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Le carnet Moleskine : le jardin secret des artistes

Le Moleskine est le carnet légendaire des artistes et des intellectuels européens des deux derniers siècles.[CC/Grace5mith]

Caché dans les poches des plus grands artistes, le carnet Moleskine parcourt le monde depuis plus de 200 ans. Il est devenu l’indispensable compagnon de route. Voué à la disparition à la fin des années 1980, le carnet est sauvé in extremis par une entreprise milanaise, Modo & Modo. Depuis son grand retour, il se vend près de 5 millions de carnets Moleskine à travers le monde chaque année.

 

Archives – Article publié le 10 janvier 2008

 

De Vincent Van Gogh à Henri Matisse, de Pablo Picasso à Ernest Hemingway, de Louis-Ferdinand Céline à Stéphane Mallarmé, de Victor Hugo à Guillaume Apollinaire, nombreux sont les artistes et intellectuels à avoir griffonné et noirci les pages blanches des carnets Moleskine.

Caractérisés par une couverture garnie d’une toile de coton imitant le cuir et par un élastique destiné à les maintenir fermés, les célèbres calepins regorgent de croquis, d’histoires et d’aventures rocambolesques dessinées ou relatées au cours de divers voyages. Ces porteurs de souvenirs investissent les vitrines des plus belles librairies et les présentoirs de nombreuses boutiques de musées. Les carnets Moleskine évoquent avec nostalgie les brasseries et les lieux de création de la période de l’entre-deux-guerres.

 

Un carnet en peau de taupe

Le succès du précieux carnet provient de sa matière : la moleskine. Issu des termes anglais «mole» et «skin», moleskine signifie «peau de taupe» dans la langue de Shakespeare. Le carnet noir relié doit sa notoriété à un écrivain anglais, Bruce Chatwin. Ce dernier avait pour habitude de collectionner les livrets moleskine, qu’il se procurait dans une petite papeterie parisienne située rue de l’Ancienne-Comédie, près du Carrefour de l’Odéon.

Jamais il ne s’est séparé de son carnet au cours de ses nombreux voyages dans les années 1960 et 1970. Avant d’écrire sur les pages, il prenait soin de les numéroter. Sur la première d’entre elles, il inscrivait son nom et son adresse en cas de perte. Selon la légende, Chatwin offrait une récompense à qui retrouverait l’un de ses carnets. Il n’en aurait égaré que deux en vingt ans. Le romancier anglais vantait à tous ses amis romanciers ou poètes les mérites de cet objet unique. Le simple carnet de notes, utilisé notamment pendant la révolution industrielle, est devenu culte un siècle plus tard.

 

Vidéo : Interview de la veuve de Bruce Chatwin sur sa passion des carnets moleskine

 

 

La mort annoncée du calepin

Mais son succès s’étiole peu à peu. «Le vrai Moleskine n’est plus», déclare tristement à l’écrivain britannique la gérante de la papeterie rue de l’Ancienne-Comédie. En effet, les héritiers de la petite entreprise familiale de Tours, dernier fabricant du carnet, décident de cesser l’activité en 1986 après le décès du propriétaire.

Très affecté par cette révélation, Bruce Chatwin part à la conquête du dernier carnet Moleskine. Il débute une grande collection et acquiert tous les calepins qu’il peut trouver sur le marché. Pas un carnet ne lui échappe. Malgré tous ses efforts, l’écrivain voyageur ne parvient pas à sauver son carnet fétiche.

Le Moleskine connaît ses dernières heures. Il n’est plus distribué et se retrouve rangé dans les cartons ou abandonné sur les étagères des bibliothèques. Une page se tourne dans l’histoire du carnet, au grand dam de nombreux artistes et intellectuels qui avaient fait du Moleskine le témoin privilégié de leur existence.

 

La renaissance du carnet Moleskine

A la fin du XXe siècle, Francesco Franceschi et Mario Baruzzi, deux entrepreneurs italiens s’intéressent au carnet de Chatwin. A la tête de Modo & Modo, société milanaise spécialisée dans la production d’accessoires de voyage, ils décident, en 1998, avec l’aide de deux autres collaborateurs, de reprendre la commercialisation de cet objet mythique. Le Moleskine devient ainsi une marque déposée.

Depuis près d’une décennie, l’entreprise décline le carnet de notes en de nombreux modèles. Le Moleskine classique a laissé place aux carnets d’adresses, agendas, carnets à pochettes, en format de poche ou en grande taille, dans les rayons des papeteries. Face à une demande croissante, la société italienne délocalise la production. Le carnet Moleskine est désormais fabriqué en Chine et en Corée puis assemblé en Italie, avant d’être distribué dans plus de 9 000 points de vente à travers le monde.

 

Le Moleskine débarque sur le web

Les sites consacrés au mythique carnet se multiplient sur la Toile. Les aficionados du Moleskine débattent de la qualité du calepin au cours de discussions organisées sur les forums et sur les blogs. Après avoir créé le site officiel de la marque, http://www.moleskine.com, la société Modo & Modo encourage les communautés virtuelles à échanger leurs idées, dans le but d’améliorer ses carnets. Les idées les plus incongrues naissent sur le Web, notamment le Moleskine City Notebook et le Wandering Moleskine Project.

L’idée d’un carnet errant à travers le monde est présentée sur le site http://www.moleskinerie.com. Le principe du Wandering Moleskine Project est simple. Un amoureux de l’écriture et du papier reçoit une page du carnet. Il la remplit puis retourne le précieux objet à un nouveau participant. Les pages illustrées sont également mises en ligne sur le Web. Des dizaines de Moleskine circulent ainsi dans le monde entier via la poste. De Paris à New York, de Tokyo à Rome, de Londres à Sydney, tous les amoureux des lettres possèdent un exemplaire du célèbre Moleskine.

 

Vidéo : Le Tokyo City Notebook

 

 

Moleskine City Notebook, guide à rédiger soi-même

Devenir l’auteur de son propre guide de voyage, tel est l’objectif du dernier né de la marque : le Moleskine City Notebook. Barcelone, Berlin, Londres, Paris, Rome, Milan, New York sont autant de destinations explorées dans ces nouveaux guides. Un carnet pour un lieu de la planète. Une couleur pour un continent.

Le Moleskine se compose de soixante-seize pages vierges destinées à récolter des informations et à annoter les anecdotes de voyages et les endroits incontournables de la ville. Le City Notebook comporte également une carte de la ville, enrichie de cartes géographiques définies par zone, un plan des lignes de métro nécessaires au bon déroulement des visites, l’ensemble des rues répertoriées par liste alphabétique et des informations pratiques sur les différents sites touristiques ou culturels. A noter : du papier-calque est à disposition dans le livret pour permettre à chacun de réaliser ses propres feuilles de route et de tracer ses plans. Une bonne idée de cadeau pour tous les globetrotters.

Pour les adeptes du Web, la société Modo & Modo a créé le site www.moleskinecity.com. Ce réseau en ligne regroupe sur de nombreux blogs l’ensemble des informations des City Notebooks. Chacun peut ainsi retrouver les bons plans et les photographies des destinations choisies.

 

Voir aussi sur directmatin.fr : Qui était ces écrivains amoureux du carnet Moleskine ?

 

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