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Manifs : à quoi rêvent les jeunes ?

Les contestataires craignent pour leur entrée sur le marché du travail. Les contestataires craignent pour leur entrée sur le marché du travail. [©M_PATTIER_SIPA]

Toujours mobilisée contre la réforme du travail, une génération sort de son silence pour afficher ses inquiétudes quant à son avenir. 

Derrière les cris et les slogans, la peur du vide. Une semaine après avoir été en première ligne de la contestation, la jeunesse a de nouveau battu le pavé, ce jeudi, contre la réforme du travail. «La précarité, c’est pour tout le reste de notre vie», a ainsi résumé le président de l’Unef, William Martinet.

Une phrase empreinte de l’amertume dans laquelle se trouve aujourd’hui une génération tout entière. Des jeunes qui, contrairement à leurs grands-parents, ont délaissé la défense des idéaux pour le pragmatisme.

Ni plus, ni moins que les autres

Si certains des contestataires disaient hier vouloir mener une révolution, les rêves des jeunes sont loin d’être aussi ambitieux. «Ils ne veulent pas plus que les autres, mais pas moins non plus. Juste une place à part entière dans la ­société», explique le sociologue Michel Fize, auteur de Jeunesses à l’abandon (éd. Mimesis). En d’autres termes : pouvoir simplement avoir un travail, acquérir un logement, aller chez le médecin si ­nécessaire et s’offrir de temps en temps un loisir.

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Sauf que l’arrivée sur le marché du travail relève souvent du parcours du combattant, avec un taux de chômage stagnant autour de 25 % pour les moins de 25 ans. Ballottés de stages en CDD, beaucoup de jeunes courent après un CDI. Et représentent la classe d’âge dont le pouvoir d’achat, entre 1978 et 2010, a le moins augmenté, selon une récente étude du quotidien britannique The Guardian.

La recherche d’un toit n’est pas plus aisée. Sept sur dix rencontrent des difficultés à trouver un logement, d’après l’Afev. Un phénomène qui pousse un tiers d’entre eux à devenir des «Tanguy» et n’ont pas les moyens de partir de chez leurs parents. Sans compter les étudiants qui, pour moitié, se soignent seuls pour ne pas à avoir à payer une consultation médicale. Autant d’impasses qui poussent les manifestants à brandir aujourd’hui des slogans comme  «On vaut mieux que ça».

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Ces préoccupations montrent qu’ils «n’entendent changer ni la vie ni le monde», ajoute Michel Fize. Car si leurs aînés se sont battus pour les libertés, en 1968, ou encore pour les droits des femmes, les jeunes n’ont aujourd’hui «plus d’idéologie alternative à défendre en dehors du libéralisme». Ils ont suivi la mutation de la France, qui est passée d’un système collectif à l’individualisme général, note le spécialiste. Et veulent, tout naturellement, satisfaire leurs intérêts personnels.
 
En face, les institutions politiques peinent à convaincre. Elles inspirent confiance à moins de deux jeunes français sur dix. D’où cette propension à s’abstenir massivement dans les urnes, et cette impression générale d’être «abandonnés face à leur destin», souligne Michel Fize. Un destin qui, de surcroît, apparaît en pointillé.

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