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Le Sénat pour une agence de notation privée européenne

Une carte de France surmontée de deux "A" et d'un "+"[AFP/Archives]

Le Sénat défend la création d'une agence de notation privée européenne de dimension mondiale afin de faire contrepoids aux agences anglo-saxonnes, très décriées ces dernières années pour ne pas avoir su anticiper faillites d'entreprises et crises économiques majeures.

Dans un volumineux publié mardi, la mission d'information de la Haute assemblée sur les agences de notation dénonce le "duopole écrasant" de Standard and Poor's et Moody's, les deux mastodontes anglo-saxons accusés de faire la pluie et le beau temps avec pour seul "challenger" Fitch Ratings.

"Compte tenu de la place prise par la notation dans le système financier mondial, il est hautement souhaitable de faire émerger un grand acteur européen de la notation", estime cette mission, qui s'est penchée depuis le 13 mars sur le fonctionnement, la méthodologie et la crédibilité des agences.

"Il n'est pas admissible que la première puissance économique du monde (ndlr, l'Union européenne) ne puisse faire entendre sa voix singulière dans l'univers de la notation", martèlent les sénateurs dans ce document de 200 pages.

Le nouvel acteur qu'ils appellent de leurs voeux "permettrait à l'Europe de bénéficier d'une part plus importante du marché lucratif de la notation", estiment-ils.

Surtout, il permettrait "aux émetteurs européens d'être notés par une agence partageant avec eux les mêmes codes et d'éviter ainsi les biais qui peuvent exister chez les agences d'origine anglo-saxonne", ajoutent-ils.

La mission sénatoriale, mise sur pied après la perte par la France de son précieux triple A (ndlr, la meilleure note possible) auprès de Standard and Poor's, analyse dans le détail les "" de la notation ces dernières années: faillites non prévues de Lehman Brothers, Parmalat ou Enron, crise grecque, etc.

Non à une agence publique

A partir des dérives ou faiblesses constatées, elle émet une trentaine de recommandations pour se "désintoxiquer" des trois grandes agences devenues des "quasi-régulateurs", les responsabiliser, en contrôler la gestion des ressources humaines.

Avant d'arriver à ces conclusions, la mission présidée par la sénatrice PS des Pyrénées-Atlantiques Frédérique Espagnac, avec pour rapporteur le sénateur centriste du Gers Aymeri de Montesquiou, a organisé 21 tables rondes, épluché 30.000 pages de documents d'agences et effectué des déplacements à New York, Washington, Londres et Bruxelles.

Au final, le rapport écarte l'option d'une agence européenne publique, qui susciterait la "méfiance" des investisseurs internationaux et risquerait de ne pas obtenir l'accréditation de la SEC, le régulateur américain, indispensable pour jouer un rôle mondial.

"Pour ce qui concerne l'initiative privée, le Sénat a pris connaissance avec grand intérêt des projets ambitieux portés par le cabinet de conseil allemand Roland Berger ou par la fondation Bertelsmann".

Le premier, "sans doute le plus avancé en Europe", a déjà récolté 130 millions d'euros d'engagements d'investisseurs, sur 300 millions jugés nécessaires. L'agence aurait le statut de fondation privée à but non lucratif.

Le projet Bertelsmann se limiterait lui à noter la dette des Etats et des organisations internationales en tenant compte de critères tels que la cohésion sociale, l'emploi, la recherche et l'innovation, l'éducation, le développement durable.

Les sénateurs suggèrent que la Commission européenne lance "un appel à projets pour encourager une ou plusieurs initiatives privées tendant à la création d'une nouvelle agence européenne de taille mondiale" comme elle le fait dans la recherche et l'innovation.

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