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Des conditions exécrables pour l'assaut de l'Everest

Des alpinistes au sommet de l'Everest en mai 2009[AFP/Archives]

Ce n'est pas le sommet du col du Galibier, incontournable sommet du Tour de France cycliste, au mois de juillet, mais ça y ressemble: déjà 150 le week-end dernier, ils devaient être plus de 200 alpinistes à s'élancer vendredi à l'assaut de l'Everest dans des conditions exécrables qui ont déjà coûté la vie à quatre personnes.

Les alpinistes, qui déboursent des dizaines de milliers de dollars pour vaincre le toit du monde (8.848 m), disposent d'une fenêtre optimale de quelques semaines, d'avril à la première semaine de juin, lorsque les vents violents molissent.

Or cette année, le temps ne s'est dégagé qu'à la fin de la troisième semaine de mai, provoquant une congestion dangereuse sur les parois.

Dans l'ascension comme dans la descente, les alpinistes doivent respecter des paliers et emprunter des passages étroits dans la "zone de la mort", partie de la montagne au-dessus de 8.000 mètres où il est presque impossible de survivre plus de 48 heures au froid intense et au manque d'oxygène.

En cas d'affluence, ces goulets sont encombrés, et les alpinistes qui s'y retrouvent coincés trop longtemps finissent "désorientés, malades, totalement épuisés", selon le témoignage d'un Américain, Jon Kedrowski, 33 ans, présent près du sommet il y a quelques jours.

Selon Chris Tomer, son partenaire de cordée depuis 15 ans, Kedrowski a contribué à sauver quatre alpinistes épuisés. Conscient du danger, l'homme reste toutefois déterminé à réaliser son ascension ce vendredi, quitte à prendre tous les risques.

"Ils ne feront pas d'arrêt à deux camps intermédiaires. Ils iront directement vers le sommet. Ils ont une fenêtre météo (favorable) de 24 heures au mieux", confie Tomer.

Depuis l'ascension historique de Sir Edmund Hillary and Tenzing Norgay le 29 mai 1953, 10.000 personnes ont tenté l'Everest et près de 4.000 l'ont réussi. 225 personnes ont perdu la vie, dont la moitié au cours des 20 dernières années.

Pour Nima Nuru Sherpa, de l'Association népalaise d'alpinisme, la ruée vers l'Everest est à mettre sur le compte de l'augmentation du nombre d'expéditions commerciales au détriment des ascensions de spécialistes passionnés.

"On ne peut pas dire +ce groupe de dix est autorisé à partir, ce groupe de dix ne l'est pas+, déplore-t-il. Tout le monde veut atteindre le sommet".

Les alpinistes versent environ 25.000 dollars US (près de 20.000 euros) aux sociétés qui organisent leur ascension et entre 10.000 et 25.000 USD pour obtenir l'autorisation de gravir l'Everest.

Pas question, à ce prix-là, de faire demi-tour: diversement aguerris, les clients ont de plus en plus tendance à ignorer leurs guides lorsque ces derniers leur conseillent de renoncer, affirme Nima Nuru Sherpa.

Les critiques s'alarment également du nombre croissant d'amateurs de paris loufoques, comme cette Japonaise de 73 ans, Tamae Watanabe, qui a battu cette année son propre record de la femme la plus âgée à gravir l'Everest.

Le gouvernement népalais est pour sa part réticent à réglementer ce très lucratif tourisme de l'extrême.

"Un alpiniste doit remplir certains critères d'expérience et prouver qu'il a gravi un sommet de 6.000 mètres avant l'ascension de l'Everest", explique le porte-parole du ministère du Tourisme, Bal Krishna Ghimire.

"Nous ne pouvons pas refuser ceux qui satisfont à ces critères (...). Je ne crois pas que l'affluence soit responsable des accidents mortels. Cela dépend de la météo et cette année elle est mauvaise", tranche-t-il.

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