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COP21 et Brexit, de vrais défis, par Jean-Marie Colombani

Jean-Marie Colombani.[Alexis Reau / SIPA]

Chaque semaine, Jean-Marie-Colombani, cofondateur et directeur de Slate.fr, exprime de manière libre et subjective son point de vue sur les temps forts de l’actualité.

Deux images ont marqué ces derniers jours. Leonardo DiCaprio à la tribune des Nations unies, exhortant les responsables présents à agir pour la planète. Barack Obama en visite à Londres, invitant fortement les Britanniques à rester membres de l’Union européenne lors du référendum du 23 juin prochain, qui doit décider du maintien ou de la sortie de l’Union.

Le premier événement – 171 pays réunis à New York pour parapher l’accord de Paris sur le climat – est décisif pour l’avenir de la planète. Si les engagements pris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre sont tenus, la COP21 s’inscrira en positif au bilan de François Hollande. Elle a été, aussi, un succès de la diplomatie française. Le magazine américain Time ne s’y est pas trompé : il a classé le président français parmi les cent leaders mondiaux les plus influents.

On rapproche souvent la France de la Grande-Bretagne, François Hollande de David Cameron pour opposer la panne de la première et la situation de faiblesse de son président au dynamisme économique de la seconde et à la position de son Premier ministre, réélu pour un deuxième mandat. L’éventualité d’un Brexit devrait pourtant conduire à nuancer cette comparaison. David Cameron est aujourd’hui singulièrement affaibli et son pays traverse une crise d’identité suffisamment forte pour que le Premier ministre britannique ait eu besoin du secours du président américain. Barack Obama a attaqué de front l’argument des partisans du Brexit selon lesquels une sortie de l’Union permettrait à la Grande-Bretagne de nouer un partenariat commercial plus avantageux avec les Etats-Unis et redonnerait à celle-ci son lustre passé.

Pour le président américain, au contraire, la sortie de l’Union placerait la Grande-Bretagne «en queue de liste» si elle voulait prendre part à un accord commercial transatlantique et seul le maintien dans l’Union serait susceptible de conserver à ce pays un rôle stratégique. Quant aux limitations de souveraineté (très relatives pour les pays qui sont en dehors de la zone euro), Barack Obama considère qu’elles sont une contrepartie nécessaire et de citer l’appartenance à l’Otan, au Conseil de sécurité des Nations unies, au G7 ou G20 comme autant de limites à la souveraineté consenties au nom de l’intérêt général.

Peu de pays échappent aux interrogations qui traversent la Grande-Bretagne à l’occasion de ce référendum : les partisans du Brexit, imperméables aux arguments économiques qui, pour la plupart, attestent de l’intérêt du maintien dans l’Union, sont pour beaucoup nostalgiques d’une grandeur passée. A savoir, en Grande-Bretagne, le regret d’une époque où l’Angleterre liait son rôle à celui d’une communauté anglo-saxonne planétaire avec les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. De même, les partis souverainistes en France, ceux qui se réclament de l’extrême droite, honnissent l’Europe au nom du passé d’une France qui n’existe plus, au moins depuis la fin de la guerre d’Algérie si ce n’est depuis le mois de juin 1940. Il arrive que le regard vers le passé durcisse l’avenir…

En outre, si l’on examine les votes d’extrême droite sur le continent européen et ceux qui portent sur l’Ukip en Grande-Bretagne, on retrouve la même colère, le même ressentiment exprimés par un électorat à dominante blanche appartenant aux classes populaires, voire à la classe moyenne mais peu diplômée et qui se croit dépossédée de son identité : l’Europe devient alors le bouc émissaire tout trouvé.

A bien des égards, les défis que doivent affronter François Hollande et David Cameron se ressemblent. Il faut souhaiter que l’Europe reste pour leurs deux pays le cadre nécessaire pour continuer d’avancer.

Jean-Marie Colombani

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