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Assassinat de Samuel Paty : les réseaux sociaux également responsables ?

La classe politique accuse les réseaux sociaux d’avoir amplifié la haine autour du professeur Samuel Paty.[FRANCOIS LO PRESTI / AFP]

«Les choses ont démarré sur les réseaux sociaux et se sont terminées sur les réseaux sociaux». En une phrase, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a résumé les accusations adressées par la classe politique aux plateformes en ligne. Elles seraient en partie responsables de l’assassinat du professeur Samuel Paty.

Dans les faits, difficile de contredire Gabriel Attal. Avant que les images de sa mort y soient diffusées vendredi, elles ont été le point de départ d’une campagne de haine contre l’enseignant, suite à son cours sur la liberté d’expression. Un parent d’élève et l’islamiste Abdelakim Sefrioui ont utilisé Facebook pour appeler à se mobiliser contre celui-ci, en donnant son nom et son collège, mettant le feu aux poudres et conduisant, finalement, à sa décapitation.

La mosquée de Pantin avait même relayé l’une des vidéos sur un de ses comptes. De quoi faire dire à Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, qu’il s’agissait d’une véritable «fatwa» contre Samuel Paty.

En parallèle des actions policières et des mesures gouvernementales contre la mouvance islamiste, les réseaux sociaux se retrouvent donc une nouvelle fois accusés de favoriser l’extrémisme et la violence.

Ce mardi matin, les dirigeants France des principaux réseaux sociaux ont d’ailleurs été convoqués par Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté, pour trouver les moyens de lutter contre le «cyber-islamisme».

L'anonymat, un faux problème ?

Comme un serpent de mer, la question de l’anonymat revient une nouvelle fois, afin de responsabiliser les internautes et permettre de repérer plus facilement ceux posant problème. Un argument qui ne tient pas pour certains, indiquant qu’il ne s’agit pas d’anonymat mais de pseudonymat, et que les autorités ont toujours la possibilité de remonter le profil d’un compte pour trouver la personne qui se cache derrière.

Il est à noter également que, dans le cas de l’assassinat de Samuel Paty, les auteurs des vidéos n’ont jamais cherché à dissimuler leur identité.

Le retour de la loi Avia, pour supprimer rapidement les contenus haineux

Il est aussi question d’un retour de la loi Avia, en grande partie censurée par le Conseil constitutionnel cet été, en considérant que le texte portait une atteinte à la liberté d’expression et de communication. Il prévoyait en effet d’obliger les réseaux sociaux à supprimer dans un délai de 24h les contenus haineux signalés. Pour le Conseil, le risque était que les plateformes aillent trop loin et se mettent à censurer d’office beaucoup de textes et de vidéos, afin d’éviter les sanctions.

Et si Gérald Darmanin a estimé que «la proposition de loi Avia aurait permis de faire retirer [les vidéos] et de poursuivre le père de famille (qui a lancé la cabale)», reste que les propos, si critiquables soient-ils, ne relevaient ni de l’apologie du terrorisme, ni d’un thème «manifestement illégal» (comme énoncé dans la loi). Les vidéos, qui sont restées en ligne de nombreux jours (depuis début octobre), auraient-elles alors pu être supprimées ? Difficile de l’affirmer.

La députée LREM Laetitia Avia propose cependant que son texte soit intégré dans le projet de loi contre les séparatismes, présenté au Conseil des ministres le 9 décembre. «Les messages de cyberviolence (contre Samuel Paty) et les attaques sur un fondement religieux auraient pu être mieux modérés et retirés», estime-t-elle dans Le Parisien.

Quelle action contre la sphère islamiste ?

Reste une autre question, liée aux réseaux sociaux mais aussi à l’efficacité des autorités pour repérer sur ceux-ci les personnes radicalisées : comment se fait-il qu’Abdoulakh Anzorov, qui avait posté sur Twitter des messages laissant peu de doute sur sa radicalisation, soit passé à travers les mailles du filet ?

Il avait en effet appelé au jihad contre la Chine et en Afghanistan, qui lui avaient valu des signalements à Pharos, la plateforme du ministère de l’Intérieur. Sans effets, et sans fermeture de compte. Puis, il avait partagé une mise en scène de décapitation et un contenu antisémite, en juillet dernier. Si le support Twitter avait été alerté par la Licra, Pharos n’en aurait pas eu vent, rapporte Le Figaro. Le tweet avait été supprimé, mais rien de plus.

Manque de moyens dans les services de renseignement ? Manque de volonté des réseaux sociaux (qui ont été plus efficaces pour menacer Donald Trump de suspendre ses comptes s’il continuait d’enfreindre les règles) ? La propagande islamiste prospère en tout cas sur ces plateformes, sans grand danger pour la mouvance, à l’heure actuelle.

Preuve en est, après l’assassinat de Samuel Paty, des dizaines de comptes se réjouissaient de sa décapitation. Signe d’un début de changement ou réaction poussée par les circonstances, certains des auteurs ont été visés par des opérations de police, lundi.

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