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Européennes : plongée au coeur des "Grillini" en Italie

La sénatrice italienne Michela Montevecchi du mouvement Cinq Etoiles (M5S) en Italie, lors d'une interview avec l'AFP, le 10 avril 2014 à Rome [Alberto Pizzoli / AFP] La sénatrice italienne Michela Montevecchi du mouvement Cinq Etoiles (M5S) en Italie, lors d'une interview avec l'AFP, le 10 avril 2014 à Rome [Alberto Pizzoli / AFP]

Surfant sur le désamour des partis traditionnels et vantant la démocratie participative contre l'Europe anonyme, les "Grillini", les membres du Mouvement Cinq étoiles (M5S) de l'ex-humoriste italien Beppe Grillo, sont encore crédités d'un quart des voix aux européennes, malgré un bilan politique contesté et de fortes bisbilles internes.

Lors des législatives de février 2013, le M5S avait obtenu environ 25% des suffrages dans chaque chambre parlementaire, en profitant du malaise social créé par la plus longue récession de l'après-guerre et en dénonçant les privilèges de la classe politique.

Mais la vague contestataire anti-austérité et anti-partis, très présente sur les réseaux sociaux et à travers le blog de Grillo, n'est pas parvenue à compter vraiment sur l'échiquier politique.

Après un an dans les couloirs, les commissions et en séance, tous les parlementaires du M5S interrogés par l'AFP l'avouent: la politique vécue comme une "profession", est "décevante, frustrante", même s'ils admettent avoir "mûri énormément".

"C'était compliqué, on ne venait pas d'une école de parti, d'un incubateur de la politique", explique le sénateur Giuseppe Vacciano, 41 ans, employé de la Banque d'Italie à Latina (centre-sud).

Enseignante d'Emilie-Romagne (nord-est) de 43 ans, sa collègue Michela Montevecchi a les larmes aux yeux à l'évocation de son "entrée dans ce palais, très dur" et parle "de difficultés personnelles".

Photo d'archives de Beppe Grillo, dirigeant du mouvement populiste cinq étoiles, durant une conférence de presse le 15 avril 2014 à Rome [Filippo Monteforte / AFP/Archives]
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Photo d'archives de Beppe Grillo, dirigeant du mouvement populiste cinq étoiles, durant une conférence de presse le 15 avril 2014 à Rome

Plus ironique, le député Andrea Cecconi, un infirmier de 30 ans originaire de Pescara (centre-est), se réjouit que sa première année à la Chambre des députés se soit conclue "de façon éclatante puisque j'ai été suspendu de travaux parlementaires" pendant dix jours pour des infractions au règlement intérieur.

"Le bilan strictement politique de M5S ne peut qu'être négatif. Capter les protestations, c'est facile, mais les transformer en propositions, c'est bien plus difficile", analyse pour l'AFP le politologue Piergiorgio Corbetta, spécialiste du M5S.

Par son refus de participer à la coalition gauche-droite au pouvoir, en choisissant de rester dans un rôle d'opposition souvent stérile (perturbations de séances) et malgré des actions symboliques comme la restitution à l'Etat de 1,5 million d'euros prélevés sur les indemnités de ses parlementaires, le M5S a dérouté nombre de ses électeurs.

Plus grave, il est menacé de l'intérieur, de nombreux militants et élus dénonçant la ligne autoritariste de leur "gourou". En un an, une vingtaine de parlementaires ont fait défection ou ont été exclus du M5S.

Interrogés sur les motifs de leur adhésion au M5S, les élus rencontrés par l'AFP ne citent que rarement leur chef.

"Grillo n'est qu'un comédien", lâche M. Vacciano. Son collègue Gianluca Castaldi, un commerçant des Abruzzes (centre) de 44 ans, renchérit: "aujourd'hui, lors de nos meetings, les places sont pleines, nous n'avons plus besoin de Grillo", en référence au temps où l'audience du M5S reposait entièrement sur l'aura médiatique du numéro un.

Beppe Grillo apportait à l'époque une "nouveauté" et constituait la "seule vraie alternative politique" aux partis traditionnels, rappellent-ils.

"J'ai été fascinée par cet élément de rupture, cette volonté de dire +basta+", explique Michela Montevecchi, dont le bureau est orné d'un portrait de Bob Marley.

Pour le politologue, l'avenir politique du M5s se dirige immanquablement "vers un redimensionnement": "il ne fera bientôt plus que 10%" et "dans cinq ans il n'existera plus".

En attendant, comme il y a, selon M. Corbetta, "encore beaucoup de place pour la contestation" et que le M5S est majoritaire chez les jeunes, les ouvriers et dans le sud du pays, "il est probable qu'il se maintiendra à 25% aux européennes", derrière le Parti démocrate (PD, centre gauche) de Matteo Renzi, donné à plus de 30%, mais loin devant Forza Italia (FI, centre droit), le parti de Silvio Berlusconi, crédité d'au maximum 20%.

S'il admet que beaucoup perçoivent son mouvement comme "les +grillini+ une simple voix de protestation", l'ex-humoriste croit dans sa bonne étoile et assure que le M5S "remportera les européennes". Et "s'il obtient une voix de plus que le PD", Beppe Grillo promet d'aller immédiatement au Quirinal (la présidence), réclamer la tête du Premier ministre Matteo Renzi.

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