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Maurice Genevoix au Panthéon : la voix des «Poilus» à jamais immortelle

A l'occasion des cérémonies commémorant le 102e anniversaire de l'armistice de 1918, l'écrivain et académicien Maurice Genevoix va, ce mercredi 11 novembre, entrer au Panthéon. Celui qui a immortalisé la voix des Poilus par écrit reposera à compter de ce soir dans la crypte de la nécropole auprès des Grands hommes et des Grandes femmes de la Nation.

Annoncée il y a déjà deux ans par Emmanuel Macron, qui présidera dès 18 h ce soir, l'hommage à Maurice Genevoix, la panthéonisation de l'auteur de «Ceux de 14» - oeuvre majeure sur la première guerre mondiale - avait finalement été reportée au 11 novembre 2020, afin de coupler le transfert de ses cendres avec le centenaire de l'inhumation du soldat inconnu.

Né le 29 novembre 1890 à Decize, dans la Nièvre, Maurice Genevoix n'avait pas encore 24 ans lorsque, le 2 août 1914, il est mobilisé et doit rejoindre les tranchées du front de l'est de la France.

Tout juste diplômé de l'Ecole normale supérieure (ENS), il doit alors suspendre pour un temps ses ambitions littéraires, en devenant sous-lieutenant du 106e régiment d'infanterie, et pataugeant dès lors dans la glaise et le sang.

Blessé au combat

Le 25 avril 1915, Maurice Genevoix, devenu entre-temps commandant, est touché d'un tir au bras et d'un autre à la poitrine. Il échappe de justesse à la mort à 25 ans, mais perd une main et restera handicapé toute sa vie.

Evacué en ambulance jusqu'à Verdun (Meuse), puis transféré d'hôpital en hôpital, il restera convalescent durant neuf mois avant de réintégrer l'Ecole normale supérieure, à Paris. Le directeur de l'ENS l'encourage alors à décrire la vie dans les tranchées et tout ce qu'il a vécu.

Des souvenirs tragiques et effroyables qui donneront plusieurs livres. Son premier récit, Sous Verdun, est publié alors même que la guerre n'est pas terminée, mais se verra amputé de plusieurs pages par la censure.

«Ceux de 14», l'oeuvre majeure

Suivront Nuits de guerre (1917), Au seuil des guitounes (1918), la Boue (1921), les Eparges (1923), Raboliot (prix Goncourt 1925), et bien plus tard la Mort de près (1972). La plupart de ces récits seront rassemblés en 1949 en un recueil unique intitulé Ceux de 14, son chef d'oeuvre. 

Par sa précision, la beauté de sa langue, et ses qualités littéraires, Ceux de 14 est en effet considéré comme un témoignage capital, peut-être même le plus important sur la Grande guerre.

Lorsqu'Emmanuel Macron avait décidé l'entrée au Panthéon des soldats de la Grande Guerre - 101 cubes en verre, contenant chacun une poignée de terre de l'un des 101 départements français seront disposés ce soir sur le parvis du Panthéon - le chef de l'Etat avait précisé qu'il souhaitait «qu'ils franchissent ce seuil sacré avec Maurice Genevoix», faisant ainsi de l'académicien «leur porte-étendard».

Désigné sous la Coupole sans concurrent, le 24 octobre 1946, Maurice Genevoix en deviendra le secrétaire perpétuel en octobre 1958, avant de démissionner de l'Académie en janvier 1974. Un coup d'éclat pour cet éternel amoureux de la liberté, âgé alors de 83 ans, qu’aucun secrétaire perpétuel n'avait plus fait avant lui depuis Raynouard en 1826.

Maurice Genevoix s'éteindra six ans plus tard, le 8 septembre 1980, d'une crise cardiaque alors qu'il est en vacances avec sa famille dans sa maison d'Alsudia-Cansades, près de Xàbia (province d'Alicante), en Espagne.

Raconter le courage et la mort

A l'annonce de sa mort, surgissent aussitôt dans la presse des passages de Ceux de 14, conférant aux mots de l'écrivan disparu une dimension toute particulière. «J'ai obéi. Malgré ma vie, contre ma vie. J'ai fait ce geste monstrueux de pousser ma vie sous les balles, et de l'y maintenir, pendant que mon revolver me cognait le poignet. Il n'y a que nous, que nous : ceux qui sont morts, ceux qui étaient parmi les morts, et qui ont eu, comme eux, le courage de mourir».

Dans un portrait que le Monde lui consacre alors, le lecteur apprend que Maurice Genevoix racontait souvent trois souvenirs à ses visiteurs. Ce jour où un éclat d’obus qui aurait pu lui enlever le foie avait ricoché sur un bouton de sa capote, le laissant sonné et tout étonné de sa chance. Cet autre encore où, gravement atteint, il avait fixé une étoile à travers les bâches de la carriole qui l’évacuait, et où il s’est juré de survivre et de «sentir encore».

Et cette scène, enfin, qui l’émouvait entre toutes : l'image de ce soldat agonisant dont le seul regard, se figeant à mesure que son âme quittait son corps, lui avait désigné la tranchée à ne pas emprunter, sous peine de le suivre dans la mort.

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