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"Malala Inc.": un message puissant servi par une forte communication

La jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, le 10 octobre 2013 à New York [Emmanuel Dunand / AFP] La jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, le 10 octobre 2013 à New York [Emmanuel Dunand / AFP]

La jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, propulsée militante internationale pour le droit à l'éducation après avoir survécu à une attaque des talibans, dispose d'une formidable machine de communication, qui a contribué à diffuser son message et à faire d'elle une star.

A 16 ans seulement, l'adolescente qui vit désormais au Royaume-Uni s'est hissée dans la liste des favoris pour le prix Nobel de la paix. Elle s'est exprimée à la tribune des Nations unies, a publié son autobiographie et a été invitée par la reine Elizabeth II au palais de Buckingham.

Des honneurs dignes d'un chef d'Etat qui lui valent d'être assaillie de demandes d'interviews du monde entier.

Son message a fait le tour du monde, d'autant qu'il est relayé par l'une des plus grandes entreprises de relations publiques, Edelman, qui compte parmi ses clients les géants Starbucks et Microsoft. La firme représente gracieusement Malala et sa famille depuis novembre 2012.

C'est le 9 octobre 2012, dans la vallée de Swat (nord-ouest du Pakistan), que la vie de Malala bascule. Des talibans font irruption dans le bus qui la ramène de l'école. L'un d'eux demande laquelle des adolescentes est Malala, la gamine qui écrit un blog sur le site de la BBC dénonçant la privation d'école par les talibans. Il lui tire une balle dans le crâne. Elle survit miraculeusement et devient instantanément une figure planétaire du droit des filles à l'éducation.

Face à cet emballement médiatique, Edelman a mis à la disposition de la jeune fille une équipe de cinq personnes. Il s'agit "principalement de faire office de bureau de presse pour Malala" et de "conseiller sa famille sur la façon de gérer l'énorme intérêt médiatique de la campagne de Malala", explique une porte-parole d'Edelman.

Il faut tabler actuellement sur deux mois d'attente pour obtenir une interview de la jeune fille, précise Edelman, qui affirme offrir gratuitement ses services à Malala.

La jeune militante bénéficie aussi de l'attention bienveillante de l'ancien Premier ministre britannique Gordon Brown, envoyé spécial de l'ONU chargé de l'éducation. Il lui a rendu visite à l'hôpital de Birmingham (ouest de l'Angleterre) où elle était en soins intensifs et a pris fait et cause pour son engagement.

C'est lui qui a organisé la prise de parole de la jeune fille devant les Nations unies, où elle a lancé un vibrant appel à "l'éducation pour tous les enfants", en juillet 2013.

"Il a une relation assez proche avec la famille de Malala, en particulier avec son père", explique à l'AFP une source proche de Gordon Brown.

A la demande du père de Malala, Gordon Brown a aussi personnellement contacté un associé de la société de conseil McKinsey, dont l'une des représentantes, Shiza Shahid, amie de la famille Yousafzai, préside le fonds Malala en faveur de l'éducation des filles.

Un fonds, qui a reçu le soutien prestigieux et hautement médiatique de l'actrice Angelina Jolie.

Devant cette hyper-médiatisation, certains des détracteurs de Malala au Pakistan accusent l'adolescente d'être une marionnette de l'Occident. D'autres s'inquiètent de cette énorme exposition médiatique.

"Cela pourrait être un fardeau. Imposer cela à un enfant pourrait apparaître comme contraire à l'éthique", avance Tilman Brück, à la tête de l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).

Mais ceux qui la côtoient rejettent catégoriquement ces accusations. "Avant de la rencontrer, j'étais inquiet des attentes que l'on plaçait en elle", raconte à l'AFP le peintre britannique Jonathan Yeo, qui a réalisé son portrait pour la National Gallery à Londres, en septembre.

"Mais mes doutes ont été balayés, poursuit-il. Il n'y a personne (dans son entourage) qui ait des motivations cachées, tout l'argent va au fonds, il n'y a pas d'agenda politique, elle est dévouée à son pays et croit toujours" en l'islam.

Malala elle-même insiste sur le fait que ce cirque médiatique n'a pas modifié sa personnalité. "Mon monde a changé, mais pas moi", affirme-t-elle dans son autobiographie "Je suis Malala".

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