Le Premier ministre britannique Boris Johnson a demandé à la reine de suspendre le Parlement jusqu'au 14 octobre, soit deux semaines avant la date prévue du Brexit, a-t-il annoncé ce mercredi 28 août. Cette requête, acceptée par Elizabeth II, pourrait avoir une énorme incidence sur la sortie du Royaume-Uni de l'UE, et provoquer une crise politique historique.
Selon l'opposition, cette mesure vise à empêcher les députés de lutter contre un divorce sans accord, en leur donnant le moins de temps possible pour faire passer des lois bloquant un «no deal». En effet, d'ici au 31 octobre, date effective du Brexit, les parlementaires ne siégeront que du 3 septembre, date de la rentrée, jusqu'à la mi-septembre, puis du 14 au 31 octobre.
«Complètement faux», a répondu Boris Johnson. Selon le Premier ministre conservateur, cette décision a seulement pour objectif de «faire avancer le pays». La nouvelle session parlementaire, le 14 octobre, démarrera en effet avec le traditionnel discours de la reine, dans lequel elle exposera le programme du gouvernement. Pour «BoJo», pas besoin d'attendre l'après-Brexit pour présenter les nouveaux projets de loi de l'exécutif.
Boris Johnson insists Parliament is being prorogued in order to pass new legislation.
The PM says "there will be ample time on both sides of that crucial 17 October summit in parliament for MPs to debate the EU, debate Brexit and all the other issues” https://t.co/txTcvjXOFJ pic.twitter.com/4PQEm0kGH2— Sky News (@SkyNews) August 28, 2019
Et puis «les députés auront amplement le temps de débattre» du Brexit, a-t-il assuré, avant et après le sommet européen crucial des 17 et 18 octobre à Bruxelles. Ce qui n'est absolument pas l'avis des partis d'opposition, ni des opposants du «no deal» au sein du propre camp du Premier ministre, indignés par une telle décision. L'ex-ministre conservateur Philip Hammond a notamment dénoncé une manœuvre «antidémocratique», quand Tom Watson, chef adjoint du Labour, a évoqué un «affront particulièrement scandaleux à notre démocratie». Le président de la Chambre des Communes, John Bercow, a lui parlé d'un «scandale constitutionnel».
Vers une motion de défiance contre le gouvernement ?
Mais les députés ne comptent pas se laisser faire. Le leader de l'opposition travailliste, Jeremy Corbyn, a d'ores à déjà écrit à la reine pour lui demander un entretien, selon une source au sein du Labour. Le chef de file du parti de gauche a par ailleurs déclaré que, dès la rentrée parlementaire mardi prochain, les élus tenteront de «légiférer pour empêcher» cette suspension.
Puis, dans un second temps, une motion de défiance contre le gouvernement sera déposée «à un moment ou à un autre», a-t-il ajouté. Une option qui avait pourtant été écartée par les partis d'opposition britanniques lors d'une réunion commune mardi 27 août, mais qui est revenue sur le tapis avec l'annonce de Boris Johnson. Le président américain Donald Trump a mis son grain de sel dans ce dossier explosif, via un post Twitter, estimant qu'il serait «très difficile» pour Jeremy Corbyn de demander une motion de défiance à l'encontre de Boris Johnson, qui «est exactement ce que le Royaume-Uni attendait», et qui «prouvera que c'est 'un grand homme'».
Would be very hard for Jeremy Corbyn, the leader of Britain’s Labour Party, to seek a no-confidence vote against New Prime Minister Boris Johnson, especially in light of the fact that Boris is exactly what the U.K. has been looking for, & will prove to be “a great one!” Love U.K.
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) August 28, 2019
D'autres députés et responsables politiques veulent de leur côté s'opposer à cette suspension du Parlement par la voie juridique. Certains, comme l'ancien Premier ministre conservateur John Major, ont en effet menacé de saisir la justice. Un recours devant les tribunaux écossais a même déjà été déposé par une membre du Parti national écossais (SNP).