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Laguiole compte sur la loi consommation pour protéger enfin son couteau

Fabrication de couteaux Laguiole, le 21 septembre 2012 [Remy Gabalda / AFP/Archives] Fabrication de couteaux Laguiole, le 21 septembre 2012 [Remy Gabalda / AFP/Archives]

Laguiole, au bord du plateau de l'Aubrac, se réjouit du projet de loi sur la consommation qui devrait lui permettre de protéger enfin son fameux couteau par une "Indication Géographique (IG)".

"Le projet intègre bien la création d'une IG pour les produits manufacturés, véritable pendant de l'IGP (Indication Géographique Protégée) européenne des produits alimentaires, comme le Roquefort ou notre fromage Laguiole", relève avec satisfaction le maire (DVD) de ce village de 1.300 habitants du nord-Aveyron.

Vincent Alazard, comme le patron de la "Forge de Laguiole", Thierry Moysset, "premier producteur laguiolais du couteau de Laguiole" s'insurgent depuis des années contre la multiplication en toute impunité des "Laguiole" asiatiques ou autres.

Le maire se bat aussi pour que sa commune retrouve "la maîtrise de l'usage de son nom" dont elle est privée depuis qu'un chef d'entreprise parisien Gilbert Szajner, il y a vingt ans, en a fait une marque déposée, reconnue par la justice pour 36 autres catégories de produits, du barbecue au linge de maison.

"Le couteau, nous avons le droit de le commercialiser mais sans aucune légitimité particulière, et pour tous les autres produits, c'est nous les contrefacteurs: M. Szajner nous a même interdit d'utiliser le nouveau logo de la commune", souligne M. Alazard.

La commune a perdu en justice en septembre 2012: c'est le couteau, repliable, avec son manche en corne et sa forme effilée, qui est connu, pas la commune, a tranché en substance le TGI de Paris.

Thierry Moysset le 21 septembre 2012 devant l'usine de couteaux à Laguiole [Remy Gabalda / AFP/Archives]
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Thierry Moysset le 21 septembre 2012 devant l'usine de couteaux à Laguiole

C'était vexant pour les Laguiolais, qui comptent pourtant parmi eux un restaurateur trois étoiles, Michel Bras", souligne M. Alazard. Pour protester, les élus ont "débaptisé la commune et démonté le panneau d'entrée du village", rappelle le maire, qui garde le fameux panneau dans son bureau.

Élus et industriels estiment avoir été "entendus par la ministre de l'artisanat Sylvia Pinel".

"Le loi devrait bientôt attribuer un signe officiel de qualité aux couteaux de Laguiole faits à Laguiole, validé par l'Institut national de la propriété intellectuelle (INPI), gravé dans la masse, et prévoir un cahier des charges aussi proche que possible des IGP alimentaires européennes", souligne-t-il.

Au cabinet de Mme Pinel, on confirme que la ministre a rencontré le commissaire européen au marché intérieur Michel Barnier, et ses homologues roumain, grec et espagnol, pour préparer une législation européenne.

Le patron de la Forge de Laguiole, qui revient de Bruxelles, estime qu'une proposition de loi européenne pourrait être élaborée d'ici la fin 2013. Face au texte français, il se dit "content, confiant, mais vigilant", car échaudé par "le projet avorté" du gouvernement Fillon fin 2011.

Les fameux couteaux Lagiole présentés le 21 septembre 2012 dans une boutique de la commune du même nom [Remy Gabalda / AFP/Archives]
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Les fameux couteaux Lagiole présentés le 21 septembre 2012 dans une boutique de la commune du même nom

Pudiquement, le maire explique que le texte "ne tranchait pas sur la possibilité pour une commune de déposer une IG sur un produit faisant déjà l'objet d'une marque déposée". Il prend acte de l'engagement de Mme Pinel de "mettre en place un système d'alerte pour qu'une commune dont le nom fait l'objet d'un dépôt de marque soit immédiatement en mesure de réagir".

"Pour nous, une marque ne peut s'opposer à l'intérêt collectif, il faut qu'une commune puisse la surmonter", soutient de son côté M. Moysset, fort d'une centaine de salariés hautement qualifiés.

Le patron et les élus estiment que l'enjeu du combat les dépasse largement.

"Il y aura encore des +Laguiole+ asiatiques, mais avec l'IG, on sera le produit de référence, cela incitera à relocaliser de l'emploi à Laguiole pour l'obtenir" estime M. Alazard. Cela vaudra aussi pour le savon de Marseille ou la porcelaine de Limoges, selon lui. "L'ultralibéralisme pousse au tout générique, mais nos achats font nos emplois" renchérit M. Moysset qui s'est déjà attelé à réunir ses six confrères de Laguiole en collectif professionnel, seul habilité à définir la future zone géographique, l'acier et la corne à utiliser, ainsi que les méthodes de production caractérisant la fameuse "Indication Géographique".

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