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Places de prison, téléphones activés à distance dans certaines enquêtes, recrutement de magistrats... Ce que contient la loi de réforme de la Justice votée ce mardi

Le premier volet du texte prévoit une hausse du budget annuel du ministère de la Justice, passant de 9,6 à 11 milliards d’euros d’ici à 2027. [Ludovic MARIN / AFP]

Après avoir reçu le feu vert du Sénat le mois dernier, l'Assemblée nationale a adopté ce mardi 18 juillet en première lecture le projet de loi de réforme de la justice. Hausse du budget, places de prison supplémentaires ou encore activation de téléphones portables à distance dans le cadre d'écoutes, voici toutes les nouvelles mesures prévues.

Une réforme très attendue. Ce mardi 18 juillet, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi d'augmentation des moyens de la Justice d'Eric Dupond-Moretti, avec le soutien du RN ainsi que de la droite, qui avait obtenu l'ajout de 3.000 places de prison supplémentaires.  

Ce texte de programmation a été voté par 388 voix contre 111. Outre une hausse du budget qui permettra de nombreux recrutements, le texte prévoit une réforme du code de procédure pénale actuellement en vigueur, ainsi que deux nouveautés : une expérimentation de tribunaux économiques et des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales.

Hausse du budget et recrutement

«Il faut tourner la page du délabrement et de la clochardisation de la justice française». C’est avec ces mots qu’Éric Dupond-Moretti a défendu son projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice pour la période 2023-2027, ainsi que le projet de loi organique réformant le statut des magistrats qui l'accompagne. De fait, le premier volet du texte prévoit une hausse du budget annuel du ministère de la Justice, passant de 9,6 à 11 milliards d’euros d’ici à 2027.

Dans le détail, cet effort budgétaire va permettre 10.000 recrutements et la construction de 15.000 places de prison supplémentaires. «Il y a 60.000 places et 73.000 détenus. Je ne vais pas libérer 13.000 détenus. Je veux assumer une réponse pénale ferme», a assumé le ministre de la Justice en séance. Principal changement dans la dernière ligne droite, les députés ont donné leur feu vert mercredi soir à la demande des Républicains de construction de 3.000 places de prison supplémentaires d'ici à 2027. 

Par ailleurs, le projet de loi initial prévoyait la création d’au moins 1.500 postes de magistrats et 1.500 postes de greffiers sur le quinquennat. Les sénateurs ont modifié l’article premier pour mettre l’accent sur les greffiers, avec 1.800 postes, ainsi que l’embauche de 600 conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP). Face à la pénurie de personnels pénitentiaires, le projet de loi prévoit aussi le recrutement de surveillants en qualité de contractuels pour une période de trois ans, renouvelable une fois. Les candidats devront être âgés entre 18 et 30 ans.

Réforme du code de procédure pénale

Réclamée depuis longtemps par le garde des Sceaux, les députés ont validé l’habilitation donnée par le Sénat au gouvernement pour réformer le code de procédure pénale par ordonnance. À cet égard, Éric Dupond-Moretti a tenu à apporter des garanties avec un travail de codification effectué par un comité scientifique et suivi par un comité parlementaire représentatif des groupes politiques de l’Assemblée et du Sénat. Éric Dupond-Moretti s’est aussi engagé à ce que le nouveau code de procédure pénale ne rentre en vigueur avant la ratification de l’ordonnance par le Parlement, et donc un nouveau vote une fois les détails connus.

Activation à distance des téléphones portables 

Parmi les nouvelles mesures votées par le Sénat, on retrouve notamment l’extension des perquisitions de nuit actuellement réservées dans les affaires de terrorisme et de criminalité organisée. Le texte les étend aux crimes de flagrance contre les personnes, sur la requête du procureur de la République, lorsqu’elles sont nécessaires «pour prévenir un risque imminent d’atteinte à la vie ou à l’intégrité physique, lorsqu’il existe un risque immédiat de disparition des preuves et indices du crime qui vient d’être commis, ou pour permettre l’interpellation de son auteur».

Par ailleurs, malgré d’âpres débats, les sénateurs ont également validé la mesure permettant l’activation à distance des téléphones portables par les enquêteurs, soit pour géolocaliser une personne, soit pour réaliser des captations de sons et d’images (des écoutes). La géolocalisation est autorisée sur requête du procureur de la République, ou du juge d’instruction, pour des affaires relatives à un crime ou à un délit puni d’au moins dix ans d’emprisonnement, tandis que les écoutes pourront être autorisées par un juge dans des enquêtes relevant du terrorisme ou du crime organisé.

Création de pôles spécialisés sur les violences intrafamiliales

À la demande de la sénatrice socialiste Laurence Rossignol, et de la sénatrice écologiste Mélanie Vogel, entre autres, Éric Dupond-Moretti s’est aussi engagé à reprendre le rapport de Dominique Vérien sur les violences intrafamiliales, qui préconise la création de «chambres spécialisées» dédiées dans les juridictions. À cet égard, un amendement qui précise l’entrée en vigueur de ces pôles spécialisés en matière de violences intrafamiliales au plus tard au 1er janvier 2024, a été voté par les sénateurs et devra être confirmé par les députés.

Expérimentation des tribunaux économiques

Enfin, la mise en place à titre expérimental de tribunaux des affaires économiques est issue d’un rapport et d’une proposition de loi des sénateurs François Bonhomme (LR) et Thani Mohamed Soilihi (Renaissance). L’idée a été reprise dans les États généraux de la justice et constitue l’article 6 du projet de loi d’orientation et de programmation de la Justice 2023-2027.

Le Sénat a adopté l’expérimentation de cette nouvelle juridiction qui remplacera les tribunaux de commerce. Ces derniers ont compétence pour traiter des litiges commerciaux, et ne sont pas composés de juges professionnels mais de juges consulaires. Dans sa version initiale, le projet de loi prévoyait d’intégrer des magistrats professionnels en tant qu’assesseurs dans les nouveaux tribunaux des affaires économiques.

En commission des lois, le Sénat les a supprimés «car les tribunaux de commerce ne le souhaitaient pas. Et les juges professionnels ne souhaitaient pas siéger en tant qu’assesseurs», a expliqué la co-rapporteure du texte, Dominique Vérien. Le texte prévoit par ailleurs d’élargir les compétences de ces tribunaux aux agriculteurs. En commission, les sénateurs les ont également élargis aux professions réglementées du droit.

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