Le Mujao, un des groupes armés qui contrôlent le Nord du Mali depuis plus de six mois (avec Aqmi et Ansar Dine), s’en prend directement à la France.
Un de ses membres a accusé samedi le président François Hollande de mettre « en danger » la vie des otages français au Sahel en soutenant la préparation d'une opération contre les islamistes armés dans le nord du Mali. Le président "lui-même, est désormais en danger" a ajouté le djihadiste. François Hollande se dit toutefois déterminé à apporter un soutien logistique à l'intervention au Mali pour lutter "contre le terrorisme". Décryptage de Mathieu Guidère, auteur du livre Les Nouveaux Terroristes (éditions Autrement).
Qui sont les miliciens du Mujao ?
Mathieu Guidère : Le Mujao est un groupe qui a fait sécession avec Aqmi [Al-Qaïda au Maghreb islamique] en 2011 et qui est encore plus radical. Il s’agit d’une brigade de 80 et 100 hommes basés entre le nord du Mali et la Mauritanie. Cette année, ils ont été les seuls à commettre des enlèvements dans la région.
Doit-on prendre leurs menaces au sérieux ?
Jusqu’à présent, c’est Aqmi qui détenait les six otages français évoqués, mais peut-être le Mujao les a-t-il rachetés (ou est sur le point de le faire). Aqmi semblerait en effet vouloir normaliser sa situation pour intégrer un gouvernement d’alliance au Nord avec les Touaregs islamistes (Ansar Dine), qui eux sont contre les enlèvements.
Le Mujao menace aussi les expatriés (ils sont 50 000 dans la région, si l’on ne tient pas compte de la Côte d’Ivoire), qu'il a peut -être déjà repérés. Le groupe armé a la capacité de les attaquer: il a enlevé en avril sept diplomates du consulat algérien de Gao, et exécuté l’un d’eux.
Quant à la menace sur le président ?
Une attaque contre le président Hollande sur le sol français peut paraitre farfelue car le Mujao est encore un petit groupe qui n’a pas de relais sur notre territoire, contrairement à Aqmi. Le Mujao a toutefois récupéré tout un arsenal depuis le conflit en Libye, notamment des armes sol-air capables d’abattre un avion. Le président doit donc être prudent s'il fait des déplacements dans la région.
Pourquoi la France tient-elle tant à l’intervention contre les islamistes au Nord du Mali ?
La France ne veut pas que la région devienne un sanctuaire pour des terroristes qui pourront ensuite planifier des attentats contre elle. Le problème, c’est qu’aujourd’hui au Mali, on n’a pas les massacres que l’on a en Syrie, et l’urgence et l’efficacité d’une intervention militaire sont contestables. Elle aurait notamment des conséquences humanitaires catastrophiques. Cette guerre préventive contre le terrorisme rappelle la rhétorique du président américain George W. Bush dans les années 2000, avec tous les risques qu’on connait.
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