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Nord Stream : un an après, le sabotage des gazoducs n'est toujours pas élucidé

Les gazoducs Nord Stream 1 et 2 ont subi 4 fuites au total. Cela avait créé des bouillonnements allant de 200 à 1.000 mètres de diamètre dans la mer Baltique. [Handout / DANISH DEFENCE / AFP]

Survenu le 26 septembre 2022, le sabotage des gazoducs Nord Stream fait toujours l'objet de plusieurs enquêtes. Les responsables ne sont toujours pas clairement identifiés.

Un an après et malgré trois enquêtes judiciaires distinctes, le sabotage des gazoducs Nord Stream reste une énigme. Le 26 septembre 2022, à quelques heures d'intervalle, quatre énormes fuites de gaz précédées d'explosions sous-marines s'étaient produites sur Nord Stream 1 et 2. Un sabotage survenu dans un contexte hautement sensible, lié à la guerre en Ukraine.

Sachant que ces gazoducs reliant la Russie à l'Allemagne acheminaient l'essentiel du gaz russe vers l'Europe, leur attaque constitue un événement géopolitique majeur. A l'époque, Nord stream 1 était au coeur d'un bras de fer énergétique entre les pays européens soutiens de l'Ukraine et Moscou, qui avait cessé de livrer du gaz via cette conduite.

Nord Stream 2, lui, n'était encore jamais entré en service depuis la fin de sa construction fin 2021. Il était pourtant déjà source de conflit entre Berlin et Washington puisque les Etats-Unis s’opposaient depuis des années à ce gazoduc. Ils déploraient le fait qu’il passe par la mer Baltique mais pas par l’Ukraine, menaçant de priver ce pays d’une partie des revenus perçus sur le transit, mais aussi d’un moyen de pression sur Moscou.

Les fuites de gaz liées au sabotage se sont toutes produites dans les eaux internationales, au large de l'île danoise de Bornholm et des côtes sud de la Suède. Aussi, pas moins de trois enquêtes judiciaires ont été lancées séparément par l'Allemagne, la Suède et le Danemark pour tenter de faire la lumière sur les faits.

Pour l'heure, aucune n'a abouti, mais le procureur suédois Mats Ljungqvist a dit être «dans la phase finale» des investigations, espérant pouvoir rendre une décision d'ici à 2024. En avril, il avait affirmé que la «principale hypothèse» est qu'un Etat soit derrière le sabotage.

De nombreuses théories

Mais le parquet général allemand, lui, assure qu'il n'est «actuellement pas possible de faire des déclarations fiables» sur l'identité et les motivations des auteurs, pas plus que «sur la question d'un soutien étatique».

Certains médias d'investigation ont eux aussi lancé leurs propres enquêtes pour comprendre ce qui s'est joué le 26 septembre 2022. Dans ce contexte, les théories sont nombreuses.

Sur la base d'informations consultées par le renseignement américain, le New York Times a par exemple développé la thèse selon laquelle un «groupe pro-ukrainien» serait à l'origine du sabotage, mais sans implication du président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Sachant que le parquet allemand enquêtait sur un bateau soupçonné d'avoir acheminé des explosifs, les médias Spiegel et ZDF sont allés jusqu'à louer ce voilier de 15 mètres de long, l'Andromède, pour reconstituer le périple qu'un équipage ukrainien constitué selon eux de cinq hommes et d'une femme aurait effectué en partant du port allemand de Rostock jusqu'au large de l'île danoise de Bornholm.

Des fuites provenant des services secrets

En parallèle, un ancien officier de renseignement de la marine britannique a fait part au Spiegel de ses soupçons concernant un navire scientifique russe, le Sibiriakov. Le quotidien danois Information a quant à lui jeté son dévolu sur un autre navire russe, le SS-750, spécialisé dans les opérations sous-marines et présent dans la zone peu avant les explosions.

En juin, plusieurs médias avaient aussi affirmé que les services de renseignements militaires néerlandais avaient averti la CIA d'un projet ukrainien visant à faire sauter le gazoduc. En marge de ces différentes théories, l'Ukraine, la Russie et les Etats-Unis ont vigoureusement démenti toute implication.

Pour Christian Mölling, un expert du Conseil allemand des relations extérieures (DGPA), les fuites provenant des services secrets ne constituent toutefois «qu'une pièce du puzzle». «Il y a aussi des personnes vivant en Ukraine qui pourraient travailler pour les services secrets russes».

Andreas Umland, analyste au centre d'études sur l'Europe de l'Est de Stockholm, estime lui aussi qu'un scénario impliquant la Russie est «le plus probable». Rappelant que Moscou avait coupé les flux vers l'Europe en représailles présumées des sanctions occidentales, un sabotage a, selon lui, pu permettre de «faire d'une pierre deux coups».

D'une part débarrasser Gazprom, actionnaire majoritaire des gazoducs, des demandes de dédommagement de ses clients en invoquant un cas de «force majeure». D'autre part, faire porter le soupçon sur Kiev et «détruire la réputation de l'Ukraine». Une implication de Kiev dans ce sabotage serait en effet très délicate à gérer pour ses alliés occidentaux.

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