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Crack à Paris : en l'absence de ministre de la Santé, tous les projets à l'arrêt

Les toxicomanes, consommateurs de crack, vivent à la rue depuis des mois à Paris. Les toxicomanes, consommateurs de crack, vivent à la rue depuis des mois à Paris. [© BERTRAND GUAY / AFP]

Les projets patinent et les autorités publiques se renvoient la balle. En l'absence de ministre de la Santé, tous les projets d'accompagnement et de prise en charge des toxicomanes à Paris semblent à l'arrêt, alors que le problème apparaît comme insoluble.

Avec l'annonce de la création de «haltes "soins addictions"» (HSA), promise par Olivier Véran en septembre lorsqu'il était encore ministre de la Santé, toutes les autorités publiques en charge du plan crack à Paris s'étaient félicitées de cette belle avancée dans le dossier épineux de la prise en charge des toxicomanes. Mais le vent a depuis tourné.

Marche arrière sur les «haltes "soins addictions"»

Le 9 juin dernier, Olivier Véran avait finalement expliqué qu'il n’y aurait «pas d’autres haltes "soins addictions" ou salle de shoot, à Paris», estimant que ce n’était «pas la réponse adaptée dans cette ville». Un coup de bâton derrière la nuque pour toutes les associations qui travaillent auprès de cette population en grande déshérence.

L'expérimentation en France de ces «haltes "soins addictions"» était pourtant parue au Journal Officiel du 26 janvier 2022, qualifiées alors d'«espace de réduction des risques par usage supervisé et d'accès aux soins» répondant justement «à la politique de réduction des risques et des dommages pour les usagers de drogues».

«Elle vient prolonger le dispositif expérimental dénommé «salles de consommation à moindre risque» (SCMR), qui a donné lieu à l'ouverture de deux lieux à Paris et Strasbourg en octobre et novembre de la même année», précisait le Journal Officiel, évoquant les deux uniques salles de consommation – grossièrement appelées «salles de shoot» – ouvertes en France.

Des dispositifs à étendre à tout le territoire donc, si l'on en croyait les propos d'Olivier Véran à ce sujet, qui s'appuyait sur diverses études montrant «que ce type de dispositif est adapté à la prise en charge des usagers injecteurs de substances psychoactives les plus vulnérables, cumulant les risques de précarité et de maladies...».

Sauf que le départ d'Olivier Véran, désormais ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, et la démission de Brigitte Bourguignon, qui avait été nommée en mai pour le remplacer au ministère de la Santé, ont complètement mis à l'arrêt tous ces projets. Pire, aucun service ne semble être en mesure d'exprimer la ligne politique de l'Etat à ce sujet.

Des projets à l'arrêt et de vives déceptions

A tel point que les défenseurs et les opposants à ces projets ne savent plus où donner de la tête. Mais tous attendent que l'Etat prenne des décisions : au sujet de la prise en charge des toxicomanes installés depuis septembre porte de la Villette, sur l'ouverture de nouvelles HSA, sur l'ouverture d'un centre de soins pour toxicomanes dans les locaux de l'hôpital Chardon-Lagache (16e).

Mi-juin encore, Anne Souyris, adjointe à la mairie de Paris chargée de la santé publique, avait interpellé le préfet de Paris et d'Ile-de-France à ce sujet, «pour relancer le pilotage du plan crack dont il a la charge». «Notre mobilisation a porté de premiers fruits, poursuivons-les, créons des structures de soin HSA et luttons contre les trafics», avait-elle alors fait savoir.

Aujourd'hui, l'élue – qui assure au Parisien que l'ouverture de nouvelles structures d'accueil et de soins est «la seule solution, à moins de mettre tous les usagers de drogue en prison» – est déçue de ce revirement. «Je suis en colère contre le manque de courage de ce gouvernement. Ils ont fait de la démagogie pour ne pas perdre les élections», a-t-elle expliqué à nos confrères.

Une déception d'autant plus grande que tout le monde semblait s'accorder il y a encore quelques mois sur l'ouverture de nouvelles structures. Depuis des mois, l'équipe d'Anne Hidalgo porte en effet le projet d'ouvrir, non pas de nouvelles «salles de shoot», mais de petits centres d'accueil de jour, qui permettent d'offrir un soutien social et médical aux toxicomanes, ainsi que des centres d’hébergement pour les sortir de la rue.

Dans le 16e, les riverains opposés à l'ouverture d'un centre d'accueil pour toxicomanes sont perdus. Prévoyant de ce rassembler ce jeudi 23 juin devant ce que devait être le futur centre de soins pour toxicomanes, installé 1, rue Chardon-Lagache dans d'anciens locaux de l'hôpital du même nom, ils ont finalement décidé d'annuler leur mobilisation, et d'organiser un grand rassemblement ce dimanche devant l'Hôtel de Ville. En espérant qu'un nouveau ministre de la Santé aura été nommé d'ici-là.

Eux craignent de voir les consommateurs de crack, plutôt habitués aux quartiers du nord-est parisiens, arriver dans leur quartier. Et si plusieurs élus ont annoncé que ce projet était «bloqué», sans qu'aucune communication officielle n'ait pu confirmer cette information, personne n'est en mesure de dire si «bloqué» signifie «abrogé». Dans le doute, ils continuent le combat.

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