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Jouets : des associations à l'attaque des stéréotypes

(Illustration) Plusieurs collectifs se sont donnés rendez-vous pour protester contre les stéréotypes que véhiculent certains jouets. [Domaine public]

"Princesse un jour, boniche toujours" ? Costumes de princesses et fer à repasser pour elle, super-héros et jeux de construction pour lui : les stéréotypes ont la vie dure dans les magasins de jouets, au grand dam des féministes.

 

Derrière ce slogan, plusieurs collectifs se sont donnés rendez-vous samedi 13 décembre pour une "action coup de gueule" dans un magasin parisien, à l'approche de Noël.

Dans leur ligne de mire, la division trop marquée entre les produits réservés aux filles et aux garçons, accusés de véhiculer dès l'enfance des clichés sexistes. Et donc de contribuer aux inégalités entre hommes et femmes.

Un sujet sur lequel a planché la délégation sénatoriale aux droits des femmes, et dont les recommandations seront livrées jeudi par sa présidente, Chantal Jouanno (UDI). 

 

Des jeux pour "faire comme maman"

"Chaque fois que je retourne dans un magasin de jouets, je me rappelle à quel point c'est caricatural", s'indigne Fatima-Ezzahra Benomar, du collectif des efFRONTé-e-s.  

Aux filles les jeux pour "faire comme maman", cantonnés à la sphère familiale ou impliquant des notions d'amitié et de partage, aux garçons l'aventure, les jeux développant la motricité et l'adversité.

Omniprésentes dans les magasins de jouets et les catalogues, les couleurs bleu et rose permettent de séparer les univers.

 

Un phénomène récent

Contre toute attente, le phénomène, "relativement récent", s'est développé dans les années 1990, d'après Mona Zegai, auteur d'une thèse sur la socialisation sexuée des enfants par le biais des jouets.

"Dans les années 1970-1980, les catalogues étaient beaucoup moins marqués du point de vue du genre", reflets d'"une époque où on se souciait de l'égalité entre les sexes", poursuit la doctorante auprès de l'AFP, photo à l'appui. Extrait d'un prospectus Leclerc de 1988, son cliché montre une fillette et un garçonnet vêtus de tabliers en plein ménage, à côté du message "tout faire à deux c'est encore mieux".  

Depuis, le marché du jouet a explosé. Aujourd'hui, "les magasins spécialisés contiennent plus de 20.000 références", fait valoir Michel Moggio, directeur général de la Fédération des industries du jouet-puériculture.

Le développement de rayons "genrés" et de codes couleurs répondent ainsi "plus à un besoin du consommateur de trouver un produit rapidement", assure-t-il.

 

 

Un système destiné à "attirer l'enfant"

La segmentation permet aussi de multiplier les ventes, "parce que si des parents ont acheté un vélo rose pour leur petite fille, c'est compliqué de le transmettre à leur petit garçon", analyse Mona Zegai.  

La prépondérance des licences, comme Hello Kitty, ou les Tortues ninja, ont également amplifié ce phénomène. 

Surtout, si les fabricants s'appuient sur les codes du genre, c'est pour "attirer l'enfant", résume Franck Mathais, porte-parole de La Grande Récré. Et "ça marche !", assure-t-il, évoquant les tablettes pour chérubins déclinées en bleu et en rose. 

Autre exemple: la collection "Lego Friends", lancée en 2012 par le célèbre fabricant danois à destination des fillettes. Décriée pour son sexisme - des personnages féminins adeptes de shopping et de défilés de mode -  la gamme est un "succès".  

 

La demande de jouets mixtes existe

Mais "les lignes bougent", estime Franck Mathais. En témoigne la marque Tim et Lou, des jouets "d'imitation mixtes" de bricolage, cuisine, dînette s'adressant aux filles comme aux garçons, avec un packaging plus neutre (blanc, orange, violet). 

"Certains parents ont commencé à réclamer des jouets d'imitation mixtes, leurs garçons ayant eux aussi envie de passer l'aspirateur" explique-t-il. Preuve, selon lui, que les fabricants savent "être à l'écoute".

Les supermarchés U ont aussi fait parler d'eux ces dernières années grâce à des catalogues mettant en scène des garçonnets avec des poupons ou des fillettes avec des camions.  

Seulement, "les garçons qui jouent avec des jouets de filles, ce n'est pas facile à accepter dans les cours de recré", déplore Elisabeth Tissier-Desbordes, professeur de marketing à l'ESCP. 

Elle reconnaît un "cercle vicieux", avec d'un côté des parents qui influencent les choix de leur progéniture, et de l'autre des entreprises qui entretiennent les codes du genre pour faire du chiffre. 

 

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