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GMS : les éleveurs dénoncent la guerre des prix

Des vaches Holstein dans une ferme de Laqueuille, en France [Thierry Zoccolan / AFP/Archives] Des vaches Holstein dans une ferme de Laqueuille, en France [Thierry Zoccolan / AFP/Archives]

Après une première opération mardi soir contre un hypermarché en région parisienne, les éleveurs bovins sont prêts "à tenir longtemps" pour dénoncer les méthodes des grandes surfaces et la guerre des prix qui, disent-ils, les mènent à leur perte.

 

"On verra qui calera le premier", prévient Jean-Pierre Fleury, le président de la Fédération nationale bovine (FNB) qui a dit à l'AFP mercredi pouvoir "tenir des semaines" en harcelant les points de vente à travers le pays.

Mardi soir à Créteil, environ 60 éleveurs ont surgi par surprise au rayon viande pour apposer, de façon détournée, des étiquettes orange utilisées lors des promotions: "Les éleveurs français engraissent la grande distribution" avec les viandes françaises et "Traçabilité douteuse" de leur importation.

Les prix baissent à la production mais continuent d'augmenter en rayons, suscitant le mécontentement. "Je n'ai jamais vu une grande surface déposer le bilan", dit Emmanuel Bernard, éleveur et fils d'éleveur depuis quatre générations dans la Nièvre.

A 42 ans, avec cent vaches reproductrices et 80 animaux à l'engraissage, il voit en effet fondre son revenu: "Sur l'année, il me reste 1.000 euros par mois. J'ai un seul salarié, je le paye mieux que moi mais je devrais l'augmenter compte tenu du travail fourni. Simplement, je ne peux pas: ça me désole", dit-il.

Dans la profession, on gagne rarement le SMIC, affirme Jean-Pierre Fleury: Le revenu moyen par actif oscille entre 15.000 et 18.000 euros par an. Les jeunes ne tiennent pas le coup.

- "150 à 200 euros perdus par vache" -

"Aujourd'hui, les coûts de production atteignent 4,50 euros par kilo de viande, pour un prix moyen au producteur de 3,85 euros, selon FranceAgriMer (organisme public) contre 4,10 euros l'an passé (soit -7%). 70 centimes perdus par kilo carcasse, c'est 150 à 200 euros par vache", souligne M. Fleury qui accuse la grande distribution de faire pression sur le producteur, tout en privilégiant ses propres marges.

Simultanément, les prix en rayon du bœuf frais ont augmenté de 3,9% au cours de l'année 2013 et le chiffre d'affaires des magasins de +1,8%, selon FranceAgrimer.

L'objectif visé est donc au moins d'atteindre 4,50 euros du kilo au producteur pour équilibrer.

En face, la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD) qui réunit les principales enseignes d'hyper et supermarchés (moins Système U et Leclerc) parle de "prise en otages" de ses magasins et des clients alors que la viande mise en rayons est "très majoritairement produite en France" (95%), écrit-elle dans un communiqué.

Elle réfute les accusations de la FNB en dayant recours à un argument qui déplaît: "L'Observatoire des prix et des marges a montré que le rayon boucherie avait une marge négative de -0,8%" après impôt en 2013. Elle cite aussi la baisse de la consommation, estimée à 2% en 2013 (FranceAgriMer).

Ces assertions suscitent le mécontentement de Jean-Pierre Fleury qui rouge conteste l'argumentaire à propos des prix: : "C'est la grande distribution elle-même qui a fourni ses chiffres à l'Observatoire avec des marges calculées après rémunération des actionnaires. Mais nous sur nos exploitations, on n'a pas d'actionnaire". Quant à la baisse de la consommation, il la met au compte de l'augmentation des prix et de la "qualité des viandes qui n'est pas toujours au rendez-vous".

"On fait croire au consommateur qu'on baisse les prix en baissant le grammage des steaks hachés, mais en même temps on augmente les prix pour conserver la marge", dit-il. "La grande distribution est notre autre exception culturelle. Ca n'existe nulle part en Europe. Or ces gens-là sont incapables d'avoir des relations normales avec les producteurs".

Selon la FNB, la survie de nombreuses exploitations se joue et, avec elles, "la capacité à fournir aux consommateurs une viande avec toutes les garanties de traçabilité et de respect des normes de qualité et de production".

Dans tous les départements, prévient son président, les éleveurs sont prêts à faire le coup de poing dans les rayons si les discussions ne s'ouvrent pas. "Le mot d'ordre court sur plusieurs semaines, on se donne du temps".

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