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La semaine de Philippe Labro : une embellie tant attendue, une tempête imprévue

Depuis le mercredi 19 mai, les Français peuvent renouer avec certaines de leurs habitudes favorites. [©BERTRAND GUAY / AFP]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour CNEWS, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

Mercredi 19 mai

Le «grand jour» ? Le jour des terrasses ! Ah, comme on les a attendus, ces lieux où l’on peut parler, boire un verre, regarder passer les gens ! C’est une activité très française, le «terrassisme» – si l’on me pardonne ce néologisme. C’est la culture du bistrot, de la qualité de vie, un art du farniente, de la conversation, du rire. Alors, même si la pluie aura en partie entravé ce qui peut se transformer en une véritable ruée vers les terrasses, même s’il faut observer raison, précaution et sagesse, allons-y ! L’autre bonne nouvelle, c’est la perspective de l’arrêt du port du masque en extérieur.

D’ici à quelque temps, on va pouvoir à nouveau aimer, découvrir, retrouver, un visage, des lèvres, un sourire, des êtres humains entiers. Des femmes et des hommes. Des enfants aussi. Car, de toutes les vicissitudes que nous avons traversées, les tristesses que nous avons subies, celle de voir, sur le chemin de l’école, dans les rues et les transports publics, des enfants masqués, demeure l’une des plus fortes.

Jeudi 20 mai

L’actualité, donc. Il y a, ce que certains observateurs lucides et sceptiques considèrent comme «insoluble», le conflit israélo-palestinien. Les mots, les phrases, les exposés, les analyses, les déclarations n’ont pas de poids face à la cruauté du bilan : morts, destructions, roquettes d’un côté, bombardements de l’autre. Entre autres conséquences, le conflit devient un problème majeur pour Joe Biden.

Les «100 premiers jours» du 46e président américain sont bien terminés, avec leur cortège de félicitations, d’admiration parfois naïve (il fallait voir comment, soudain, dans le microcosme politique français, Biden et ses décisions devenaient une référence, un exemple, un modèle !). C’est derrière nous, derrière lui, tout cela. Son aile gauche n’est pas d’accord avec son centrisme et son aile droite. Il n’y a plus de lune de miel. Il y a le principe de réalité, la force fatale de l’événement.

Toujours aux Etats-Unis, la rapidité avec laquelle, depuis l’annonce de son divorce, Bill Gates est «réévalué» par les médias fait frémir. En l’espace d’une semaine, le génie, le philanthrope, le bienfaiteur, l’homme dont les fondations diverses ont sauvé des vies en Inde et ailleurs, passe de statut d’icône méritante à celui d’un Weinstein un peu plus prudent, certes, mais tout aussi discutable dans ses rapports avec les femmes. La presse américaine tient sa proie, elle ne la lâchera pas. Il y a eu des écarts de conduite. On souligne ses rapports fréquents et troublants avec l’affreux Jeffrey Epstein, prédateur et partouzeur, corrupteur et manipulateur, qui s’est suicidé en 2019. On «scrute», c’est le terme le plus souvent utilisé («scrutinization»). Le Wall Street Journal, le New York Times, le Washington Post, le Daily News… La «meute» est en action. Mais faut-il utiliser le terme «meute» ? Non, c’est tout simplement la presse, libre et iconoclaste. A la recherche permanente des vérités cachées.

Vendredi 21 mai

La réouverture des cinémas, théâtres, salles de concerts, va permettre de jouir, à nouveau de ce plaisir unanime : le simple acte de s’asseoir, au milieu d’inconnus, pour vivre un moment d’images et de mots, de talents et d’invention, de beauté et d’audace. Les titres des films, à eux seuls, donnent envie : Adieu les cons, ADN, Drunk, Josep, et aussi Envole-moi, Falling, Mandibules, Slalom…La Philharmonie, le TCE, l’Opéra, la Comédie-Française, les théâtres privés (Antoine, Edouard- VII, les Bouffes Parisiens), tout bouge, tout se réveille, tout se rallume enfin.

Et je ne parle, ici, que de Paris. Mais, dans la France entière, le monde du spectacle vivant s’organise, s’agite. Finalement, ce mois de mai sera à l’image du joli Paris mai que chantait Nougaro : «Gazouillez les pinsons.» Il faut réapprendre à être heureux.

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