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Torture sous Khadafi : un juge va enquêter sur Amesys

Mouammar Kadhafi à Tripoli en avril 2011, quelques mois avant sa mort pendant la révolution libyenne [Joseph Eid / AFP/Archives] Mouammar Kadhafi à Tripoli en avril 2011, quelques mois avant sa mort pendant la révolution libyenne [Joseph Eid / AFP/Archives]

Un juge d'instruction va pouvoir enquêter pour déterminer si la société Amesys, filiale de Bull, s'est rendue complice de torture en Libye en fournissant un matériel de surveillance de communications en 2007 au régime de l'ex-dirigeant libyen, Mouammar Kadhafi.

Le parquet de Paris avait fait appel de la décision prise en mai par une juge du pôle génocides et crimes contre l'humanité d'enquêter sur les accusations de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et la Ligue des Droits de l'homme (LDH) de complicité de torture contre Amesys.

Cet appel a été rejeté mardi par la cour d'appel de Paris et l'instruction va pouvoir entrer dans une phase active, a dit Me Patrick Baudouin, avocat et président d'honneur de la FIDH, à l'AFP.

Des journalistes du Wall Street Journal (WSJ) étaient entrés le 29 août 2011, lors de la libération de Tripoli, dans le bâtiment où le régime libyen surveillait les communications. Ils y avaient trouvé des manuels rédigés en anglais portant le logo d'Amesys, filiale de Bull et des retranscriptions de conversations privées sur internet.

Après cette découverte, la FIDH et la LDH avaient déposé en octobre 2011 une plainte pour complicité de torture visant Amesys et en particulier la vente et le déploiement de son système de surveillance Eagle au régime de Kadhafi en 2007.

Pour les plaignants, ce système "permet d'intercepter l'ensemble des communications online et offline à l'échelle d'une nation mais également de traiter les informations recueillies afin de cibler, parmi la population civile, un groupe selon des critères définis par l'utilisation du système".

Les deux ONG estiment aussi que la société ne pouvait ignorer l'utilisation de ce système par le régime libyen.

Cinq Libyens prêts à venir témoigner

L'avocat Patrick Baudouin (g) lors d'un procès en mai 2012 à Paris [Bertrand Langlois / AFP/Archives]
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L'avocat Patrick Baudouin (g) lors d'un procès en mai 2012 à Paris
 

Amesys avait reconnu en septembre 2011 avoir signé quatre ans plus tôt avec les autorités libyennes un contrat mais en assurant qu'il "concernait la mise à disposition d'un matériel d'analyse portant sur une fraction des connexions internet existantes, soit quelques milliers".

Selon la société, le contrat avait été signé dans un contexte de "rapprochement diplomatique" avec la Libye, en référence à la visite de Kadhafi en France fin 2007, Amesys contestant "très fermement l'accusation de complicité de torture.

Amesys a rappelé mardi avoir cédé définitivement les activités du logiciel Eagle fin novembre.

Pour Me Baudouin, l'enquête passe désormais par l'audition des dirigeants d'Amesys mais également par le déplacement du juge en Libye "pour qu'il puisse se faire expliquer comment les autorités libyennes prenaient instruction de l'utilisation du matériel d'Amesys".

Parallèlement, cinq victimes libyennes se sont constituées parties civiles le 1O janvier et sont prêtes à venir témoigner devant le juge, selon l'avocat.

"Elles avaient été arrêtées et torturées par le régime en place et leur arrestation était directement liée à leur surveillance par le système livré par Amesys", a dit Me Baudouin.

Ces cinq personnes sont une femme et quatre hommes, des bloggueurs opposants au régime Kadhafi installés à Tripoli, Benghazi et Misrata, a ajouté Me Baudouin.

En outre, six autres Libyens se sont constitués parties civiles et sont également disposés à être entendus, a dit à l'AFP leur avocat, Me William Bourdon, pour qui il est nécessaire que de nombreux témoins soient entendus en Libye.

Mouammar Kadhafi est mort le 20 octobre 2011 et son régime renversé après l'intervention de la France et de la Grande-Bretagne en soutien de la rébellion.

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