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Appels fantaisistes et "appels de poche": les pompiers voient rouge

Un pompier à un centre d'appel à Paris, le 19 novembre 2013 [François Guillot / AFP] Un pompier à un centre d'appel à Paris, le 19 novembre 2013 [François Guillot / AFP]

Blagues enfantines, sollicitations fantaisistes, appels intempestifs de portables glissés dans des poches ou des sacs à main: les pompiers de Paris perdent un temps précieux avec un nombre croissant d'appels qui ne servent à rien et ils sont bien déterminés à y mettre fin.

Pull bleu marine et casque micro sur la tête, Laurent, opérateur des pompiers de Paris, est bien calé dans son grand fauteuil noir, au milieu du centre de traitement des appels (CTA) du QG des pompiers porte Champerret.

Devant lui, sur le bureau blanc rutilant de cet espace ultra-moderne mis en service le 11 novembre 2011, trois écrans d'ordinateur et un compagnon de travail qu'il ne ménage pas: son téléphone.

Un hamster bloqué derrière la cuisinière

Premier coup de téléphone, en ce mardi glacé de novembre: "urgence pompier j'écoute ?" Le téléphone grésille fort. Laurent a beau se répéter, pas de voix au bout du fil. Verdict: "c'est de la pollution".

Deuxième coup de fil. Pas de voix mais on entend une télévision en fond sonore. "Urgence pompiers j'écoute?". Rien. "C'est de la pollution".

De la "pollution" ou un "appel de poche" passé involontairement à partir d'un téléphone portable. Les anglo-saxons parlent de "pocket call". Ils sont passés via le 112, numéro d'urgence européen créé en 1996 qui tombe, à Paris, chez les pompiers. Leur nombre a explosé avec la multiplication récente des smartphones.

Un pompier dans un centre d'appel, le 19 novembre 2013 à Paris [François Guillot / AFP]
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Un pompier dans un centre d'appel, le 19 novembre 2013 à Paris

Pour le troisième coup de fil, un homme parle enfin: "bonjour c'est SFR, je voulais vérifier que la puce était bien réglée sur Paris". L'opérateur est agacé mais reste calme: "c'est un numéro d'urgence". Il dit qu'il reçoit 10 coups de fil comme ça par jour.

Quatrième coup de fil: rien. Pareil pour le 5e. Pour le 6e coup de fil, une femme parle: "allo, c'est bien la police ?". Comme les portables mal lunés, la dame a appelé le 112 sans savoir qu'elle allait tomber chez les pompiers.

A son 7e appel, Laurent va enfin faire son métier: une vieille dame appelle parce que son mari est tombé chez lui. Un camion des pompiers est envoyé sur place.

Suivront d'autres "appels de poche", un appel test de secouristes de la gare Saint-Lazare, l'appel mécanique d'un téléphone fax...

"Ce qui est très difficile", dit l'opérateur, "c'est que vous pouvez avoir cinq pollutions d'affilée, puis un enfant qui fait une blague et à la fin une maman paniquée parce que son bébé a fait un arrêt cardiaque"... "Ça m'est arrivé ce matin", dit-il, visiblement touché.

69% des appels au 112 sont involontaires

Sur les 6.000 appels que les pompiers de Paris reçoivent chaque jour, seulement un quart vont générer un déplacement des pompiers. Autrement dit, les trois quarts ne sont pas utiles.

Les pompiers racontent à l'envi cet appel pour un hamster coincé derrière une cuisinière, ces personnes psychologiquement fragiles qui appellent mille fois dans le mois ou ces citoyens lambda qui font croire qu'il y a un danger pour que les pompiers viennent ouvrir leur porte d'entrée. Dans de très rares cas, les pompiers portent plainte.

Plus étonnant, sur ces 6.000 appels, 60% sont passés via le 112. Or, 69% des appels reçus via le 112 sont des appels de poche sans interlocuteur !

"A cause de tous ces appels", explique le commandant Stéphane Raclot, en charge du centre opérationnel, "j'ai en permanence deux ou trois opérateurs qui ne peuvent pas répondre aux vrais appels de détresse, tout ça a un coût".

"Nous sensibilisons les constructeurs et il faut sensibiliser les citoyens", dit-il à propos des "pocket call". Il annonce aussi que les pompiers vont porter plainte plus souvent en cas d'appel malveillant. "C'est une nécessité pour rester efficace. Il faut le rappeler: en cas d'arrêt cardiaque on n'a que cinq minutes".

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