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«J'ai oublié comment lire et écrire» : Mika, victime de harcèlement scolaire dès 8 ans, confie ses traumatismes

Mika a pris la parole en amont de la journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire, qui se tient ce jeudi 9 novembre. [Ludovic MARIN / AFP]

A l’occasion de la journée de lutte contre le harcèlement scolaire, fléau qui touche en moyenne un élève sur dix en France, le chanteur Mika a partagé, mardi, sa propre histoire devant 200 élèves du lycée Pierre-Gilles de Gennes dans le 13e arrondissement de Paris. Un bouleversant témoignage, au cours duquel il a exhorté les jeunes à «cultiver leurs différences», révélant toutefois qu’à 40 ans, il garde des séquelles et ne peut plus lire la musique.

Victime de harcèlement scolaire dès l’âge de 8 ans, le chanteur Mika a pris la parole mardi 7 novembre à l’occasion d’un événement organisé en présence de Brigitte Macron, de Gabriel Attal, ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, et de 200 collégiens et lycéens, afin de sensibiliser ces derniers à ce fléau.

L’occasion pour l’artiste de partager son histoire, de Beyrouth, où il est né, à Paris, où il a déménagé pour fuir la guerre, jusqu’à Londres, où il a été confronté pour la première fois au harcèlement scolaire. Ayant grandi auprès d’un papa mathématicien sérieux et d’une maman «excentrique» aux cheveux presque rouges, une famille où «danser le flamenco habillé en mariachi dans l’appartement» et où porter des vêtements uniquement cousus par sa mère était totalement normal, l’artiste a ainsi expliqué : «c’est beau, parce que ça fait une vie de film. C’est beau quand il y a de la tolérance. C’est beau quand personne ne te dit que c’est moche».

Et de poursuivre en partageant les moqueries dont il a été victime à son arrivée à Londres. «J’arrive donc à l’école française de Londres (…) je suis habillé en short rose, chemise jaune, un nœud papillon et je pense que je suis très bien habillé pour mon arrivée dans cette nouvelle école, la première partie de ma nouvelle vie. Moi, je me considère beau et normal. C’est pas exactement le cas dans l’opinion des autres.» «Je me souviendrai toujours de ce moment de tristesse tellement profond. Je suis un enfant. J’ai 8 ans et je m'installe au fond de la classe et je me mets à pleurer. Je ne comprends pas pourquoi tout le monde se moque de moi», poursuit-il.

Un harcèlement qui a toujours des conséquences sur sa vie  

Il revient alors sur l’engrenage et les conséquences que cela provoque chez lui. «Je commence à porter un t-shirt blanc, les shorts roses disparaissent, le nœud papillon s’en va. Je porte des jeans noirs, pas parce que j’aimais le noir, mais parce que je voulais disparaître», note-t-il. Mais les choses vont encore plus loin lorsqu’il est confronté à l’intolérance et au harcèlement d’une professeure.

Une situation incompréhensible pour l’enfant qu’il était. «Là, je m’enferme. C’était dur, c’était très triste. C’était tellement intense comme harcèlement que j’arrête de parler. Je commence à vouloir m’échapper de la maison. J’oublie comment lire. J’oublie totalement comment écrire. Avant ça, je pouvais lire la musique parfaitement, toutes les notes», explique l’artiste, avant de révéler qu’aujourd’hui il n’en est plus capable. «Depuis cette période-là, je ne peux plus le faire. J’ai 40 ans, je travaille sur des films, j’écris des albums et je ne peux pas lire la musique», assure-t-il, preuve des séquelles indélébiles que peut laisser le harcèlement.

Un harcèlement dont l’artiste, qui a changé plusieurs fois d’école, a de nouveau été victime à l’adolescence, évoquant les terribles brimades qu’il a subies entre 13 et 15 ans. «Là, ça devient presque violent, jusqu’au point où j’ai la permission d’arriver toujours un peu en retard. Parce que la vérité, c’est que si je marchais avec ma classe j’avais un bleu, j’avais une canette versée sur ma tête, un sandwich dans ma gu**le, sur ma veste. Donc je ne marchais pas avec les autres enfants, parce que ce n’était pas une option.»

Ne pas sombrer

Pourtant, Mika a voulu partager un message d’espoir aux 200 collégiens et lycéens. «Quand on a 40 ans, on s’en souvient, on n’oublie pas, mais ça ne veut pas dire que ça domine et que ça gagne. En fait, il y a une autre manière d’envisager un futur, à votre manière», a souligné l'artiste. S’il explique que la musique et l’art l’ont, d’une certaine manière, sauvé, lui permettant de réaliser enfant «qu'il n'était pas rien», il a exhorté les jeunes à cultiver leurs différences et à s’appuyer sur leurs propres valeurs.  

«Je pense que le monde est encore plus compliqué aujourd’hui qu’avant, parce que l’école vous suit en dehors, dans vos ordinateurs, vos chats et dans vos téléphones, et je ne sais pas comment vous faites. Je voulais juste vous donner une petite histoire de quelqu'un qui pensait que ses différences allaient le détruire et, en fait, c’est l’inverse. Mes différences m’ont formé et m’ont donné une raison d’être dans la vie d’adulte», poursuit Mika, avant de conclure : «Assumez vos différences, cultivez vos différences et soyez fiers, car c’est cette fierté qui va vous donner le courage de vous exprimer dans le monde d’adulte, qui est assez fou de temps en temps». Un témoignage édifiant en cette journée du harcèlement. 

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