En direct
A suivre

Violences sexuelles dans le cinéma : la demande de commission d'enquête parlementaire requise par Judith Godrèche portée au Sénat

Auditionnée ce jeudi par les délégations aux droits des enfants et aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, Judith Godrèche a livré une parole puissante et sans détours. [REUTERS/Benoit Tessier]

Le groupe socialiste au Sénat a demandé ce jeudi la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les violences sexuelles et sexistes dans le cinéma, donnant corps à la requête de l'actrice Judith Godrèche, qui s'est exprimée ce même jour devant la délégation aux droits des enfants de l'Assemblée nationale.

Dans un courrier adressé au président du Sénat Gérard Larcher, consulté par l'AFP, le président du groupe Patrick Kanner sollicite la création, «en urgence», d'une commission d'enquête sur ce sujet, englobant également les domaines du spectacle vivant et des médias.

«Ce travail permettra de proposer les voies et moyens afin de lutter contre les violences sexuelles et sexistes, de mettre fin à un système destructeur, en particulier pour les artistes femmes et enfants, et de mieux les protéger et accompagner», écrit le chef de file socialiste.

L'actrice Judith Godrèche, qui a porté plainte pour viols sur mineure contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon, a demandé ce jeudi la création d'une commission d'enquête parlementaire sur le droit du travail dans le monde du cinéma et «les risques pour les enfants». 

«Sur qui doit-on compter pour s'assurer que dorénavant aucun enfant ne sera victime de violence sexuelle ou morale sur un plateau ou lors d'un casting ?», a lancé la réalisatrice, lors d'une audition devant la délégation aux droits des enfants de l'Assemblée nationale.

Briser le silence

«Allons-nous garder le silence ? Moi, je compte sur vous, je compte sur vous pour protéger les enfants, ne plus les livrer au cinéma sans aucune protection», a-t-elle ajouté. «Ce sont les mêmes systèmes que ceux de l'éducation, de la médecine, de l'édition, du sport par exemple, pour lequel vous avez ordonné une commission d'enquête.»

Judith Godrèche a conclu son propos liminaire en demandant aux députés de «prendre l'initiative d'une commission d'enquête sur le droit du travail dans le monde du cinéma et en particulier ses risques pour les femmes et les enfants».

«Quand, encore aujourd’hui, un homme balaie si facilement du revers de la main la parole d’un enfant qui se confie à la société dans l’espoir d’être entendu, quand un autre homme puissant viole inlassablement des mineures en toute impunité, quand les non-lieux se suivent et se ressemblent, quand la société du cinéma agresse, manipule et sadise les enfants depuis des décennies – tout cela devant un parterre d’aficionados conquis et silencieux – en pleine béatitude, sans l’ombre d’une révolte, d’un dégoût, d’un sursaut… Quand on s’adresse à des techniciennes comme à des sous-fifres, quand elles se font maltraiter et hurler dessus : ou puis-je trouver ces deux mots perdus en chemin : «les droits». Les droits. Les droits des femmes. Les droits des enfants. Le droit de dire non», a dit l'actrice dans une déclaration très forte, comme lors de chacune de ses prises de parole depuis son intervention à la cérémonie des Oscars, ou il y a deux semaines au Sénat, rappelant que les violences qui se jouent dans le cinéma sont les mêmes à l'œuvre dans la société. 

«La société incestueuse du cinéma n’est que le reflet de notre société. Les mêmes mécanismes sont à l’œuvre…», a-t-elle souligné, militant pour que les victimes soient enfin écoutées. 

La présidente de la Délégation aux droits des femmes, Véronique Riotton, a ainsi déclaré : «Donner la parole aux concernées me paraît essentiel pour poser des mots sur les stratégies des auteurs et alimenter les réflexions des parlementaires. Il est de notre responsabilité collective de les écouter et d’agir.»

A 51 ans, la réalisatrice est devenue un fer de lance du mouvement #MeToo en France, après avoir porté plainte début février contre Jacques Doillon, mais aussi contre le réalisateur Benoît Jacquot pour des violences sexuelles et physiques qui remonteraient à son adolescence.

Une enquête préliminaire a été ouverte à Paris sur ces accusations de viol sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité, viol, violences par concubin, et agression sexuelle sur mineur de plus de 15 ans par personne ayant autorité. Les deux réalisateurs ont réfuté par la voix de leurs avocats respectifs les accusations lancées contre eux. 

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités