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Dopage : Fuentes sur le banc des accusés

Le docteur Eufemiano Fuentes sortant d'un cabinet médical de Las Palmas le 15 décembre 2010 [Desiree Martin / AFP/Archives] Le docteur Eufemiano Fuentes sortant d'un cabinet médical de Las Palmas le 15 décembre 2010 [Desiree Martin / AFP/Archives]

Personnage central de l'affaire de dopage Puerto, Eufemiano Fuentes, docteur espagnol à la réputation sulfureuse, prend place lundi sur le banc des accusés au côté de quatre autres inculpés, pour répondre d'un délit contre la santé publique.

Accusé d'être le principal organisateur d'un réseau de dopage sanguin démantelé en mai 2006 par la Garde civile, ce médecin canarien de 57 ans est sans nul doute une des clefs de voûte de cette affaire, qui a abouti sur le plan sportif à des sanctions contre six cyclistes: l'Espagnol Valverde, les Allemands Ullrich et Jaksche, les Italiens Basso, Scarponi et Caruso (ce dernier ayant été blanchi par le TAS).

Un épais mystère entoure cet homme dont le nom est devenu synonyme d'éminence grise du sport depuis son arrestation à Madrid, le 23 mai 2006, et la découverte dans deux de ses domiciles madrilènes de quelque 200 poches de sang devant servir à des autotransfusions.

Personnage à l'aise sous les feux des médias, l'homme aime jouer de sa réputation de faiseur et dé-faiseur de rois. Mais il n'a jamais impliqué nommément aucun de ses clients - en tout cas publiquement.

Après le coup de filet de Puerto, Fuentes avait assuré que parmi ses clients figuraient, outre des cyclistes, des "athlètes, des joueurs de tennis et des footballeurs". Avant de se rétracter, révélant une autre facette de sa personnalité, versatile et secrète.

Pourtant, compte tenu de son parcours dans le sport de haut niveau, l'homme en sait forcément beaucoup - et pas seulement en matière de cyclisme.

Si son nom reste associé, affaire Puerto oblige, à la petite reine , Fuentes, spécialisé au départ en gynécologie, a commencé sa carrière de médecin du sport par l'athlétisme.

Lui-même ancien coureur de 400 mètres haies, il avait été mandaté dans les années 1980 par la fédération d'athlétisme espagnole pour "faire progresser" ce sport en Espagne.

Une mission qui, à l'époque, l'avait mené dans les pays de l'ancien bloc de l'Est, d'où il est revenu, selon ses propres mots, avec "des méthodes d'entraînement et d'accompagnement du sportif novatrices".

Le médecin espagnol Eufemiano Fuentes le 15 décembre 2010 à Las Palamas [Desiree Martin / AFP/Archives]
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Le médecin espagnol Eufemiano Fuentes le 15 décembre 2010 à Las Palamas
 

C'est via l'athlétisme que Fuentes entrera ensuite dans le milieu du cyclisme: médecin des équipes Orbea, ONCE, Amaya, Kelme, il se forge alors une solide réputation de praticien-miracle du sport. Au passage, le Canarien touche aussi au football, devenant officiellement médecin de Las Palmas en 2001.

Son "coeur de métier" reste toutefois le cyclisme: en 2004, il croise notamment comme médecin-chef de Kelme la route de Jesus Manzano, coureur qui dénonce à l'époque les pratiques dopantes de son équipe.

Les confessions du coureur, émaillées d'autotransfusions faites dans des conditions déplorables, de poches de sang frelatées réinjectées aux coureurs au risque de leur vie, choquent un pays alors pas du tout sensibilisé au dopage et amèneront justement la police espagnole à lancer l'opération Puerto.

Fuentes réfute pourtant des récits comme celui de Manzano et s'est toujours posé en champion de la santé des sportifs. Et pour cause: il doit se défendre d'un délit contre la santé publique, pas d'un délit pour incitation au dopage.

"Je n'ai commis aucun délit contre la santé publique", clamait-il ainsi déjà dans Le Monde du 8 décembre 2006.

"En 29 ans d'exercice professionnel, aucun de mes clients n'a eu le moindre problème de santé (...) Ce qui est dangereux pour la santé des sportifs, ce sont les parcours criminels que dessinent les organisateurs d'épreuves de haut niveau au bénéfice du spectacle. (...) Moi, je me consacre à la protection de la santé des sportifs qui font appel à moi."

Une intervention typique de cet homme friand de belles montres et de costumes tape à l'oeil. Et le médecin de passer allègrement sous silence les effets inconnus de l'hormone de croissance ou d'autres substances sur l'organisme humain trouvées dans ses appartements.

Reste à savoir si, aux yeux de la justice, Fuentes s'en tirera avec ce rôle de chevalier blanc ou tombera, condamné comme un "docteur Mabuse" du sport.

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