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Dopage : l'enquête du Sénat qui sent la poudre

Le directeur de l'agence américaine antidopage, Travis Tygart, lors de son audition devant la commission du Sénat français, le 25 avril 2013 à Paris [Jacquesdemarthon / AFP]

Depuis le 27 février dernier, sportifs, dirigeants, médecins et anciens ministres, défilent devant les sénateurs de la commission d'enquête sur l'efficacité de la lutte contre le dopage. Et à mesure que les travaux avancent, les langues se délient de plus en plus.

Le sujet du dopage est tabou. Mais comme l'indique le sénateur Jean-Jacques Lozach, rapporteur PS de la commission, audition après audition, l'enquête permet de commencer "à lever le couvercle de la marmite".

Tout a commencé le 20 mars dernier, avec les déclarations de Marie-Georges Buffet, l'ancienne ministre des Sports de Lionel Jospin. Sous serment, elle confie avoir subi "des pressions de toutes sortes" au sujet d’un contrôle antidopage mené sur les Bleus avant le Mondial 98.

 

Plus de dopage dans le rugby que dans le cyclisme

Le 27 mars, c'est au tour de Françoise Lasne, la directrice du département des analyses de l'Agence française de lutte contre le dopage, qui bat en brèche une idée reçue. Non ce n'est pas le cyclisme qui est le plus sujet au dopage… mais le rugby. Selon elle les cyclistes sont beaucoup plus propres que les rugbymen ou encore les footballeurs.

"Je me suis intéressée aux sports dans lesquels au moins 400 échantillons nous sont parvenus en 2012 afin d'avoir des statistiques fiables. Si nous tenons compte de toutes les molécules interdites présentes sur la liste de l'Agence mondiale antidopage, le sport qui donne le plus haut pourcentage est le rugby. Viennent ensuite le football puis l'athlétisme, le triathlon, le basket-ball, le cyclisme, le handball et la natation". La faute à des contrôles bien plus fréquents dans le cyclisme que dans les autres sports.

 

L'état d'esprit des jeunes sportifs

Le 18 avril, c'est l'ancien cycliste Erwann Menthéour qui y va de ses confidences sur les mœurs et les ambitions des jeunes sportifs : "s'attaquer au dopage, c'est s'attaquer à la nature de l'homme. A 20 ans, on m'aurait dit de boire un litre d'essence pour gagner le Tour de France, j'en aurais bu deux ou trois pour en gagner plusieurs" lance-t-il aux sénateurs.

Le même s'insurge d'ailleurs contre le passe-droit accordé à Didier Deschampslui aussi auditionné par la commission d'enquête le 24 avril, mais à huis clos, c’est-à-dire sans la presse et sans que ses propos soient divulgués. Alors même que des soupçons de dopage à l'EPO pèsent sur lui lors de son passage à la Juventus de Turin au début des années 2000.

Une faveur qui agace ceux qui passent pour les seuls dopés. Dans une interview accordée au site Newsring, Erwann Menthéour affirme ainsi que le taux d'hématocrites du footballeur à l'époque était suffisamment important pour qu'il soit inquiété : "Avec des résultats comme ça, s'il avait pédalé, Deschamps aurait été suspendu pendant des mois, peut-être à vie. Parce que chez nous, on cherche, donc on trouve. Chez les autres, on ne cherche pas donc on ne trouve pas." Cinglant.

 

De l'autocensure ?

Mais d'une façon générale, les langues se délient à mesure que l'enquête avance. Même si ceux qui parlent craignent d'en dire trop. "On a parfois le sentiment que les personnes auditionnées se sont autocensurées, explique Jean-Jacques Lozach, elles se sont fixées des limites sur le côté scoop ou révélations, ayant peur de se mettre en danger par rapport à ce qu'elles représentent à l'intérieur des fédérations concernées, ou ne voulant pas se mettre en difficulté par rapport à d'autres sports".

A l'instar de Travis Tygart, le patron de l'agence américaine antidopage (USADA). Interrogé par les sénateurs pour savoir s'il disposait d'éléments probants sur une éventuelle protection de l'UCI à l'égard d'Armstrong il a seulement concédé qu'il y avait "tout un faisceau d'éléments qui suscitent des interrogations".

Un pavé de plus pour apprécier la réalité de la lutte contre le dopage. Sans doute pas le dernier. Les auditions vont se poursuivre jusqu'à la mi-juin. Le rapport final sera remis fin juillet.

 

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