Car c’est leur peur qui risque de provoquer l’émeute généralisée. La révolte viendra de là. Elle est presque inévitable si le gouvernement ne se résout pas à sortir de son «en même temps», soit en lâchant la bride et en l’assumant, soit en faisant réellement respecter ses consignes. Mais nous prenons un tout autre chemin… Alors que la Hongrie a passé commande de 200.000 doses de vaccins, la France vient d’acheter 170.000 balles de LBD. On a les traitements que l'on mérite.

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